1941.03.22.Dossier (sans émetteur ni destinataire) sur le développement de la Banque Worms et Cie
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Le PDF est consultable à la fin du texte.NB : Ce dossier se compose d'une note datée du 22 mars 1941 sur le développement de la Banque Worms & Cie, et d'un ensemble de fiches datées du 15 février au 16 octobre 1941 et consacrées aux responsables de la société et à certaines filiales.
22 mars 1941
Note sur le développement de la Banque Worms & Cie
La Banque Worms & Cie est d'organisation toute récente. Son développement s'est effectué en dix ans tout juste, exactement dans la période si agitée, aussi bien sur le plan international que sur le plan national français, qui s'écoule de 1929 à 1940.
En 1929, la société Worms & Cie est une bonne entreprise moyenne, convenablement menée, qui s'occupe d'affrètements et de construction de navires. Elle est alors dirigée par deux associés, MM. Michel Goudchaux et Hypolite Worms, qui ont pris la suite, le 1er janvier 1925, d'une maison fondée en 1880, sous les raisons sociales de Worms & Cie, puis, de Worms Josse & Cie, puis à nouveau Worms & Cie. MM. Michel Goudchaux et Hypolite Worms sont cogérants de cette entreprise.
C'est le 1er janvier 1930 que commence une surprenante transformation. La veille, le 31 décembre 1929, Monsieur Barnaud (Jacques, Joseph) s'est rendu acquéreur d'une partie de la commandite pour devenir, dès le lendemain, associé en nom collectif et cogérant.
Tout de suite, M. Jacques Barnaud se révèle comme le grand animateur de l'affaire qui se développe avec une rapidité quasi miraculeuse et dont toutes les entreprises grandissent avec un bonheur singulier.
Tandis que les chantiers de construction de navires prennent une extension considérable, que les affaires de charbonnage se multiplient, la Maison Worms & Cie crée un département de banque qui travaille avec une activité impressionnante, multiplie les initiatives, crée un grand nombre d'affaires nouvelles et, fortement appuyé à Londres, à New York, à Anvers et à Amsterdam, acquiert des intérêts et prend des participations importantes dans toutes les branches de la grande industrie française : transports maritimes, charbonnages, électricité, métallurgie, pétroles, produits chimiques, etc.
En dépit de son faible capital, mais forte de ses relations politiques et mondaines en même temps que des appuis internationaux que lui apportent ses associés anglais, hollandais et américains, la Banque Worms & Cie n'hésite pas à rivaliser avec les plus grosses et les plus anciennes banques d'affaires françaises. Au vrai, elle les supplante à peu près partout et elle a tôt fait de s'introduire dans les principales branches de l'industrie française. Cette activité est fructueuse car, le 11 janvier 1940, en pleine guerre, la Banque Worms & Cie porte son capital de 4 à 40 millions par la simple incorporation au capital d'une somme de 36 millions prélevée sur les réserves.
En dix ans, non seulement la Banque Worms & Cie a ainsi décuplé son capital, mais elle s'est créée des amitiés dans tous les milieux en même temps qu'elle se réservait des intérêts et des participations dans tous les groupements. Elle reçoit du gouvernement français des missions que n'obtinrent jamais les plus grandes banques françaises, telles par exemple que la constitution de la Société française des transports pétroliers et l'acquisition, en quelques mois, pour le compte de cette société, des tanksteamers qui constituèrent la flotte pétrolière française.
Un pareil traitement est refusé, dans le même temps, à de grandes banques d'affaires dont le capital atteint un bien autre chiffre. Cette constatation donne la mesure de la curieuse puissance acquise par la Banque Worms au cours de ces dix années. En d'autres termes, il saute aux yeux que son influence n'est aucunement en rapport avec ses moyens financiers. Il faut rechercher d'autres motifs comme il faut trouver ailleurs les raisons d'une réussite à ce point constante.
Or, si l'on examine de près l'histoire de cette si rapide et si extraordinaire fortune, on s'aperçoit qu'il faut l'attribuer surtout à la réunion méthodique d'exceptionnelles possibilités d'action sur la vie économique du pays aussi bien dans le domaine de la politique intérieure que dans celui de la politique étrangère. A l'intérieur, la banque maintient des contacts étroits avec le personnel politique détenteur du pouvoir. M. Jacques Barnaud cultive avec soin ses relations de camaraderie avec de hauts fonctionnaires de sa génération et qui ont la même formation que lui (M. Baudouin, M. Baumgartner). A l'extérieur la banque, sans chercher le plus souvent à contrôler financièrement les entreprises, ne manque pas d'y prendre des participations qui lui permettent d'avoir des représentants ou des observateurs dans tous les grandes affaires internationales où la France a une place ou des intérêts. Au lendemain de l'armistice, la constitution du gouvernement du Maréchal provoque un complet renouvellement du personnel administratif que la Banque met à profit, avec un soin particulier, pour que ses relations, ses associés ou ses amis s'emparent peu à peu de tous les postes du commandement. Nous verrons qu'à l'occasion de chaque remaniement dans le personnel de Vichy, elle marqua quelques avantages jusqu'à approcher bientôt de la réussite complète qui consiste pour elle à disposer de tous les leviers de commande de l'organisation du nouvel État français, comme de tous ceux de l'industrie et du commerce français dans la nouvelle économie dirigée.
Son rayonnement économique est significatif à cet égard. Constructrice de navires, elle est en contacts suivis avec la grosse industrie métallurgique. Société d'affrètement, elle est en liaison avec les fournisseurs mondiaux de mazout, de gasoil et d'essence en même temps qu'avec le commerce international du charbon. Entreprise de transports maritimes, elle a des relations suivies avec les colonies françaises comme avec tous les pays d'outre-mer et, spécialement, l'Europe du Nord, le Canada et l'Extrême-Orient.
Son rayonnement politique est strictement parallèle à l'économique. Aujourd'hui, au moins six ou sept départements ministériels ont à leur tête des amis éprouvés de la Banque Worms et, parmi les comités d'organisation des professions industrielles et commerciales, plus de soixante pour cent des présidents ou directeurs responsables sont des hommes à elle, tandis que le ministre de la Production lui-même et le délégué général à l'Équipement national sont de ses collaborateurs directs.
Il est bien certain qu'une telle ascension ne peut être due à l'activité d'un seul homme réduit à ses propres moyens, quelles que puissent être l'intelligence et l'habileté exceptionnelles de M. Jacques Barnaud. Cet homme d'affaires de premier ordre a été servi par autre chose que les seules circonstances.
Tout d'abord, il convient de noter que la Banque Worms n'est pas foncièrement juive. Ses fondateurs étaient israélites ou d'origine israélite mais, parmi ses collaborateurs, la majorité est protestante et ses relations politiques appartiennent à ce radicalisme socialiste qui a fourni les meilleurs cadres aux juifs de la franc-maçonnerie internationale, c'est-à-dire celle qui relève plus de la Grande Loge de France que du Grand Orient. Cette affiliation a fourni à la Banque des relations d'affaires considérables, spécialement dans les milieux américains et anglais où l'activité maçonnique du rite écossais est très grand, et dans le pays d'Europe du Nord comme aux colonies françaises où elle n'est pas négligeable non plus. Ainsi la camaraderie polytechnicienne et la solidarité israélite maçonnique ont servi les animateurs d'une entreprise d'une anglophilie vigilante, habile à utiliser toutes les répercussions sur le terrain des affaires, des multiples incidents de dix années de politique d'alliance anglo-française.
1. Le rayonnement commercial de la Banque Worms
Au moment de la déclaration de guerre, la Banque Worms & Cie, installée 43, 45 et 47 boulevard Haussmann, dans des immeubles appartenant à certains de ses associés commanditaires, est dirigée par trois gérants : Messieurs Hypolite Worms, Michel Goudchaux et Jacques Barnaud.
Elle a des bureaux et des chantiers au Havre et une succursale à Anvers où elle est représenté par un fondé de pouvoir.
Elle possède un vaste chantier de construction de navires au Trait (Normandie) comprenant huit cales de 160 mètres de longueur sur 25 ha. de chantiers, avec une cité ouvrière de 250 ha. environ.
Elle possède une flotte de 28 vapeurs.
Elle a installé au Havre, 28 boulevard de Strasbourg, une usine pour la fabrication des briquettes. Elle a, enfin, dans tous les ports de France, des représentants de ses services d'affrètement et d'approvisionnement de navires.
A Marseille, la Banque Worms possède des bureaux installés rue Grignon et représente dans cette ville la compagnie des Chargeurs réunis, dans laquelle elle possède d'importants intérêts.
La Maison Worms & Cie a également d'importants intérêts dans la maison de banque et de métaux précieux Marret, Bonnin, Lebel & Guieu, 220, boulevard Saint-Martin, à Paris.
Elle a des participations importantes dans la Compagnie charbonnière Klockner, dans l'Union d'exportateurs français pour l'Europe du Nord, dans le Comptoir central des agglomérés de houille du littoral français et, enfin, dans la Société des transports pétroliers.
Parmi les trois associés, M. Michel Goudchaux s'occupe plus particulièrement des questions administratives intérieures et M. Hypolite Worms des questions d'affrètement, de pétrole et de charbonnage. C'est enfin le troisième associé, M. Jacques Barnaud, qui dirige le département banque.
Le rayonnement de la banque Worms s'effectue également par ses associés commanditaires dont quelques-uns ont une personnalité mondaine ou même une expérience professionnelle qui leur permet de représenter la Banque dans d'autres affaires importantes.
Voici, à titre d'indication, la liste des principaux gérants ou associés commanditaires, avec l'indication du montant de leurs participations :
- Cogérants
Hypolite Worms | 12.307.692 | |
Michel Goudchaux | 7.076.924 | |
Jacques Barnaud | 1.846.153 | |
MM. Fauchier-Magnan | 3.076.923 | |
Mme Lebel | 3.076.923 | |
Mme Jean Labbé | 4.000.000 | |
Roger Leroy | 923.077 | |
Raymond Leroy | 923.077 | |
Razsovich | 769.231 | |
M. Jacques Barnaud, cogérant, est le principal animateur de la société Worms & Cie, il représente personnellement les intérêts de cette société dans les affaires suivantes :
Nouvelle compagnie havraise péninsulaire de navigation,
Compagnie centrale des prêts fonciers d'Amsterdam (dans laquelle est également intéressé le groupe Lazard)
Crédit colonial (avec MM. Baudouin et Baumgartner),
Compagnie Air-France (avec MM. Baudouin, R. Mayer, Tirard, Renault et Bréguet),
Lyonnaise des eaux et de l'éclairage,
Compagnie indochinoise d'exploitations minières et agricoles,
Compagnie minière coloniale,
Estrellas Mining (Canada),
Société française de transports pétroliers (avec les firmes : Saint-Gobain, Desmarais et Louis Dreyfus).
Enfin, M. Jacques Barnaud, animateur de la Banque dont la gestion représente une très lourde tâche, a encore accepté les fonctions de délégué général du gouvernement français auprès de la Commission économique franco-allemande, fonctions qu'il a accomplies jusqu'ici sans avoir d'incidents ou de difficultés avec les autorités occupantes qui ont avec lui les meilleures relations.
Il n'est pas douteux que cette fonction exercée avec bonheur, dans les circonstances actuelles, par le directeur d'une banque qui a fait sa très rapide et très grande fortune au service d'une politique presque exclusivement franco-anglaise, souligne fortement la personnalité exceptionnelle de M. Jacques Barnaud.
Si l'on étudie maintenant dans le détail le rayonnement de la Banque Worms, on s'aperçoit qu'il s'effectue surtout par le système des relations personnelles. Depuis dix ans, méthodiquement, on a poussé dans toutes les administrations comme dans toutes les industries des collaborateurs ou des amis de la Banque à tous les leviers de commande. C'est à l'intérieur de la franc-maçonnerie administrative française, une franc-maçonnerie des amis de la Banque Worms qui s'est installée à tous les postes de commandement.
M. Jacques Barnaud est le centre de l'organisation qui atteint directement tous les domaines de l'activité nationale.
Administrateur de la Lyonnaise des eaux, il est en contact direct avec l'industrie électrique tout entière et les multiples entreprises de l'ancien groupe Ernest Mercier. Par l'électricité, il rejoint l'électrochimie et l'électrométallurgie qu'il touche aussi du côté métallurgique par son rôle dans les affaires minières de l'Estrellas Mining, de la Compagnie indochinoise d'exploitation minière, de la Compagnie minière coloniale et aussi, pour les métaux précieux, par la participation directe de la Banque Worms dans l'entreprise Marret, Bonnin, Lebel et Guieu ; administrateur de la Société française des transports pétroliers que la Banque a fondée, il y est associé des Desmarais Frères, de Saint-Gobain et de Louis Dreyfus. Il touche les entreprises coloniales par son action au Crédit colonial, à la Minière coloniale et à l'Indochinoise d'exploitation minière déjà nommée. Il touche les affaires maritimes par ses chantiers de construction et par la Havraise péninsulaire et les Chargeurs réunis ; les charbonnages par son Comptoir des agglomérés de houille du littoral français ; il atteint l'aéronautique par la société Air-France où il retrouve Louis Renault, Bréguet, P. Baudouin, Jean Laurent, etc. Il est l'associé de la Banque Lazard à la Société des prêts fonciers d'Amsterdam. Il est en contact avec le Canada par l'Estrellas Mining ; avec les pays scandinaves par le Groupement des exportations pour l'Europe du Nord. Il touche aux pétroles, non seulement par les transports pétroliers, comme nous l'avons vu tout à l'heure, mais au travers de la Banque Lazard, et comme affrètement pour ses achats de mazout, par ses relations suivies avec le groupe Shell. En résumé, il est au centre des affaires anglo-françaises où il a su organiser un clavier très complet qui lui crée une situation d'influence sans précédent jusqu'à ce jour.
II. Rayonnement politique de la Banque Worms
Le rayonnement politique de la Banque Worms est parallèle à son rayonnement économique. Il est aussi exceptionnel dans son étendue que dans sa rapidité. Développé également au cours des dix années 1930-1940, il l'a été de la même manière et par les mêmes méthodes. C'est un réseau de relations personnelles, camaraderie, amitié, solidarité d'écoles, contacts des conseils d'administration. C'est au propre une franc-maçonnerie d'amis, de collaborateurs, d'associés qui pour la plupart appartiennent à la grande franc-maçonnerie qui groupait tout le personnel politique de la IIIème République et qui compte encore de très nombreux adhérents dans les cadres administratifs du nouvel État français.
Les attaches de la Banque Worms avec le gouvernement de Vichy sont connues.
Par M. Baudouin, grand ami de M. Jacques Barnaud, par M. Dumoulin de La Barthète, elle a ses grandes et petites entrées auprès du Maréchal, tandis que cinq ministères au moins, et non des moindres, sont directement sous son influence.
Tout d'abord, le ministre de la Production industrielle, M. Pierre Pucheu, est un collaborateur direct de la Banque. Il est administrateur de l'Union des entrepreneurs français pour l'Europe du Nord, une affaire particulière de la Banque Worms, dans le conseil de laquelle il retrouve M. F. Lehideux qu'un destin favorable aux intérêts de la Banque Worms et de ses amis a poussé très rapidement aux fonctions très importantes de délégué général pour l'équipement national de la France nouvelle.
Le ministre des Finances et de l'Économie nationale, M. Bouthillier, est également un ami personnel de M. Jacques Barnaud et de tout un groupe de camarades associés tels que M. Baudouin, M. Baumgartner, M. Calvayrac, M. J. Meny, etc. Le ministre des Communications, M. Berthelot, ancien camarade de Polytechnique, est également un ami de la Banque et du groupe de ses administrateurs. Enfin, M. Baudouin a laissé aux leviers de commande du ministère des Affaires étrangères un certain nombre de hauts fonctionnaires dévoués, tandis que dans le personnel du Commissariat d'État aux colonies on trouve aux postes les plus importants des amis ou des relations de M. Jacques Barnaud, et des entreprises coloniales qu'il contrôle ou administre.
On ne saurait passer sous silence l'activité d'un fondé de pouvoir de la Banque Worms & Cie, M. Gabriel Le Roy Ladurie, ancien collaborateur de la Banque de Paris & des Pays-Bas, puis de la Banque franco-polonaise, qui est entré à la Banque Worms en 1929, à peu près en même temps que M. Jacques Barnaud.
M. Gabriel Le Roy Ladurie, qui représente la Banque Worms dans diverses entreprises, joue dans cette organisation un rôle qu'on pourrait comparer à celui d'un secrétaire général politique.
Spécialisé dans les bâtiments et travaux publics, il est administrateur de la Société française des sablières de Gennevilliers ainsi que de la Société immobilière du boulevard Haussmann.
Son activité politique est très grande comme l'était naguère son anglophilie. C'est lui qui est en relations avec les organisations politiques actives, suit les mouvements d'opinion et n'hésite pas à en encourager quelques-uns et à en soutenir d'autres. Il dispose de budgets lui permettant cette besogne.
Pour être complets, nous signalerons encore, parmi les collaborateurs de la Banque Worms, un autre fondé de pouvoir beaucoup moins actif, mais qui doit être signalé cependant en raison de la qualité de ses relations mondaines, M. de Leusse, qui serait allié aux de Wendel.
On conçoit que cette organisation de relations politiques, financières, économiques et mondaines, permette à la Banque de disposer partout d'une influence considérable. Cependant, où la politique de M. Jacques Barnaud a poussé au maximum la puissance d'action de l'entreprise, c'est dans l'utilisation des nouveaux comités d'organisation professionnelle nommés au cours de ces derniers mois par le gouvernement de Vichy.
On sait que ces comités désignés par le gouvernement du Maréchal se composent, pour chaque profession, d'un président ou d'un directeur responsables, assistés d'un comité consultatif et chargés de préparer le statut de la profession, statut qui deviendra la règle générale pour tous. A chaque comité professionnel est adjoint un service de répartition dirigé par un répartiteur pourvu de pouvoirs dictatoriaux et qui se charge de la répartition des matières premières nécessaires à chaque industrie.
La Banque Worms a compris dès le premier jour que tenir le comité d'organisation de la profession et être en bons termes avec le répartiteur, c'était pratiquement tenir étroitement en mains l'industrie française correspondante. Elle s'est appliquée aussitôt à atteindre ce but.
Elle y est parvenue très vite.
On ne peut pas encore donner de chiffres définitifs puisque tous les comités d'organisation professionnelle ne sont pas encore créés et que pour beaucoup de ceux qui sont crées, les présidents ou directeurs responsables ne sont pas encore nommés.
Cependant, à l'heure actuelle, sur soixante-dix comités d'organisation professionnelle déjà constitués, nous avons écarté les comités du textile (19) et ceux du tourisme (2), assurance (1), industrie du cuir (5), impression et papier (4) et industrie diverses (13, horlogerie, verrerie, optique, publicité, cinéma, etc.), soit au total 44 comités, pour n'étudier que ces 36 restants.
Or, sur les trente-six comités restant concernant l'industrie lourde française et les industries de transport, nous en avons trouvé vingt-cinq qui sont, par la personne de leur directeur responsable ou par la composition de leur comité, sous l'influence directe de la Banque Worms, ce qui veut dire que pour les onze autres nous n'avons pas trouvé le lien apparent, sans être assuré cependant que ce lien n'existe pas.
Voici l'indication de ces vingt-cinq comités :
1° - aluminium et magnésium
Le président responsable est M. Raoul de Vitry, [administrateur directeur général de Péchiney], directeur général de Minerais & Métaux, en relations avec les différentes affaires minières de M. Jacques Barnaud et avec l'entreprise Marret, Bonnin Lebel & Guieu, affaire de la Banque Worms.
De plus, M. Georges Painvin, membre du Comité, professeur à l'École des mines, est administrateur de la Société d'Ugine, en liaison étroite avec le groupe d'électricité Ernest Mercier et la Lyonnaise des eaux, dont M. Jacques Barnaud est administrateur.
2° - automobile et cycle
Le président responsable est M. François Lehideux, administrateur de l'Union d'exportateurs pour l'Europe du Nord, affaire de la Banque Worms [Renault, Saint-Gobain, Péchiney].
De plus, M. Barnaud est lié avec le baron Petiet et M. Renault, son collègue d'Air France.
3° - produits de carrières et dragages
Le président responsable est M. [Maurice] Piketty, ami de M. Jacques Barnaud et de M. Le Roy Ladurie.
4° - chaux et ciments
Le président responsable est M. Henri Pagezy, [président-directeur général de Distribution d'électricité de l'Ouest,] administrateur de l'Union d'électricité (ancien groupe Mercier) ainsi que de la Lyonnaise des eaux dont M. Jacques Barnaud est administrateur [jusqu'en juin 1941].
5° - produits chimiques
Le président responsable est M. Georges J. Painvin, administrateur [puis PDG] d'Ugine et relié au groupe d'électricité Ernest Mercier, dont M. Jacques Barnaud est administrateur.
6° - combustibles liquides
Président responsable Jules Meny, [administrateur puis PDG de la Compagnie française des pétroles,] ami de M. Jacques Barnaud [cf. fondation de la SFTP]. Parmi les membres du Comité, M. Angot représente Saint-Gobain, associé participant de l'Union des exportateurs français pour l'Europe du Nord, constituée par la Banque Worms. La plupart des autres se retrouve dans la Société française des transports pétroliers, avec la Banque Worms.
7° - 8° - 9° combustibles minéraux solides
Trois comités, l'un pour le commerce, l'autre pour l'importation, le troisième pour l'industrie.
Commerce. Président responsable, M. Albert Frange, administrateur du Comptoir central des agglomérés de houille du littoral français (affaire Worms).
Importation. Président responsable, M. Antoine [ou André] Pol, de la maison Châtel & Dolfus, associés de la Banque Worms dans le Comptoir central ci-dessus désigné.
Dans le Comité, M. Fosserier, du groupe de la rue Lord Byron, également associé de la Banque dans la même société.
Industrie. Président responsable, M. [Aimé] Lepercq, même indication que ci-dessus.
10° - énergie électrique
Président responsable, M. Roger Bouteville [ou Boutteville], [président de l'Union électrique du Centre,] directeur général de l'Union d'électricité (groupe Mercier) lié par la Lyonnaise des eaux dont M. Jacques Barnaud est administrateur [jusqu'en 1941].
11° ferro-alliage
Directeur responsable, M. Eugène Mathieu, [vice-président de Transport d'énergie des Alpes,] directeur général de la Société d'électrochimie et électrométallurgie d'Ugine, liaison avec la Lyonnaise des eaux dont M. Jacques Barnaud est administrateur.
12° - goudron de houille, benzols et dérivés
M. Georges Corret, directeur du Gaz de Paris et presque tous les membres du Comité sont liés à la Lyonnaise des eaux, dont M. Jacques Barnaud est administrateur.
13° - machines agricoles
M. Émile Taudière, président responsable, est ami de M. Pierre Pucheu, administrateur en outre des Établissements Puzenat et collaborateur direct de la Banque Worms.
14° - machines hydrauliques, thermiques et pneumatiques
Président responsable, M. Marcel Danbon, administrateur [directeur général] d'Alsthom (groupe Mercier) relié à M. Jacques Barnaud ainsi qu'on l'a vu ci-dessus.
15° - manutention dans tous les ports
Président responsable, M. [George] Hecquet, du groupe maritime Estier, [président de Travaux et Industries maritimes. Membres du Comité, M. [Robert] Lemaignen, [PDG de la Société commerciale d'affrètements et de commissions], du groupe de la rue Lord Byron qui ont des liaisons multiples avec la société Worms (affrètements) et enfin M. Alexis Baptifaut est collègue de M. Jacques Barnaud au conseil des Chargeurs réunis, [administrateur de la Réunion française des compagnies d'assurances universelles réunies dont H. Worms est également administrateur].
16° - industrie et commerce de la machine-outil, de l'outillage et de la soudure
[Président : Jean Pérony, PDG de Somua.] La majorité du Comité est en liaison avec la Banque Worms. M. Arthur Bommelaer, [PDG] de l'Alsacienne de constructions mécaniques par l'intermédiaire du groupe Mercier, [administrateur d'Alsthom], M. Lucien Biehler et M. Jacques Fenwick comme représentants de marques américaines.
17° - marine marchande
Comité provisoire présidé par l'amiral Docteur dont on a récemment annoncé le remplacement par M. H. Worms. Dans le Comité, M. Francis Fabre [administrateur des Messageries maritimes et directeur général des Chargeurs réunis] est collègue de M. Jacques Barnaud aux Chargeurs réunis et M. J. Briaut est en contact avec la Banque Worms par l'Association pétrolière dont il est administrateur. Relations certaines avec M. G. Hecquet, [président de Travaux et Industries maritimes, lié à] la Société maritime nationale [Estier] et avec M. P. Vieljeux de la maison Demas & Vieljeux, [et Jean Marie].
18° - mécanique
Le président responsable était M. Pierre Pucheu, aujourd'hui ministre de la Production industrielle et administrateur de l'Union des exportateurs français pour l'Europe du Nord (affaire Worms), [administrateur délégué des Établissements Japy Frères].
19° - métaux et alliages non ferreux
[Travail des métaux : président, Jean Constant. Membre du comité : Établissements Japy Frères.]
Président responsable, M. René Painvin, en liaison avec la Banque Worms par :
a. les affaires coloniales comme administrateur de la Minière du Congo français
b. les affaires d'électricité (groupe Mercier) comme administrateur de la Société industrielle des téléphones et la Compagnie générale d'électrométallurgie [dont René Painvin est président],
c. les affaires de métaux comme administrateur de la Compagnie française du bi-métal.
20° - minerai de fer
Président responsable, M. Paul Nevejans, administrateur [puis président] de la Société minière, métallurgique et chimique de l'Orb, [administrateur des Forges de Strasbourg et l'Association minière], en liaison avec Ugine et les sociétés d'électrométallurgie déjà nommées.
21° - minerais et métaux bruts
Directeur responsable, M. Ferdinand Blondel, en liaison avec M. Jacques Barnaud par les sociétés minières en Extrême-Orient et par l'Estrellas Mining.
Dans le Comité, M. Jean Faye, de Minerais & Métaux, et M. Paul Nevejans, déjà nommés.
22° - sidérurgie
Président responsable, M. Jules Aubrun [administrateur des Messageries maritimes et de la Société de construction des Batignolles] à qui sa situation considérable dans diverses entreprises de constructions maritimes a valu de fréquents contacts avec les chantiers Worms (au Trait, Seine inférieure).
23° - transports par navigation intérieure
Président responsable, M. Pierre Brousse, directeur général pour la navigation du Rhin, en relations suivies avec les entreprises Worms dans les ports du Nord et pour les transports de charbon.
24° - transports par voies ferrées d'intérêt local
[Président : M. Boulle]
Secrétaire général, M. Calvayrac, collègue de M. Jacques Barnaud, au conseil d'Estrellas Mining [présidé par J. Barnaud depuis 1937].
25° - assurances
[Président : Jacques Guérard, président honoraire de La Préservatrice Accidents, administrateur de Japy Frères.]
Secrétaire général, M. de Vinon [ou Jean Vinson], administrateur-délégué de La Préservatrice, collègue de M. Pucheu au conseil de la société Japy.
[Banques et établissements financiers
Président : Henri Ardant, PDG de la Société générale, ancien inspecteur des Finances (relation de M. Barnaud).
Commissaire adjoint du gouvernement : Jacques Brunet, directeur du Trésor (relation de MM. Barnaud et Worms).
En résumé, sur 36 comités 25 apparaissent soumis à l'influence de la Banque Worms.
Si l'on veut bien songer que le ministre de la Production industrielle en personne, grand maître de ses organisations nouvelles est lui-même un collaborateur de la Banque Worms, on imagine dans quelle mesure cette banque peut se juger maîtresse de l'organisation industrielle française.
C'est là certainement une situation sans précédent dans l'histoire du pays.
La réussite la Banque Worms telle qu'elle ressort de cette étude obligatoirement superficielle, apparaît sans précédent. Elle est, d'autre part, si complète et d'une forme si particulière qu'on ne peut l'attribuer à l'action seule d'un homme, quels que soient son intelligence, son activité, ses talents, M. Jacques Barnaud a certainement été pour la Banque Worms un animateur exceptionnel, mais cet animateur a toujours été trop bien servi par les circonstances, il a toujours choisi l'affaire qu'il fallait entreprendre, à l'heure précise où il convenait qu'elle fût entreprise, avec trop de sûreté et d'exactitude pour qu'il n'y ait pas dans son succès autre chose que de l'intelligence et des hasards heureux.
Il faut donc admettre que chaque initiative de la Banque ou de son animateur servait une coalition d'intérêts, apparents ou cachés, et que ces intérêts mêmes laissaient la route ouverte à la Banque et libéraient son parcours des embarras possibles pour faciliter les réalisations rapides.
On est dans l'obligation de remarquer ensuite que le développement des affaires de la Banque Worms s'est effectué précisément au cours de cette période de dix années pendant laquelle s'est accomplie l'emprise totale de l'influence anglaise sur la politique et l'administration françaises. Or, les initiatives de la Banque Worms sont toutes, sans exception aucune, des manifestations de cette emprise.
En relations avec les banques juives d'Amérique et d'Angleterre, avec les banques protestantes de Londres, elle était, par les affaires d'affrètement et au travers de ses contacts constants avec l'affaire d'approvisionnement de navires William Cory, en rapports suivis avec la Shell et tout le groupe anglo-hollandais de Sir Henry Deterding, qu'il s'agisse de construction ou d'achat de navires (constitution de la flotte pétrolière d'État français), de transports maritimes (participation des Chargeurs réunis, refonte de la Havraise péninsulaire), d'actions lointaines (entreprises indochinoises d'Extrême-Orient), ou de métaux précieux (mines en Indochine et accord avec la société canadienne Estrellas Mining), l'activité de la Banque Worms est toujours dans le sens de l'entente étroite anglo-française et elle s'exerce d'après des directives toujours suggérées par Londres et acceptées par Paris. En fait, la Banque Worms est la banque de la politique qui devait aboutir à la situation d'août 1939, et c'est là seulement qu'on doit trouver la véritable explication de son succès sans précédent.
Cette constatation est valable pour la période qui s'achève au 2 septembre 1939, mais il apparaît alors plus surprenant encore que la situation de la Banque Worms se soit maintenue et certainement consolidée au lendemain de l'armistice, grandie sous les ministères de Léon Blum, Daladier et Paul Reynaud, on s'explique mal, au premier abord, qu'elle puisse sortir triomphante de la révolution ou de l'évolution qui a vu s'écrouler la 3ème République et naître le gouvernement du Maréchal.
Logiquement, la Banque Worms aurait dû s'effondrer avec le gouvernement de Paul Reynaud. Tout, en apparence, l'y condamnait : ses origines juives, ses compromissions politiques, ses relations maçonniques, ses attaches anglaises et, cependant, moins d'un an après l'armistice, on s'aperçoit que la Banque Worms a ses grandes et petites entrées chez le Maréchal, contrôle les plus importants départements ministériels du gouvernement de Vichy et tient sous sa coupe étroite et directement plus de la moitié de l'industrie française... Enfin, son animateur principal occupe un poste d'une importance sans égale, c'est lui qui représente le gouvernement de Vichy dans ses rapports quotidiens avec les autorités d'occupation.
Quant à l'industrie française, on vient de voir que son présent et son avenir sont entre les mains de trois hommes, tous trois collaborateurs de la Banque Worms et entièrement à leur discrétion : M. Jacques Barnaud, M. Pierre Pucheu et M. François Lehideux. Par eux, par l'organisation professionnelle qu'ils ont préparée et qu'ils achèvent à leur gré, on peut dire que la Banque Worms contrôle, outre l'organisation politique et administrative du nouvel État français, le système nerveux de la nouvelle organisation commerciale et industrielle.
Cette constatation explique beaucoup de choses.
On s'aperçoit que la Banque Worms, instrument de la politique anglaise de 1930 à 1939, a constitué et perfectionné son rôle depuis l'armistice. Elle a continué à servir les intérêts de l'Angleterre et c'est elle qui a voulu et imposé cette politique du gouvernement de Vichy qu'on a appelé l'attentisme.
Elle s'était introduite, elle était placée et elle est demeurée partout où il faut pour faire échec à la collaboration. Elle inspire les conseillers intimes du Maréchal, elle dispose des ministères essentiels, elle a une emprise totale sur le ministère de la Production industrielle et, par le contrôle des professions, elle peut jouer sur le clavier des industries françaises au gré de ceux qui lui donnent leurs directives.
Renseignements d'agence sur diverses personnes ou sociétés citées dans la note présente
M. Hypolite Worms
M. Jacques Barnaud
M. Gabriel Le Roy Ladurie
Union d'exportateurs français pour l'Europe du Nord
Nouvelle compagnie havraise péninsulaire
Air-France
Société d'électrochimie et d'électrométallurgie d'Ugine
Chargeurs réunis
Compagnie charbonnière Klöckner
Hypolite Worms
4, avenue Émile Deschanel - Paris
Né vers 1896, marié et père de famille, le demandé a son domicile personnel au 4, avenue Émile Deschanel, à Paris, où il est propriétaire d'un bel hôtel particulier d'une certaine valeur (situation hypothécaire à vérifier). Il salarie plusieurs domestiques.
M. Hypolite Worms est associé gérant avec M. Michel Goudchaux, négociant armateur, demeurant 68, boulevard de Courcelles à Paris, et Joseph, Jacques, Léon Barnaud, négociant armateur, demeurant 9, square Lamartine, à Paris, de la société en nom collectif et en commandite simple dite Worms & Cie, tous trois étant associés en nom collectif, avec divers commanditaires.
La société Worms & Cie a son siège social 45, boulevard Haussmann à Paris, dans des locaux à usage de bureaux dépendant d'un immeuble appartenant aux héritiers de Madame Delavigne, qui sont commanditaires de la société. Elle est au capital actuel de 40.000 de francs fournis à raison de :
F. 12.307.692 - par M. Worms
F. 7.076.924 - par M. Goudchaux
F. 1.846.923 - par M. Barnaud
Et le reste par les commanditaires.
Il était précédemment de 4.000.000 de francs porté au chiffre actuel en date du 11 janvier 1940 par incorporation au capital d'une somme de 36.000.000 prélevée sur les réserves.
La société a pour objet l'affrètement et l'armement des navires et des bâtiments de navigation et de transport de toute espèce ; la construction, l'achat et la vente de navires, l'importation et le commerce des charbons et de tous autres combustibles, les opérations de banque et de change national et international, toutes opérations se rattachant à ces industries et à ces commerces, etc. Elle dispose de 8 cales de 160 mètres de longueur, le tout couvrant 25 hectares au Trait (Seine inférieure) ainsi qu'une cité ouvrière de 250 hectares, enfin, elle dispose au 138, boulevard de Strasbourg, au Havre, de locaux à usage de bureaux, chantiers et usines pour la fabrication de briquettes.
La société Worms & Cie avait eu au début pour objet principal les opérations d'affrètement, charbons, etc. mais, depuis 1929, elle a ouvert un département de banque qui s'est développé dans de notables proportions ; elle a pris la suite d'une maison anciennement connue sur place et exploitée précédemment par une société constituée en 1880 sous la même raison sociale, modifiée et prorogée à différentes reprises, la raison sociale étant devenue Worms, Josse & Cie, puis à nouveau Worms & Cie. Le 30 juin 1925, M. Majoux, qui faisait partie de la société, céda ses droits à MM. Goudchaux et Worms, et, le 1er janvier 1926, la société actuelle fut constituée entre MM. Worms, Goudchaux comme associés en nom collectif, et divers commanditaires. Le 31 décembre 1929, M. Joseph, Jacques Barnaud s'est rendu acquéreur d'une partie de la commandite de divers commanditaires et est devenu à son tour associé en nom collectif et gérant.
La société intéressée possède des succursales dans la plupart des ports français ; elle est sérieusement dirigée par ses 3 cogérants qui lui ont donné une impulsion, surtout au cours de ces dernières années. Elle possède une flotte de 26 vapeurs et travaille avec une bonne clientèle, notamment les compagnies de chemins de fer. Elle a été nommée administrateur de la Compagnie charbonnière Klockner ; elle fait partie de l'Union d'exportateurs français pour l'Europe du Nord, de la société Comptoir central des agglomérés de houille du littoral français.
D'autre part, M. Worms a été spécialement chargé par le ministre de la Marine de la constitution de la flotte pétrolière pour laquelle il a créé une société dite Société des transports pétroliers, dont il est administrateur.
L'intéressé est à la tête d'une certaine fortune personnelle et est honorablement connu sur place.
Les sources qui nous renseignent estiment que l'on peut envisager favorablement une entrée en relations tant avec la société Worms & Cie qu'avec M. Worms personnellement
15/02/1941
Complément
Il y a lieu de remarquer que, depuis juin 1940, tant M. Worms personnellement que la société Worms & Cie ont fait l'objet de très vives polémiques dans certains journaux.
12/03/1941
Jacques, Joseph Barnaud
9, square Lamartine - Paris
M. Jacques Barnaud est né vers 1895, marié et père de trois enfants.
Inspecteur des Finances, ancien sous-directeur du mouvement des fonds audit ministère des Finances, il est connu sur place depuis plusieurs années déjà. Il est au 45, boulevard Haussmann, associé de la société en nom collectif et en commandite simple Worms & Cie, constituée le 1er janvier 1926 pour 15 ans, ayant pour objet l'affrètement et l'armement des navires.
Il représente d'ailleurs comme administrateur cette société dans différentes affaires, et notamment :
La Nouvelle compagnie havraise péninsulaire de navigation,
Commissaire de la Compagnie centrale des prêts fonciers d'Amsterdam dans laquelle est également intéressé le groupe Lazard,
Commissaire du Crédit colonial avec MM. Baudouin et Baumgartner,
Administrateur de la Compagnie Air-France avec MM. Baudouin, R. Mayer, Tirard, Renault et Bréguet,
de la Lyonnaise des eaux et de l'éclairage, société anonyme constituée le 22 février 1880 pour 99 ans, ayant pour objet l'exploitation de concessions relatives au service d'alimentation des villes en eau potable et l'éclairage par le gaz et l'électricité. Le capital de cette société est de 300 millions de francs, c'est une firme de première importance de cette branche,
de la Compagnie indochinoise d'exploitations minières et agricoles,
de la Compagnie minière coloniale,
de l'Estrellas Mining,
de la Société française de transports pétroliers avec les firmes Saint-Gobain, Desmarais et Louis Dreyfus.
En octobre 1940, il a en outre été nommé administrateur de la Coopérative de ravitaillement des secrétariats généraux.
Il est également membre de la Commission économique franco-allemande.
M. Barnaud jouit sur place d'une bonne considération. Il est domicilié 9, square Lamartine, dans les locaux à usage d'appartement d'un loyer annuel de F 40.000, à son nom. Il a été mobilisé sur place.
Il occupe 3 domestiques, dispose d'une voiture automobile, possède une propriété dans le Tarn et Garonne, et est jugé en bonne position de fortune ; ses engagements personnels et commerciaux ont toujours été bien tenus et les sources consultées le jugent généralement bon pour une entrée en relations.
11/03/1941
Gabriel Le Roy Ladurie
5, avenue Victor-Emmanuel III Paris
Monsieur Gabriel Le Roy Ladurie est né vers 1896 et marié. Il est connu sur place pour avoir été domicilié 8, rue Monbel. Il est depuis 1935 domicilié au 5, avenue Victor-Emmanuel III dans un appartement d'un loyer annuel de F 18,000 à son nom. Il occupe deux personnes à son service.
Il fit ses études dans les affaires financières à la Banque de Paris et des Pays-Bas d'où il fut détaché à la Banque franco-polonaise, société anonyme au capital de F 50.000.000, siège social : 15, rue des Pyramides. En 1929, il entre comme fondé de pouvoir à la Banque Worms & Cie lors de la constitution de celle-ci - 45, boulevard Haussmann.
Il a des intérêts dans diverses affaires commerciales et industrielles ; il est notamment administrateur de la Société française des sablières de Gennevilliers, dont le siège social est 7, boulevard Haussmann à Paris, société anonyme constituée le 27 avril 1920 pour quatre-vingt-dix-neuf ans, au capital de F 6.000.000, ayant pour objet l'acquisition, l'amodiation, la prise de concession de tous terrains pour l'extraction de sable, pierre et tous matériaux, de la Société immobilière du boulevard Haussmann, constituée le 18 octobre 1910 et qui avait à l'origine pour objet de réaliser l'opération de voirie ayant pour but l'achèvement et le prolongement du boulevard Haussmann entre la rue Taitbout et la rue Drouot. Cette société, après une période de prospérité, fut durement frappée par la crise qui toucha l'industrie immobilière, le bilan de l'exercice clos le 31 décembre 1938 faisait apparaître encore une perte de F 532.952 portant ainsi le total débiteur à F 2.499.372. Cette société a actuellement son bureau 5, 7, 9, boulevard Haussmann, où se trouve également le bureau de Monsieur Le Roy Ladurie.
Il jouit sur place d'une bonne réputation ; on le croit à la tête de moyens. Toutefois, il faut tenir que sa situation financière est étroitement liée à celle des sociétés auxquelles il appartient. Il a toujours fait honneur à ses engagements, ses paiements sont réguliers et on le considère généralement comme bon pour une entrée en relations. On nous indique qu'il mène une existence aisée.
11/3/41 RD.1
Union d'importateurs français pour l'Europe du Nord
(UEFEN)
43, boulevard Haussmann, pré. 47, Paris
Société anonyme à capital variable.
Constitution
Quatre-vingt-dix-neuf ans à compter du 5 juin 1939.
Objet
Faire toutes opérations commerciales, industrielles et financières ayant pour but exclusif de développer les ventes à l'étranger et en particulier dans les pays du nord (Danemark, Finlande, Islande, Norvège, Suède), de toutes matières premières et marchandises en provenance de France, colonies, pays de protectorat et territoires sous mandat, constituant l'empire français.
Siège social
43, boulevard Haussmann, dans des locaux à usage de bureaux. Il était à l'origine 45 et 47, boulevard Haussmann, dans des locaux dépendant de ceux occupés par la Banque Worms.
Capital
Variable - le capital initial étant fixé à 200.000 francs.
Conseil d'administration
Messieurs
Killian Hennessy, président directeur général, nommé conformément à la loi du 16 novembre 1940
François Lehideux, industriel, 18, avenue Raphaël, Paris
Bernard Aubry, négociant, 55, boulevard du président Wilson, Bordeaux
Geoffray, Guérin.
Maurice Bonnet, négociant, 19 bis, rue Delessert à Paris
Paul Franin, sous-directeur des services financiers de la Manufacture des glaces et produits chimiques de Saint-Gobain, Chauny et Cirey, 44, quai de Passy à Paris
Henry Geoffray, ingénieur conseiller de commerce extérieur, 7, rue Pascal à Clamart
Lucien Guérin, fondé de pouvoir de banque, 45, avenue Charles Floquet à Paris
Georges Normand, ancien élève de Polytechnique, administrateur de sociétés, 22, rue Beaujon à Paris
Émile Pautrot, conseiller de commerce extérieur, 73bis, avenue Niel à Paris
Pierre Pucheu, industriel à Beaucourt (territoire de Belfort)
Historique
On nous communique que MM. Lehideux, Pucheu, Francin ne font plus actuellement partie du conseil, étant maintenant dans le ministère à Vichy.
Les statuts de cette société ont été établis par M. Hypolite Worms et M. Jacques Barnaud, ayant agi au nom et comme associés gérants en nom collectif et ayant la signature sociale de la société Worms & Cie, 45, boulevard Haussmann.
Cette société, constituée en 1939, n'a pas eu le temps de prendre une extension appréciable avant la déclaration de guerre et les événements qui s'en sont suivis ; elle est actuellement en pourparlers pour reprendre son activité ; c'est une émanation de la Banque Worms et les personnes qui sont à sa tête jouissent d'une bonne considération sur place, néanmoins, nous n'avons pas la possibilité d'émettre un avis quelconque en ce qui concerne l'octroi d'un découvert éventuel à lui consentir mais, il semble que, en suivant de près la marche des affaires, on pourrait envisager une entrée en relations avec elle.
Relations bancaires : Banque Worms
1/4/41 RD 1. Monsieur Degand
Nouvelle compagnie havraise péninsulaire
10, rue de Châteaudun - Paris
Société anonyme : R.C. Seine 214.549 B.
La Société demandée a fait suite à la Compagnie havraise péninsulaire de navigation à vapeur, société anonyme constituée le 1er avril 1882 pour finir le 1er avril 1932, au capital de 10 millions de F. en 20.000 actions de F. 500, avec siège social, 10, rue de Châteaudun, à Paris.
L'assemblée générale extraordinaire du 29 octobre 1931 de la Compagnie havraise péninsulaire de navigation à vapeur a décidé la mise en dissolution anticipée de la société et sa mise en liquidation amiable. M. Paul Bosse, demeurant - 6, rue de Volnay, à Paris - a été désigné comme liquidateur amiable assisté d'un représentant des obligataires et d'un représentant des autres créanciers de la société.
La société anonyme dite Nouvelle compagnie havraise péninsulaire est au capital de 32 millions de F avec siège social - 10, rue de Châteaudun, à Paris, dans des locaux à usage de bureaux, d'un loyer annuel de F 20.000. Elle a pour président M. Hypolite Worms, demeurant 4, rue Émile Deschanel, à Paris - et pour directeur général M. Anatole Bucquet demeurant 28, avenue d'Eylau, à Paris, et ce suivant délibération prise par le conseil dans sa réunion du 17 décembre 1940.
Elle exploite des lignes de navigation en Orient, Indes néerlandaises, etc. et est soutenue par la Banque Worms.
Actuellement, la société salarie une quinzaine d'employés, et, en raison des événements, les affaires sont très calmes. A ce jour, rien de défavorable n'est relevé sur cette société dont les engagements ont toujours été bien tenus.
L'assemblée générale ordinaire des actionnaires, tenue le 27 juin 1939, a approuvé les comptes de l'exercice 1938, qui se sont soldés par un bénéfice de F 7.499.186, les pertes antérieures se trouvant ainsi ramenées à F 151.187.
Le bilan de la société clos le 31 décembre 1939 se totalise tant à l'actif qu'au passif par F 110.415.068,13.
Actif
Matériel naval F 61.149.039,95 - immeubles F 140.955,97 - fonds de commerce F 3.666.666,67 - frais de constitution F 100.000 - marchandises, approvisionnement F 809.571,62 - matériel F 121.131,92 - portefeuille F 744,85 - caisse, banques, chèques postaux F 5.561.811,49 - débiteurs divers F 30.807.175,90 - voyages en cours F 6.314.009,53.
Passif
Capital F 22.000.000 - amortissement matériel naval F 23.700.000 - comptes courants et emprunts F 14.229.629,66 - créditeurs divers F 24.229.629 - voyages en cours F 13.864.647,61 - comptes d'ordre F 6.753.931,60 - profits et pertes : bénéfice exercice 1939 F 5.620.945,80 moins perte des exercices antérieurs F 151.187,84 - reste un solde bénéficiaire de F 5.469.757,95.
Les sources qui nous renseignent estiment qu'on peut entrer en relations en suivant cependant la marche de l'affaire.
Air France
2, rue Marbeuf
Transféré provisoirement 16, avenue Georges V
Boulevard de la Corniche à Marseille
Société anonyme.
Constitution
Durée : quatre-vingt-dix-neuf ans à compter du 20 septembre 1933.
Capital
120.000.000 francs.
Objet
Exploitation d'une entreprise de transports aériens, etc. et toutes opérations s'y rattachant.
Siège social
2, rue Marbeuf, à Paris, dans des locaux d'un loyer annuel élevé ; l'immeuble à cette adresse étant occupé actuellement par les Allemands, la société est transférée au 16, avenue Georges V, dans des locaux à usage de bureaux, mais son activité se trouve à Marseille - boulevard de la Corniche
Conseil d'administration
Général Léon Pujo, président directeur général
Messieurs
Georges Edgar Bonnet, 53, avenue Henri Martin
Gouvernement général de l'Indochine représenté par MM. Blanchard de la Brosse, 4, rue Paul Baudry
Jean Laurent, 5, avenue Bosquet à Paris
René de Peyrecave, 102, boulevard de la République à Saint-Cloud
Victor Pinochet
Charles Boyaux
Et divers administrateurs dont les noms ne sont pas connus à Paris, représentant le gouvernement français.
Historique
Groupe jouissant d'une certaine notoriété sur place, disposant de certaines ressources et intéressé dans différentes affaires.
La société intéressée est placée sous le régime de la loi du 11 décembre 1932 ; elle résulte de la fusion des principales compagnies de navigation aérienne françaises notamment la Compagnie Air-Orient, Compagnie internationale de navigation aérienne (Cidna), Compagnie Air-Union, Société générale des transports aériens, etc. toutes les sociétés absorbées ont été dissoutes.
C'est une affaire d'une certaine importance en son genre qui possède dans la France et le monde entier des lignes aériennes sérieusement dirigées par des personnes compétentes, elle marchait avant guerre dans des conditions satisfaisantes, occupant plusieurs centaines de personnes.
Le 27 avril 1937, le ministère de l'Air a passé avec la Société un avenant, le quatrième, imposé par les fluctuations de la situation générale et les nouveaux services mis à la charge de la Société fixant le plafond des subventions de la Société à F 178.050.000 pour 1937 et 192.000.000 de francs pour 1938 ; les contrats passés avec les gouvernements étrangers ont été renouvelés au cours de l'exercice. La Société a alors renouvelé son matériel et commandé divers appareils pour le renouvellement de sa flotte aérienne sur la base de deux types d'appareils, le bimoteur Floch et le trimoteur Dewoitine.
Le bénéfice net de l'exercice 1938 est de F 6.300.000 contre F 4.994.106 pour 1937. Les comptes de profits et pertes accusent un total de recettes de 422 millions contre 317.879.173 pour 1937, se répartissant ainsi : 164 millions de recettes de trafic, 230 millions de subventions de l'État, pour le solde, recettes de subventions diverses. Pour 1938, les recettes de trafic représentent 71% de la subvention de l'État français, alors que l'année précédente elles n'équivalaient qu'à 56%. Les dépenses, amortissements et charges financières se sont élevées à 416 millions contre 314 millions en 1937, laissant subsister un solde créditeur de F 6.300.000.
En août 1939, les compagnies Air France et Impérial Airways ont signé une entente aux termes de laquelle elles mettront en commun leurs ressources et se départageront les différents services. Désormais il y aura vingt services dans chaque direction entre Paris et Londres et vice-versa pendant l'été et quatorze en hiver.
Les recettes d'exploitation seront partagées entre les deux sociétés.
La situation de la société était bien envisagée sur place et les engagements bien tenus.
Actuellement, en raison des circonstances, l'activité a été transférée à Marseille et il est difficile d'avoir des précisions à ce sujet en raison des difficultés de communiquer avec cette place. Il semble cependant que l'on puisse entrer en relations.
Relations bancaires Worms & Cie, Société générale, BNCI, Crédit lyonnais.
RD 2 22/3/41
Société anonyme d'électrochimie et d'électrométallurgie
et des aciéries électriques d'Ugine
10, rue du général Foy, Paris
Constitution
Durée : du 2 août 1889 à 2.000. modifiée en 1922 pour prendre la dénomination actuelle.
Objet
La production des chlorates et autres produits chimiques hydroélectriques, (électrothermiques, usines électrothermiques en France à Saint-Michel de Maurienne, Plombières, Saint-Marcel, Notre-Dame de Briançon, Le Glandon, Les Cavaux, Sechilienne, Le Giffre, Saint-Jeoire-en-Faucigny, Jarrie, Annecy, Mouthiers, Ugine, Venthon, Bourg-en-Suisse, Le Day, Valorbe ; usines thermiques : Marseille, Lyon, Villers, Saint-Sépulcre, Vénissieux ; gisements de [...] fluor et bauxites dans le Var.
Siège social
10, rue du général Foy à Paris
Capital
F 275.000,000 en 550.000 actions de F 500 chacune. Il était à l'origine de F 600.000 en 120 actions de F 5.000 dont neuf apports, porté en 1891 à F 850.000, en 1893, à F 1.700.000. A cette époque, les actions ont été dédoublées et transformées en titres de F 2.500., porté en 1898 à F 1.700.000, en 1906 à F 6.000.000 (144 actions remises à la Compagnie générale des produits aseptiques) en 1913, les actions ont été divisées en cinq et transformées en titres de F 500 et le capital fut porté à 10 millions, en 1916 à F 10.750.000 (1.500 actions remises à la Société Volta absorbée), en février 1918 à 13 millions, en octobre 1919 à 35 millions, (18.000 actions remises à la Société électrochimique de Giffre, absorbée en 10.450 à Ia Société des Carbures métalliques absorbée), en 1923 à 60 millions, en 1926 à 80 millions ; en 1928 à 83 millions (création des actions ?), en 1930, à 120 millions, en 1931 à F 122.400.000 (4.800 actions remises à la Société française des électrodes, absorbée), en 1933, à F 123.900.000 (3.000 actions remises à la Société des produits [Moden], absorbée), en 1934, les actions ont été échangées contre des actions ordinaires), porté à 130 millions en mai 1937 par la création de 12.200 actions remises à la Société des produits azotés, absorbée. Porté en juin 1937 à F 220.000.000 par l'émission de F 540, de 180.000 actions nouvelles, jouissance 1er juillet 1937 (souscription réservée aux anciens actionnaires). Le capital a été porté au chiffre actuel de F 275 millions le 12 octobre 1939, la somme de 55 millions ainsi incorporée étant constituée à concurrence de 23 millions par le montant prélevé au poste "réserve de primes d'émission" et 27 millions par le montant des réserves extraordinaires. A la même date, le conseil a été autorisé à porter le capital à 400 millions.
Obligations
120,00 obligations de F 1.000.- 5% demi net émises en 1930 à F 990 - amortissables de 1932 à 1966 par tirage ou rachat, avec faculté de remboursement anticipé à partir du 15 mars 1933.
Conseil d'administration
M. Cheronnet, 164, rue de Courcelles à Paris, président qui fait partie des sociétés ci-après :
vice-président administrateur délégué de la société Astor
Georges Jean Painvin - 35, rue Michel-Ange, vice-président et administrateur délégué, président des Produits azotés administrateur des Forces hydroélectriques de [Comminges]
Raymond Berr, 5, avenue Elysée Reclus à Paris, président des Produits barytiques administrateur de [Marles-Kuhlman], administrateur délégué des Superphosphates et produits chimiques du Maroc, administrateur des Produits chimiques Coignet, administrateur délégué de Courrières Kuhlmann, administrateur des Engrais d'Auby.
[Suivent les noms et principales fonctions des administrateurs : Pierre Chaume, L. Colas, René Duchemin, Joseph Frossard, A. Coldet, Henri Gunthert, Stéphane de Lanzac et Laborie, A. Lullin, L. Martinon, Hubert Michel, Georges Patard, Louis de Seynes.]
Historique
Cette société a à sa tête un groupe de personnes ayant de sérieux moyens financiers et possédant des intérêts dans d'autres affaires industrielles.
Depuis sa constitution, cette société n'a pas cessé de se développer, soit en créant de toute pièce de nouvelles fabrications, telles celles du carbure de calcium, du sodium, des électrodes, etc., soit en absorbant des industries en pleine marche et dont l'addition à son activité propre n'a fait que renforcer son armature sociale. II y a lieu de noter qu'un groupement d'industries variées procure une sécurité et une continuité de résultat que connaissent rarement les industries isolées.
En effet, en dehors de sa propre exploitation la société demandée est intéressée dans diverses autres entreprises au nombre desquelles on compte : l'Aluminium français, le Duralaminium, la Société générale du magnésium, la Compagnie industrielle Savoie [Acheson], les Électrodes de Savoie, les Tubes et Aciers spéciaux, les Tôles inoxydables et spéciales d'Ugine, de Gueugnon, etc. Scieries électriques Ugine Uckange, la Société industrielle des dérives de l'acétylène, les Produits azotés, les Forces motrices de la vallée de Romanche, l'Hydroélectrique du Rhône et Savoie ; depuis 1939, elle fait également partie de la Société d'exploitation de répartition des aciers spéciaux, du Groupement d'importation, de répartition des minerais du Cirium, de la société de Manganèse (groupement de mobilisation) du Groupe d'importation et de répartition de minerais de chromes et de fero-chromes.
Elle présente une très grosse surface de par ses diverses installations dont le matériel moderne, l'agencement perfectionné représente une grosse valeur. Elle occupe dans ses différentes entreprises, un personnel nombreux.
Elle semble disposer d'une trésorerie suffisante pour assurer la marche normale de son exploitation et celle-ci se trouve activée par suite des besoins de l'armée au cours des hostilités. Pendant cette période, elle a déployé une activité intense et traité un chiffre d'affaires considérable.
Les exercices de cette société ont toujours été bénéficiaires et les résultats sont des plus satisfaisants.
L'exercice 1936 a donné les résultats suivants : bénéfice brut 28.531.000 ; amortissements : 15.000.000 ; bénéfices nets : 13.531.000 ; réserves : 676.000 ; le bilan de l'exercice 1937 se totalisait à l'actif et au passif par 565.550.000 et faisait ressortir des bénéfices nets de l'ordre de 20.933.000 après 20 millions d'amortissements. Les principaux postes étaient les suivants : à l'actif, immobilisations : 394.679.000 ; amortissements : 201.512.000 participations filiales 34.351.000 ; titres : 5.596.000 ; marchandises : 86.853.000 ; débiteurs : 147.532.000 ; disponible : 98.051.000 ; au passif, capital : 220 millions primes d'émission : 48.643.000 ; réserve : 44.486.000 ; dette consolidée : 113.543.000 ; dette flottante : 118.981.000 ; dividende, tantième : 19.897.000.
Le bilan de l'exercice clos le 31 décembre 1938 reflétait une forte progression des résultats obtenus dans la société ; les comptes de réserve et provisions faisaient apparaître un nouveau fonds de renouvellement de l'outillage et du matériel anciens prélevé sur le compte de profits et pertes en exécution du décret du 13 février 1939.
Nous avons appris par ailleurs que de nouveaux membres avaient été adjoints au conseil d'administration en la personne de Monsieur Colas, de Monsieur L. Marillo, de Monsieur E. Mathieu, R. Perrin, L. de Seynes.
Le bilan clos le 31 août 1939 se totalise à l'actif et au passif par F. 868.571.825,40 faisant ressortir un bénéfice de F 34.387.833,20.
Actif
Immeubles, usines et forces hydrauliques : F 236.914.614,25 ; brevets, patentes et procédés : 1, participation et filiales : 27.608.007,75, espèces en caisse et en banque, effets à recevoir : F 153.050.249,15 ; titres en portefeuille : F 8.968.766,40 ; débiteurs divers F 217.662.115,90 ; loyers d'avance et cautionnements F 2.773.457,9O ; approvisionnements en magasin F 101.498.944,55 ; marchandises fabriquées et en cours de fabrication : F 121.095.667,50.
Passif
Capital social F 220.000.000 ; réserve statutaire : F 12.285.081,90 ; réserve extraordinaire : F 27.000.000 ; réserves de primes d'émission : F 48.642.721,25 ; fonds de garantie supplémentaire d'assurance : F 3.618.172,90 ; fonds de renouvellement de l'outillage et du matériel anciens : F 18.385.605,10 ; réserve spéciale (matériel et outillage renouvelés) F 2.377.529,50; provision pour risques de guerre : F 15.000.000 ; provision pour fluctuations de cours des minerais et métaux : F 57.491.227,51 ; dette obligataires 5% 1930 : F 104.098.000 ; 51/2% 1939 : F 80.000.000 ; solde sur usines, immeubles et terrains F 3.990.740 ; créditeurs exigibles : F 114.554.739,35 ; à terme et provisions F 93.407.177,45 ; fonds de retraites suisses : F 4.765.771,65 versements non appelés sur titres et participations : F 4.699.400 ; obligations à rembourser et coupons restant à payer : F 19.447.172,70 ; profits et pertes : solde ancien : F 4.420.454,25 ; solde de l'exercice : F 34.387.833,20.
Il a été mis en paiement un dividende de F 65 brut par action ancienne et de F 35 brut par action nouvelle.
Actuellement, les affaires de la société sont moins actives en raison des événements, mais rien de défavorable n'est relevé et elle se maintient dans des conditions normales.
La société est membre du conseil de surveillance de la Société immobilière du 83, rue Charles Laffitte à Neuilly.
Les sources consultées estiment que l'on peut continuer Ies relations comme précédemment, en suivant de temps à autre la marche de l'affaire en raison des circonstances.
RD. 1 16/10/40
Les Chargeurs réunis
Compagnie française de navigation à vapeur
3, boulevard Malesherbes - Paris
Société anonyme
Constitution
Durée : 20 ans du 12 janvier 1872, prorogée jusqu'au 12 février 1942, puis jusqu'en 2041.
Capital : 100.000.000 de francs en 200.000 actions de 500 F. A l'origine de 8 millions, porté en 1883 à 12.500.000 F par suite de l'absorption de la Société française postale de l'Atlantique qui lui fit apport de 3 navires attachés au port du Havre et de 4 steamers attachés aux Ateliers et Chantiers de la Loire, à Nantes, et d'une somme de 3.134.194,75 en espèces - porté de 1914 en 1916 de 18.750.000 à 25 millions de francs puis en 1919 à 51 millions et en 1920 au chiffre actuel.
Parts des fondateurs : 16.000 parts de fondateurs sans valeur nominale.
Obligations : 150.000 obligations de 6 ½ net, émises en 1921, à 497,50 amortissables au pair, en 1922 à 1946 par tirages au sort annuels coupons les 1er janvier et 1er juillet, 100.000 obligations de 1.000 francs. 4 ½ demi-net, émises à F 950 en 1930, remboursables de 1933 à 1937, au pair par tirages au sort annuels ou par rachats en bourse, faculté de remboursement anticipé à partir de 1935 coupons 15 avril et 15 octobre.
Un emprunt 6 ½ de 1 million, émis en 1922, a été remboursé par anticipation en octobre 1936, rachat à 102 ½%.
Objet : Exploitation de tous services maritimes de transport, notamment du Havre en Amérique, Amérique du Sud, côte occidentale d'Afrique, Indochine.
Siège social : 3, boulevard Malesherbes, à Paris - dans un immeuble dont la société est propriétaire (situation cadastrale et hypothécaire à vérifier) ainsi que 1, 3 même boulevard.
Au début, 19, rue Gramont, à Paris, puis 38, rue Le Peletier, ensuite 1, boulevard Malesherbes, puis, 11, boulevard des Italiens et enfin, depuis juin 1934 à l'adresse actuelle.
Conseil d'administration : Henry Béranger, officier de la Légion d'honneur, sénateur de la Guadeloupe, ex-ambassadeur de France, président, 8, avenue Frédéric Le Play, Paris.
Léon Cyprien Fabre, administrateur de la compagnie Sud-Atlantique et des Chantiers et Ateliers de Saint-Nazaire et des Établissement Fraycinet, vice-président et administrateur délégué - 47, boulevard Beauséjour, Paris.
Alexis Raptifaut, administrateur de compagnie Sud-Atlantique, de la société La Réunion française, des Ateliers Boissière du Havre, administrateur-délégué, 111, rue du Ranelagh, Paris,
Eugène Collas, administrateur,
Daniel Dreyfus, administrateur de la société Gillet-Thaon, de la compagnie Sud-Atlantique, de la Compagnie des wagons-lits, de la société Immobilia, de la Société commerciale et industrielle de la côte d'Afrique, de la banque Daniel Dreyfus, administrateur, 71, rue de l'Assomption, Paris,
Comte Henri Demandolx, administrateur, 23, rue Reux de Brignolles, Marseille
Francis Cyprien Fabre, administrateur,
Gabriel Lamagnère, administrateur,
Comte Jean Pastre, il y a lieu de signaler qu'il a été inculpé dans l'affaire du complot du CSAR contre la sûreté de l'État, administrateur de l'Électro-[Emble], du Cercle de Monaco, des Établissements Maréchal, de la société Immobilia, de la Société d'entreprises des travaux publics et industriels et des Hôtels de l'Étoile, de la société Gillet Thaon, Fernand Raux.
Commissaires aux comptes : MM. Henri Léon et Gaston Patin de Saulcourt.
Directeurs : MM. Louis Nicol et André Nizery.
Historique : la Société intéressée possédait avant Ies hostilités de 1914 une flotte de 53 navires représentant plus de 90.000 tonneaux de jaugeage, mais dont un certain nombre fut coulé pendant la guerre. Toutefois, à la suite de l'élévation considérable du prix du fret, elle donna une bonne impulsion à la situation.
Elle dispose de nombreuses agences, succursales ou bureaux, notamment au Havre, Bordeaux, Marseille, Dunkerque, Anvers, Hambourg et exploita un certain nombre de lignes en services réguliers, notamment la République Argentine, la Côte occidentale d'Afrique, l'Extrême-Orient. Sur la ligne de l'Amérique du Sud, elle exploite un service de paquebots Anvers-Le Havre, Bordeaux, Espagne, Portugal, Dakar, etc. Les lignes de la Cote occidentale d'Afrique comportent des services de paquebots au départ de Bordeaux, pour Madère ou Ténériffe (alternativement), Dakar, Conakry-Tabou, Sassandre, Port-Bust, Lomé, Cotonou, Souellaba (Douala), Libreville, Port Gentil, Pointe Noire, des services de cargos, reliant tous Ies grands ports. Rotterdam, Anvers, Dunkerque, Le Havre, Bordeaux et tous les ports de la côte d'Afrique, de Dakar à Pointe à Pitre - Pointe Noire, et des services annexes sur la rivière Ogoué et Fernand Wez. Sur ces lignes, cinq navires spécialement aménagés sont affectés au transport de fruits de la Côte d'Afrique et notamment des bananes en compartiments ventilés et réfrigérés, cette catégorie de transports relativement récente n'a pas cessé de progresser. La Compagnie a complété son outillage africain par la mise en service d'avions d'un type spécial qui en fait de véritables navires volants destinés à relier rapidement entre elles les principales escales échelonnées entre Dakar et Pointe Noire. Pour desservir ces trois services, la Compagnie emploie 43 bâtiments représentant une jauge totale de 321.448 tonneaux, une jauge nette de 181.981 tonneaux et un port en lourd de 328.000 tonnes, et une puissance de 166.700 chevaux. L'âge moyen de cette flotte est de 12 à 14 ans. Dans le courant de l'exercice 34-35, la Compagnie a effectué 28 voyages pour le Brésil et Rio de la Plata, 61 pour la côte occidentale de l'Afrique et 25 pour l'Indochine. Ce sont les services vers l'Amérique du Sud qui ont été le plus éprouvés par suite de la crise mondiale. Pour le nombre des voyageurs, il y eut un progrès marqué sur les lignes de la côte d'Afrique, moindre, quoique appréciable encore sur les côtes de l'Indochine.
La société a des intérêts avec la société des Docks frigorifiques du Havre, constituée en 1920 pour quatre-vingt-dix-neuf ans avec pour objet l'entreposage frigorifique. Siège social : quai Johannes Coubert au Havre. Elle a également des attaches avec la Compagnie Sud-Atlantique au capital de 50 millions de francs et a participé à la constitution de diverses affaires, notamment les Consommateurs de pétrole.
En 1925 (décembre), les Chargeurs réunis furent condamnés par la cour d'appel de Rouen à verser une provision de 20.000 F aux ayants droit du ministre de l'Afrique en attendant la fixation des dommages en dehors de ses indemnités. Elle dut rembourser une somme de 20 millions de francs. Elle a dû payer également aux compagnies ayant participé au sauvetage du paquebot "Dahomey" une somme de 2.561.000 F.
Cette affaire est importante en son genre et malgré les difficultés actuelles, se maintient dans des conditions assez satisfaisantes. Elle occupe un nombreux personnel, et son matériel représente une valeur de plusieurs millions de francs. Le bilan au 30 juin 1937 se totalisait à l'actif et au passif par 456.602.000 faisant ressortir un bénéfice d'exploitation de 53.216.288 F. Les amortissements avant inventaire sur le matériel naval ayant été de 51.318.750 F, il restait un bénéfice net de 1.897.538 qui a été joint au reliquat de 81.012. F laissé par l'exercice antérieur a été reporté à nouveau sous déduction de la réserve légale. Dans son rapport, le conseil a souligné que, dans les marines étrangères de commerce, la durée hebdomadaire du travail est de 64 à 72 heures, les 40 heures ont donc placé la marine française en état manifeste d'infériorité et lui ont imposé un fléchissement regrettable de son rendement. Bien que le tonnage mondial ait sensiblement augmenté, celui de la flotte française a diminué de 585.978 tonnes en 1937 et sur Ies 2.902.345 tonnes qui sont actuellement en construction, la part de la France n'est que de 70.824 tonnes ; l'exploitation n'a pas été sérieusement entravée par les événements d'Espagne, les chargements ont marqué une progression appréciable sur Ies lignes du sud et les services ont dû parfois être complétés par les affrètements. Jusqu'à présent, les événements d'Extrême-Orient n'ont pas de répercussion sensible pour l'exploitation de cette ligne.
Le bilan clôturé au 30 juin 1938 a présenté à l'actif comme au passif un montant de 803.073.860,94, à l'actif, le matériel naval figure pour 388.085.827,23, machines et installations frigorifiques : 1.524.617,22, matériel auxiliaire : 3.115.390,50, approvisionnements : 15.588.684,93 ; immeubles et mobilier : 28.854,93 ; valeurs disponibles : 112.199.485,85, valeurs mobilières : 91.754.634,73 ; débiteurs divers : 161.990.537,37.
La flotte est actuellement de 52 unités. Il a été effectué au cours de l'exercice 128 voyages au cours desquels 52.052 passagers ont été transportés et 1.594.675 m3 de marchandises - 568.226 lieues marines parcourues.
Le bénéfice de cette année sociale a été de 3.361.345,79 laissant après les 5% d'intérêts au capital et la réserve légale un apport de 72.901,24.
La situation financière est assez bien envisagée et l'on peut entre en relations sur la base d'un crédit moyen à suivre.
Relations bancaires : Société française de [reports] et dépôts Mirabeau & Cie, [CHRP], Société générale, Crédit lyonnais, BNCI, Banque de Paris et des Pays-Bas, Banque transatlantique.
Compagnie charbonnière Klockner
Pré. Compagnie française Klockner-Humboldt-Deutz 155, boulevard Haussmann Paris
Constitution
Durée : Cinquante ans à dater du 2 mars 1929.
Capital
Au début de F 1.000.000 porté suivant délibération du 27 janvier 1939 à 2 millions par l'émission de 100 actions de 10.000 F souscrites par une société et entièrement libérées à la souscription : ramené au chiffre actuel de F 1.000.000 suivant publication en date du 21 février 1941, en 1.000 actions de francs.
Objet
En France, colonies françaises, pays de protectorat, à l'étranger, importation, vente, fabrication de machines et installations mécaniques de tous genres et notamment de moteurs et véhicules motorisés, exploitation de tous procédés industriels concernant la préparation et le traitement du charbon, minerais et autres, etc. modifié suivant délibération du 27 janvier 1939.
Siège social
Au début : 31, boulevard des Belges, à Rouen, transféré le 27 janvier 1939 au 14, rue de Liège - et, en date du 20 mars 1939, 155, boulevard Haussmann dans des locaux en commun avec les sociétés suivantes : Humblot-Deutz, Compagnie charbonnière et de navigation, Messerschmidt, Avions.
Conseil d'administration
Messieurs
B. [Roehman], à Duisbourg, président directeur général
Auger Guillaume, importateur, Le Havre
Petit René, importateur à Dieppe
Historique
La société demandée marchait au début sous la raison sociale de Compagnie charbonnière Klockner, modifiée le 27 janvier 1939 pour devenir Compagnie française Klockner, Humboldt Deutz, modifiée à nouveau suivant publication du 13 mars 1941 pour reprendre la première appellation de Compagnie charbonnière Klockner.
Elle est appuyée par un groupe allemand Klockner de Duisbourg, sérieusement dirigée elle a toujours travaillé dans des conditions satisfaisantes. Elle dispose de chantiers et entrepôts à Rouen, Nice, Bordeaux et Sète. Sa situation a toujours été bien envisagée sur place et rien de défavorable n'est relevé à son sujet. Elle dispose d'un matériel de bonne valeur et a pris des participations dans d'autres sociétés, notamment en date du 10 août 1932 dans la société Chantiers des petits ports à Paris.
Elle a toujours fait preuve de fonds de roulement satisfaisants pour assurer la bonne tenue de ses engagements et ses paiements sont régulièrement effectués.
Il résulte des avis recueillis que l'on peut entrer en relations.
Relations bancaires : BNCI, agence La Boétie, Société générale, Worms & Cie, CIC.
RD.2 22/3/41