1945.01.04.De Gabriel Le Roy Ladurie et Hypolite Worms.Au juge Georges Thirion.Interrogatoire
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4 janvier 1944
Interrogatoire de Le Roy Ladurie
L'an 1945, le 4 janvier, devant nous Thirion, juge d'instruction au Tribunal de la Seine, assisté de Colomb, greffier, a comparu :
Le Roy Ladurie Gabriel - inculpé déjà entendu, assisté de Me Bizos et de Me Netter, ses conseils -
II déclare :
En ce qui concerne la Société tunisienne des hyperphosphates Réno et la Compagnie sétoise des produits chimiques, je ne puis que m'en rapporter aux déclarations que je vous ai faites le 2 décembre et confirmer les déclarations que vous a faites Monsieur Nelson Pautier.
J'ignore tout des livraisons qui auraient été faites par la Société tunisienne aux Allemands de sacs et d'alfa. La Société tunisienne n'a livré aux Allemands que 1.575 tonnes de phosphate, chiffre inférieur au montant de la réquisition.
Je proteste contre les déclarations du sieur van Cabeke lorsqu'il prétend que nous l'aurions évincé de la Compagnie cettoise pour pouvoir plus aisément collaborer avec les Allemands.
A aucun moment je n'ai eu la moindre conversation d'ordre politique avec van Cabeke que je n'ai dû voir qu'une fois ou deux [fois] depuis 1940, toujours en présence de Monsieur Nelson Pautier.
Nous avons dû demander à Monsieur van Cabeke sa démission parce que nous avions acquis la conviction qu'il avait détourné à son profit une partie de l'actif social. Une instance auprès de la Cour de Montpellier et des expertises comptables étant en cours, la justice confirmera probablement notre sentiment.
Si nous avions effectivement eu l'arrière-pensée, en prenant la majorité de la Compagnie cettoise et en évinçant Monsieur van Cabeke d'engager cette société dans la voie de la collaboration économique, nous aurions évidemment travaillé avec l'ennemi. Or, c'est sur le seul point avec lequel je suis d'accord avec lui. Monsieur van Cabeke reconnaît que depuis son élimination, la société ni de près ni de loin n'a travaillé avec l'ennemi ou pour l'ennemi.
Monsieur van Cabeke insinue que je serais intervenu auprès de Monsieur Pucheu pour obtenir contre lui des mesures d'expulsion. Je donne sur ce point le démenti le plus formel.
Je crois savoir que Monsieur van Cabeke a fait, à plusieurs reprises et dès avant la guerre, l'objet de mesures d'expulsion tenant à sa nationalité et à ses suspensions successives de paiement.
Pour être édifié sur la qualité des sentiments anti-collaborationnistes dont aujourd'hui prétend se parer Monsieur van Cabeke, je tiens à signaler qu'il n'a pas craint dans la procédure qu'il a engagée pendant l'occupation contre la Banque Worms, d'exiger de la législation raciale et des mesures particulières de contraintes prises par l'occupant à l'égard de notre Maison pour demander notamment de ce chef l'annulation du contrat qui le liait à nous. Il n'a pas craint d'intervenir à cette occasion directement auprès de notre commissaire-gérant Falkenhausen.
Est introduit l'inculpé Worms Hypolite - déjà entendu - assisté de Me Lenard et de Me Netter, ses conseils -
II déclare :
Je m'en rapporte à la déclaration que vient de vous faire Monsieur Le Roy Ladurie et à celle dont vous venez de me donner lecture de Monsieur Nelson Pautier.
Je n'ai rencontré qu'une seule fois Monsieur van Cabeke en 1941 et je n'ai jamais eu avec lui de conversation d'ordre politique. Son renvoi a été rendu inévitable par sa mauvaise réputation et les malversations qu'il a commises au cours de sa gestion de la société.
Et signent après lecture.