1959.03.00.De Roger Mennevée.Les Documents de l'AIII.Article

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Les Documents de l'Agence indépendante d'informations internationales - mars 1959

Les grandes banques privées parisiennes
La banque Worms & Cie
Ses modifications internes depuis 1954

De très importantes modifications sont survenues, depuis notre article de janvier 1952, tant dans l'organisation sociale interne que dans l'activité de la banque Worms et Cie.
Le capital a été porté de 400 millions à 1.200 millions dans les conditions que nous exposerons plus loin.
Mais ce qui nous paraît surtout important c'est, d'une part, la modification de la politique bancaire de Worms et Cie, et, d'autre part, l'évolution de Worms et Cie vers un groupe d'influences différent de celui-ci avec lequel Worms et Cie était davantage lié jusqu'alors.
Du premier point de vue, il semble, en effet, que, probablement en raison des avantages que les milieux officiels assurent, depuis quelques années, à une politique générale d'investissements, que ce soit dans le domaine pétrolier, dans le domaine immobilier, ou même dans celui que l'on peut qualifier des "investissements boursiers purs", il semble, disons-nous, que Worms et Cie ait décidé d'étendre son département bancaire direct davantage dans ce genre d'activité et qu'elle remette entre les mains des filiales anciennes, ou créées dans ce but, l'exploitation de ses autres éléments commerciaux : affrètement, armement maritime, charbons et combustibles, etc., avec cette chose curieuse qu'elle a fait ajouter statutairement à son objet social, l'activité d'une agence de voyages !
Cette nouvelle politique de Worms et Cie se comprend, d'ailleurs, assez facilement, car, comme nous en avions exprimé la crainte dans notre n° de janvier 1952 - déjà cité - l'excès de l'ampleur des prises d'intérêts par son département bancaire, et avec trop d'éclectisme, dans des affaires particulières trop nombreuses, n'avait pas été sans lui laisser certains mécomptes.
Nous avions déjà cité, à l'époque, l'exemple suggestif des Machines automatiques Bardet avec, d'ailleurs, leurs liaisons synarchiques. Les avatars, au cours des dernières années, des Machines agricoles Puzenat, des Ateliers Moisant-Laurent-Savey par exemple, s'ajoutant aux déboires antérieurs - et qui se continuaient - de la Société nationale du Cameroun, des Établissements Japy, des Établissements Fournier-Ferrier, de la Compagnie industrielle et minière des Alpes, pour ne citer que ceux-là, n'ont pas dû être sans influence dans cette nouvelle politique bancaire qui n'est, d'ailleurs, pas sans apporter à la banque Worms et Cie, du fait des garanties offertes par l'État, des apaisements et des bénéfices intéressants.
Et c'est ainsi que Worms et Cie intervint, soit comme l'un des associés fondateurs de premier plan, soit comme participants dans les sociétés de recherches de pétrole connues sous les pseudonymes abréviatifs de Cofirep, Safrep, Sogefor, Francarep, Cofimer, Prepa, etc. ; dans les affaires de développement régional (région méditerranéenne, région du Sud-Ouest, Normandie), Compagnie française du Sahara, Compagnie financière pour le développement économique de l'Algérie, (Cofidal), etc. ; dans les sociétés d'investissements : Union internationale de placements et d'investissements, Le Portefeuille-Investissements (transformation de sa filiale antérieure, Le Portefeuille industriel), etc., etc.
On doit noter, par ailleurs, les interventions assez nombreuses de Worms et Cie dans les milieux bancaires français.
Sans insister sur la nouvelle association intervenue à la fin 1955, entre Worms et Cie et la banque Vernes & Cie, par la création de la société en nom collectif Vernes-Worms et Cie, Société d'études et de participations financières et économiques au capital de 10 millions et gérée par les représentants des deux maisons fondatrices : MM. Pierre Vernes et Philippe Vernes, pour Vernes et Cie, et MM. Jacques Barnaud et Raymond Meynial pour Worms et Cie, nous rappellerons que nous avons annoncé au début de 1956, que la banque Worms et Cie avait pris une importante participation de contrôle dans la banque parisienne dite "Banque E. Hoskier et Cie", dans laquelle elle était représentée par l'un de ses directeurs personnels : M. Guy Brocard.
Au cours de l'année 1957, la banque Worms et Cie a pris le contrôle officiel de la maison de banque R. Meyer et Cie dont nous avions signalé, antérieurement, les liens indirects avec la banque de Rothschild.
A la fin de la même année 1957, elle s'assurait encore le contrôle de la Banque de l'union lyonnaise dont M. Guy Brocard devint le président, et que la banque Worms et Cie absorba purement et simplement à la fin de décembre 1958.
On prête, d'ailleurs, à la banque Worms et Cie de nouveaux projets de prises de contrôle d'autres affaires bancaires, particulièrement en province.
Le deuxième point que nous considérons comme quelque peu important - car il appuie ce que nous avons écrit dans d'autres articles sur certaines luttes entre de puissantes influences internationales - c'est que, comme nous l'avons signalé dans notre n° de novembre 1955, Worms et Cie semblait déjà s'être sensiblement écartée du groupe Lazard Frères et Cie avec lequel, pourtant, elle avait été étroitement associée depuis presque le lendemain de la première guerre mondiale, pour passer, assez ostensiblement, aux côtés du groupe de Rothschild Frères. La participation étroite de Worms et Cie dans Cofirep, Sogefor, Francarep, Cofimer, Safrep, pour ne parler que des affaires de recherches pétrolières, le confirme nettement à nos yeux, et si, depuis, on trouve de nouvelles associations entre Worms et Cie et Lazard Frères, il faut noter qu'elles ne se sont manifestées qu'après la nouvelle "liaison" de Rothschild Frères-Lazard Frères.
Lorsque, au cours de l'année I954, Worms et Cie dut, pour se soumettre aux nouvelles dispositions légales sur le registre du commerce, y requérir une nouvelle inscription, la société Worms et Cie était au capital de 400 millions de francs, dont 202.326.374 F pour les associés-gérants et 197.673.626 F pour les associés-commanditaires, dans les conditions suivantes :
A) Associés-gérants :

M. Hypolite Worms

141.069.951 F

M. Robert Labbé

38.776.210 F

M. Jacques Barnaud

15.692.573 F

M. Raymond Meynial

6.787.640 F

Total

202.326.374 F

B) Associés-commanditaires

Madame Blanchy

12.043.450 F

Madame Boccon-Gibod

12.043.450 F

Madame Desforges

12.043.450 F

M. Henri Goudchaux

12.043.450 F

M. Jacques Goudchaux

12.043.450 F

Madame Fauchier-Delavigne

12.166.763 F

Madame Fauchier-Magnan

26.166.763 F

Madame Lebel

26.166.763 F

M. Léon Labbé

11.803.526 F

Mme Razsovich

23.576.281 F

M. Michel Leroy

11.788.140 F

M. Roger Leroy

11.788.140 F

Total

197.673.626 F

Comme on l'a vu, plus haut, la société était gérée par :
1°- M. Hypolite Worms, né le 26 mai I889 à Paris (VIII°), fils de Lucien Worms et de Mme Virginie Adèle Houcke, français, marié le 14 février 1912 à Londres, sous le régime de la séparation de biens, avec Melle Gladys Mary Lewis-Morgan, habitant à Paris, 4, avenue Émile Deschanel (VII°),
2°- M. Jacques Joseph Léon Barnaud, né le 24 février 1893 à Antibes (Alpes Maritimes) fils de M. Barnaud, officier de Marine et de Mme née Marie Fournier, français, marié le 21 novembre 1919 à Antibes, sous le régime dotal avec para-phernalité, avec Melle Arnal, demeurant à Paris, 47, rue Spontini (XVI°).
3°- M. Robert Marcel Labbé, né le 5 avril I907 à Paris (8°) fils de M. Jean Labbé, et de Mme née Marie Goudchaux, français, marié le 24 mai I945 à Paris (8°) sous le régime de la séparation de biens, avec Melle Taffanel, demeurant à Paris, 8, avenue Gourgaud (XVII°).
4°- M. Jacques Marie Joseph Raymond Meynial, né le 1er juillet 1902 à Montpellier (Hérault), fils de M. Edmond Meynial, professeur à la faculté de Droit de Paris, et de Mme née Lucie Bonhomme, français, marié le 20 juin 1933 à Paris (XVI°), sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts avec Melle Mabille, habitant à Paris 60, avenue Paul Doumer (XVI°).
La société Worms et Cie déclarait, officiellement, avoir pour objet : l'affrètement et l'armement des navires et des bâtiments de navigation et de transports de toutes espèces, la construction, l'achat et la vente de navires, le commerce des charbons et de tous combustibles, les opérations de banque et de change, ainsi que tous autres genres de commerces ou d'industries que les associés jugeraient convenables.
On notera déjà les modifications importantes apportées à l'objet social, si on compare celui-ci avec les déclarations antérieures.
Ces divers services avaient, comme directeurs et fondés de pouvoirs principaux, les personnalités suivantes :
- secrétaire général : M. Philippe Simoni, né le 5 mai 1895 à Sorio di Tenda (Corse), français.
- directeur financier : M. Robert Malingre, né le 11 février 1898 à Bayon (Meurthe-et-Moselle), français.
Direction générale des Services maritimes
- M. Pierre Douffiagues, né le 26 janvier 1912 à Paris 15°, fils de Joseph André Jacques et de Mme née Marie Louise Labot, français, directeur-général ;
- M. Henri Bouteloup, né le 11 juin 1892 à Vaiges (Mayenne)[1], français, directeur général adjoint ;
Direction générale des Charbons et tous combustibles
- M. Louis Vignet, né le 14 juin 1892 à Lyon (VI°), français, directeur général ;
- M. Michel Leroy, né le 26 novembre 1911, à Paris (XVI°), fils de Paul et de Mme née Suzanne Worms, français, directeur général adjoint ;
Services bancaires
- M. Guy Brocard, né le 25 mai 1904, à Saint-Laurent de La Prée (Charente Maritime), français, directeur ;
- M. Pierre Édouard Coquelin, né le 14 mai 1907 à Paris (VII°), fils de Maurice et de Mme née Madeleine Chassang, français, directeur-adjoint.
Notons que ces déclarations sont incomplètes car elles ne comprennent pas les signatures de deuxième rang (fondés de pouvoirs agissant à deux signatures), contrairement à ce que Worms et Cie avait fait dans ses déclarations antérieures.
A la même époque (1954), Worms et Cie annonçait avoir des succursales exerçant l'armement maritime à Boulogne-sur-Mer, à Brest, à Dieppe, à Dunkerque, à Lorient, à Toulon, à Alger, à Tunis, à Sfax (Tunisie), à Hambourg (Allemagne), à Alexandrie (Égypte), au Caire (Égypte) ; d'autres s'occupant de commerce de combustibles à Angoulême, à Nantes, à La Riche (près de Tours) ; d'autres encore s'occupant de ces deux activités, à Bayonne, à Bordeaux, au Havre, à Marseille, à Rouen, à Port-Saïd (Égypte), à Suez (Égypte) ; et enfin des agences bancaires à Alger, à Casablanca (Maroc).
A fin 1954, le fonds de commerce de minéraux solides exploité au Havre, fut donné en location-gérance à la Société à responsabilité limitée dite Société pour l'exploitation rationnelle des agglomérés et des charbons (Sérac), dont le siège social était à Paris, 25, rue Marbeuf.
Au début de 1956, M. Henri Bouteloup devenait directeur d'une agence de commissionnaire-magasinage en transports, créée en janvier 1951, comme établissement secondaire de Worms et Cie, à Paris, 24, place Charles Fillion.
C'est à la même époque, d'ailleurs, que la société étendait son activité à celle d'agence de voyage.
Entre-temps, par décision des associés du 4 février 1954, M. Pierre Douffiagues, directeur général des Services maritimes, était devenu co-gérant d'une filiale de Worms et Cie, créée sous la forme à responsabilité limitée sous le titre Compagnie maritime de la mer Rouge, en mai 1952, avec, comme gérants, MM. Jacques Goudchaux, par ailleurs, on l'a vu, commanditaire de Worms et Cie, et M. Jacques Revoil. C'est ce dernier que M. Douffiagues remplaçait.
Mais, à la fin de 1955, M. Douffiagues abandonnait ses fonctions chez Worms et Cie et était remplacé à la fois comme directeur général des Services maritimes de Worms et comme co-gérant de la Compagnie maritime de la mer Rouge, par son adjoint M. Henri Bouteloup ; M. Etienne Hallé, né le 19 novembre 1905 à Paris (VII°), fils de M. Etienne Jean Marie Hallé et de Mme née Alice Henriette Fustier, devenant directeur-adjoint.
Par ailleurs, M. Louis Vignet, directeur général des Services charbons et tous combustibles, étant décédé, était remplacé par M. Michel Leroy, précédemment directeur général adjoint et, on l'a vu également, commanditaire de Worms et Cie.
M. Gérard Grédy, né le 19 janvier 1905 à Bordeaux, en devint directeur-général adjoint.
Dans les services bancaires, M. Guy Brocard fut promu directeur général, et M. Pierre Édouard Coquelin, directeur général adjoint, en même temps que M. Robert Dubost, né le 11 septembre I908 à Lyon, était appelé aux mêmes fonctions.
Également à la même époque, Worms et Cie déclarait de nouvelles succursales à Elbeuf, Louviers, (combustibles), Sète, Beyrouth, Tripoli et Sidon au Liban (armateurs) et confirmait l'activité de son établissement bancaire de Marseille (qui avait commencé à fonctionner au moment de la débâcle de 1940).
Puis, Worms et Cie ayant été, conformément aux dispositions légales, obligée de procéder aux opérations financières consécutives aux réévaluations de l'actif, fut amenée à rendre publiques certaines modifications statutaires intervenues entre-temps, particulièrement en ce qui concernait la répartition des superbénéfices entre les associés.
D'une part, la durée de la société fut prorogée jusqu'au 30 septembre 1965, et, d'autre part, par actes des 8 et 16 décembre 1949, cette répartition avait été ainsi précisée par modification de l'article 10 des statuts de la société, dont le texte devint le suivant :
Article 10
« Après les prélèvements opérés comme il est dit aux articles 8 et 9 (des statuts sociaux) le surplus des bénéfices sera partagé de la manière suivante à partir du 1er janvier 1950 :
1° - Jusqu'à concurrence de douze millions pour une année entière, proportionnellement à la part de chaque associé.
2°- Au-delà de douze millions, il sera attribué quatre dixièmes aux gérants en cette qualité, et six dixièmes aux parts de capital.
Les six dixièmes ainsi attribués aux parts de capital seront, eux-mêmes, repartis conformément à l'échelle centésimale suivante :

A. Hypolite Worms

35,27%

A. Robert Labbé

9,69%

A Jacques Barnaud

3,92%

A Raymond Meynial

1,70%

A Mme Blanchy

3,01%

A Mme Boccon-Gibod

3,01%

A Mme Desforges

3,01%

A Henri Goudchaux

3,01%

A Jacques Goudchaux

3,01%

A Mme Fauchier-Delavigne

6,54%

A Mme Fauchier-Magnan

6,54%

A Mme Lebel

6,54%

A Léon Labbé

2,95%

A Mme Razsovitch

5,90%

A Michel Leroy

2,95%

A Roger Leroy

2,95%

Soit au total

100%

Les réserves et bénéfices non distribués, ainsi que les plus-values du capital social, seront répartis aux associés, à compter du 1er janvier 1950, dans les mêmes proportions qui viennent d'être indiquées pour le surplus des bénéfices au-delà de 12 millions.
Toutefois, en cas d'augmentation du capital par incorporation de réserves n'ayant pas leur origine dans un prélèvement sur le compte de "Profits et Pertes", un tiers seulement de la part revenant aux gérants, en cette qualité, pourra être incorporé au capital, les deux autres tiers devant être inscrits comme préciput à exercer à la liquidation.
II est vraiment suggestif de faire la comparaison profonde entre les répartitions fixées par l'acte du 8 décembre 1949 et Par celui du 16 décembre (huit jours après) (voir notre n° de mars 1950) surtout si l'on sait que c'est entre ces deux actes, officiellement par celui du l6 décembre, que M. Barnaud est redevenu associé-gérant de Worms et Cie et ceci nous paraît éclairer largement le rôle antérieur de M. Meynial.
En fait, aucune modification n'intervint dans le capital de Worms et Cie jusqu'à fin décembre 1956, date à laquelle, à la suite des réévaluations d'actif, imposées par les nouvelles dispositions législatives, il fut porté de 400 millions à 1.200 millions, par prélèvement d'une somme de 800 millions à prendre sur les réserves spéciales de réévaluation des immobilisations de la société et des indemnités de reconstitution de ses dommages de guerre.
Cette somme de 800 millions fut répartie entre les associés, conformément aux dispositions statutaires et le nouveau capital social de 1.200.000.000 de francs le fut, de son côté, dans les conditions suivantes :

Associés

Ancien capital

Répartition

Nouveau capital

H. Worms

141.069.951

267.221.820

408.291.771

Robert Labbé

38.776.210

99.789.092

138.565.302

J. Barnaud

15.692.573

62.021.820

77.714.393

R. Meynial

6.787.640

47.490.910

54.278.550

Soit pour les associés-gérants

202.326.374

476.523.642

678.850.016

Mme Blanchy

12.043.450

19.701.818

31.745.268

Mme Boccon-Gibod

12.043.450

19.701.818

31.745.268

Mme Desforges

12.043.450

19.701.818

31.745.268

Mme Fauchier-Delavigne

26.166.763

42.807.272

68.974.035

Mme Fauchier-Magnan

26.166.763

42.807.272

68.974.035

Henri Goudchaux

12.043.450

19.701.818

31.745.268

Jacques Goudchaux

12.043.450

19.701.818

31.745.268

Léon Labbé

11.803.526

19.309.090

31.112.616

Mme Lebel

26.166.763

42.807.272

68.974.035

Michel Leroy

11.788.140

19.309.090

31.097.230

Roger Leroy

11.788.140

19.309.090

31.097.230

Mme Razsovich

23.576.281

38.618.182

62.194.463

Soit pour les commanditaires

197.673.626

323.476.358

521.149.984


En dehors des modifications ainsi survenues dans le capital social, diverses autres ont été apportées à l'actif social.
D'une part, la durée de la société a été, à nouveau, prorogée jusqu'au 31 décembre 1999, les associés-gérants ayant, en outre, le droit, avant cette date d'expiration, de proroger encore la durée de la société, sous réserve de l'accord, de la majorité des associés commanditaires. A l'expiration de la société, comme en cas de dissolution anticipée, la liquidation serait faite par les associés-gérants ou le survivant de ceux-ci. La liquidation ne pourrait avoir une durée de plus de trois ans qu'avec le consentement unanime des ayants-droits dans l'actif social, et si, à l'expiration de ce terme, il restait encore des objets à réaliser et des sommes à recouvrer, chacun des ayants-droit pourrait exiger qu'il en soit fait des lots qui seraient à tirer au sort entre eux. Les associés reprendraient alors leurs parts dans le capital telles qu'elles sont fixées par l'art. 5 des statuts et le solde de l'actif serait réparti dans des proportions indiquées à l'article 10 pour les réserves et les bénéfices non distribués, ainsi, d'ailleurs, que pour les plus-values d'actif.
II faut noter que l'acte du 20 décembre 1956 a, en effet, modifié, une fois de plus, la répartition des super-bénéfices, avec effet du 1er janvier 1957.
La voici, étant précisé, d'une part, que la part des bénéfices attribuée à chacun des associés est portée au crédit de son compte courant, et d'autre part, que jusqu'à concurrence de 12 millions pour une année, les bénéfices se répartissent proportionnellement à la part de chaque associé dans le capital social.
Au-delà de 12 millions, il est toujours attribué 4/10 aux associés-gérants, mais la répartition des 6/10 aux parts de capital est effectuée maintenant sous le coefficient suivant :

 

%

M. Worms

34,02

M. Robert Labbé

11,55

M. Barnaud

6,48

M. Meynial

4,52

Mme Blanchy

2, 64

Mme Boccon-Gibod

2, 64

Mme Desforges

2,64

Henri Goudchaux

2,64

Jacques Goudchaux

2,64

Mme Fauchier-Delavigne

5,75

Mme Fauchier-Magnan

5,75

Mme Lebel

5,75

Léon Labbé

2,60

Michel Leroy

2,60

Roger Leroy

2,60

Mme Razsovitch

5,18

A l'occasion de ces opérations, Worms et Cie a établi, pour la perception des droits d'enregistrement, un bilan résumé au 31 décembre 1955 - peut-être un peu ancien mais qui n'en reste pas moins extrêmement intéressant dont voici la teneur.
Actif

Immeubles

(le siège social 45, boul. Haussmann n'appartient pas à la société, mais à Mme Fauchier-Magnan - à part un immeuble situé 14, rue Auber et évalué à 83 millions, le domaine immobilier de la Société est en province)

563.900.000 F

Navires

1.275.000.000 F

Matériel, outillage et mobilier

547.630.157 F

Titres et participations

10.653.113.034 F

Valeurs réalisables ou à court terme et disponibles

39.869.441.809 F

Total de l'actif brut

52.907.085.000 F

Passif

Provisions pour frais et litiges en cours

161.176.109 F

Dettes à court terme

42.770.497.284 F

Dividendes non payés

125.000.000 F

Total du passif brut

43.056.673.393 F

II restait donc un actif net de

9.850.411.607 F

La société Worms et Cie annonçait, en même temps, un bénéfice de 100 millions réalisé entre le 1er janvier et le 20 décembre 1956.
Nous ne discuterons pas ce bilan, ne serait-ce que parce que, en réalité, il ne représente rien de précis (titres et participations - valeurs réalisables, etc.) mais nous avons l'impression avec la très modeste compétence qui est la nôtre, que nous ne nous trompions pas tellement dans nos appréciations de janvier 1952 et que les raisons de "l'évolution bancaire" de Worms et Cie dont nous parlons au début de cet article, y était déjà incluse.
Cette évolution se caractérisait, d'ailleurs, à la même époque, par le transfert (en location) par Worms et Cie de sa partie relative à l'affrètement et à l'armement des navires, l'importation et le commerce des charbons et de tous autres combustibles exploités à Paris et dans ses succursales provinciales, à une nouvelle filiale Worms, Compagnie maritime et charbonnière constituée fin 1956, d'abord sous forme de société à responsabilité limitée, puis transformée presque aussitôt en société anonyme au capital de 750 millions de francs - en réalité de 1.050 millions en comprenant la prime d'émission - en 75.000 actions de 10.000 francs nominatives, dont 74.780 souscrites par Worms et Cie et 220 par les quatre associés-gérants et deux filiales de Worms et Cie.
Le conseil d'administration était composé de M. Robert Labbé, président directeur-général, M. Hypolite Worms M. Jacques Barnaud, M. Raymond Meynial et la société Worms et Cie. Le président-directeur général était assisté de M. Henri Bouteloup et de M. Michel Leroy, que nous avons déjà cités comme directeurs généraux de Worms et Cie, le premier pour les Services maritimes, le second, pour les Services des charbons et combustibles liquides. Le capital social a été porté depuis à 1.250 millions, par l'émission à 14.000 francs de 50.000 actions nouvelles de 10.000 francs, opération effectuée en juillet 1957, soit six mois après la création.
Mais, ce qui est extrêmement suggestif dans ce transfert d'activité c'est que l'acte de location stipule que Worms et Cie pourra continuer à faire, elle-même, les opérations de rapportant à la même activité, c'est-à-dire que rien ne l'empêche de faire, demain, concurrence à l'autre société.
Il n'est pas besoin d'avoir une rès grande compétence dans les tractations financières et commerciales pour comprendre ce que cela veut dire.
Aucune autre modification sociale n'a été, depuis fin 1956, ni déclarée au registre du commerce, ni déposée au greffe du tribunal de commerce.
Nous aurons l'occasion de revenir ultérieurement sur toutes les opérations ; créations, prises de participations, émissions, faites par la banque Worms et Cie surtout au cours des cinq dernières années, mais peut-être n'est-il pas sans intérêt de signaler qu'elle fut en 1956 parmi les fondatrices de la Société algérienne de documentation atomique, et que, à la fin novembre 1957, M. Raymond Meynial, au nom du groupe Worms, signait, avec l'Amiral Octacilio Cunha, président de la Commission nationale de l'énergie nucléaire, au Brésil, un contrat pour l'installation de deux usines de traitement d'uranium au Brésil.
Au début de 1956, M. Hypolite Worms a été promu, au titre de la présidence du conseil, commandeur de la Légion d'honneur, comme armateur et banquier, chef de Worms et Cie.
De son côté, M. André Guex, directeur chez Worms et Cie, était promu officier de la Légion d'honneur à titre militaire.

R. Mennevée

 

[1] Qu'on ne s'étonne pas du peu de détails donnés en face de certains noms : nous nous en tenons aux déclarations officielles faites par Worms et Cie.

 

 

 

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