1949.07.15.Du service du contrôle économique.Enquête coopérative ACSM

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Service du contrôle économique
3ème division – 1ère section

Objet : Agissements de la coopérative des établissements Worms au Trait (S. Inf.)
Référence : Lettre de la fédération des groupements commerciaux de la Seine-inférieure, en date du 19 mai 1949.

Le directeur général des prix et du contrôle économique à monsieur Tixier, chef du cabinet de M. le ministre des Finances

Vous avez bien voulu me transmettre pour enquête une plainte, en date du 19 mai 1949, de M. Viard, président de la fédération des groupements commerciaux de la Seine-Inférieure, au sujet des agissements de la coopérative des établissements Worms, au Trait.
J’ai l’honneur de vous exposer ci-après les résultats de l’enquête que j’ai prescrite en l’objet et qui fut effectuée en accord avec M. le préfet de la Seine-Inférieure.
L’organisme incriminé est un groupement créé spontanément en 1941 par le comité d’entreprise des établissements Worms au Trait. Il a pour but de permettre l’approvisionnement, à des prix normaux, du personnel des chantiers, qui constituent la majeure partie des habitants de la commune.
Les services comptables de l’entreprise assurent la tenue de la comptabilité et fixent les prix de vente, ceux-ci ne comprennent aucune marge bénéficiaire aussi les bilans du groupement accusent des pertes chaque année (389.624 F pour les exercices 1944 à 1947 ; 373.099 F pour l’exercice 1948).
La plupart des transports sont effectués à l’aide des camions de la société Worms, mais leurs prix en sont réglés par le groupement.
Les locaux utilisés par ce dernier sont installés sur un terrain appartenant à l’entreprise. Un chemin public y donne accès. La façade du bâtiment ne porte aucune inscription permettant son identification.
Les acheteurs ne sont pas tenus de présenter une carte d’adhérent mais il existe, à l’intérieur du magasin, une pancarte indiquant que les ventes sont limitées au personnel de l’entreprise.
En fait, cette restriction n’est pas observée, et tous les consommateurs du Trait, ou des environs, peuvent s’y procurer les produits mis en vente.

Il est apparu, au cours de l’enquête, que l’organisme en cause est irrégulièrement constitué.
En effet, il n’a pas la qualité de coopérative, car ses dirigeants n’ont pas rempli les formalités prévues par la loi n° 47.1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération : ils n’ont pas, notamment, déposé les statuts au greffe de la Justice de paix, ainsi qu’il est prescrit à l’article 20 du texte précité.
Par ailleurs, si les impôts indirects tels que taxe à la production, taxe sur les transactions, taxes locales, etc. ainsi que certains impôts directs (taxe d’apprentissage), sont régulièrement acquittés, l’absence de patente ne permet par de considérer ce groupement comme un commerçant. Il est à noter cependant que pour régulariser des ventes de poisson faites sur la voie publique, une demande de patente a été adressée à la préfecture.

Quelques commerçants du Trait, entendus par les enquêteurs leur ont exprimé leurs doléances, parmi lesquelles figurent les facilités de paiement consenties par le groupement au personnel de la société Worms.
Il n’est pas douteux que cette situation soit actuellement préjudiciable aux commerçants locaux, mais il convient de noter que le rôle social du groupement n’est pas négligeable. Cet organisme a rendu de grands services aux ouvriers des chantiers, dans des circonstances difficiles. Le nombre relativement faible de commerçants installés dans l’agglomération en légitimait la création, surtout si l’on considère que la population n’a fait que croître depuis la guerre. Ce fait avait pour conséquence une augmentation des prix que le comité d’entreprise des établissements Worms a tenté de freiner.
Le rétablissement de la concurrence, qui se manifeste à nouveau dans le commerce, modifie sans doute la situation actuelle. Mais, M. Brétéché, maire du Trait et président du comité d’entreprise des établissements Worms a fait connaître aux enquêteurs qu’une étude est actuellement en cours, tendant soit à transformer le groupement en coopérative, soit à le fusionner avec l’union des coopératives COOP soit même à la supprimer.

En l’absence d’infraction à la législation économique et les irrégularités constatées échappant à la compétence de mon administration, il ne m’est pas possible de donner une suite quelconque à la plainte de M. Viard.

Signé : Rosenstock-Franck
 

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