Archives

Copie

Audition du colonel Navarre

L'an mil neuf cent quarante quatre, le 21 octobre, devant nous, Georges Thirion, juge d'instruction au Tribunal de première instance de la Seine, assisté de Lombard, greffier, a comparu :
Monsieur Navarre, Henri, colonel, 46 ans, demeurant à Paris, 138, boulevard Berthier.
Lequel serment prêté, dépose :
Je ne suis entré en rapports avec Monsieur Le Roy Ladurie qu'en juin 1944, mais je dois préciser que, dès mars 1944, Monsieur Le Roy Ladurie avait participé au financement du service clandestin que je dirigeais au moyen de placement de bons du Trésor d'Alger qui m'avaient été remis par la délégation générale du général de Gaulle en France. Ce placement qui n'était pas sans risques a procuré à mon service une somme de 6.000.000 de francs. De plus, en juin 1944, Monsieur Le Roy Ladurie m'a remis une somme de F 300.000 à titre de contribution au financement des organisations de résistance.
Vers la même époque, Monsieur Le Roy Ladurie m'a signalé la possibilité dans laquelle il se trouvait du fait de ses relations avec de hautes personnalités allemandes d'engager des négociations de très haute importance sur le caractère desquelles je ne puis donner d'autres précisions. Après avoir pris l'avis de la délégation générale du général de Gaulle en France, j'ai engagé Monsieur Le Roy Ladurie à pousser ses négociations. Elles ont échoué peu de temps avant la libération du fait des interlocuteurs allemands qui n'ont pas osé les pousser à fond.
Pendant l'insurrection de Paris, Monsieur Le Roy Ladurie m'a offert son entremise pour obtenir la capitulation sans combat d'un important îlot de résistance allemand.
Dans tous les contacts que j'ai eus avec Monsieur Le Roy Ladurie j'ai eu l'impression d'avoir en face de moi un Français dont les sentiments nationaux étaient certains. Je signale d'autre part que les missions dont j'ai parlé comportaient des risques indiscutables.
Lecture faite, persiste et signe.