1940.11.27.De l'Agence économique et financière.Article

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NB : Cet article provient d'un recueil de coupures de presse datées du 17 octobre 1940 au 21 décembre 1941, qui est classé au 17 octobre 1940.

Agence économique et financière
27 novembre 1940

Supprimons les Trusts

Plusieurs journaux parisiens mènent une vive campagne avec ce mot d'ordre : supprimons les trusts ! Elle est principalement dirigée contre les grandes affaires juives de banque des Rothschild, Lazard Frères, Worms & Dreyfus. Les allégations produites à l'égard de ces entreprises ne sont que trop justifiées. Les Rothschild, par exemple, ont exercé une influence néfaste sur la politique française du crédits et de la monnaie. Jusqu'à la réforme de la Banque de France de 1936, il était impossible au Conseil de l'Institut d'émission de prendre une décision sans l'assentiment d'Édouard de Rothschild.
C'est à cette influence qu'est dû le fait que le marché parisien, conformément aux désirs de l'Angleterre, n'a pu tirer parti des grandes possibilités qui s'offraient en 1931 après la dévaluation du sterling. Le rôle joué par Lazard Frères apparaîtra comme non moins pernicieux lorsqu'on écrira l'histoire du franc d'après-guerre, car cette entreprise a exercé toutes les pressions imaginables sur le Parlement et la presse afin de torpiller le franc. L'influence mauvaise de la Maison Worms s'est manifestée surtout lorsque, pendant la guerre, les intérêts économiques de la France furent subordonnés à ceux de l'Angleterre. Si de nombreux navires français sont tombés aux mains de l'Angleterre, c'est aux dirigeants de cette firme qu'on le doit. Dans le domaine de l'Agriculture, Dreyfus était considéré, avec juste raison, comme l'ennemi public n°1 ; par ses spéculations de grande envergure, il a ruiné le marché du blé et contraint l'État à prendre des mesures qui, pour lui, constituaient la source de gros bénéfices. L'activité de ces trusts telle qu'elle a pu jeter un certain discrédit sur les Banques françaises, consistait surtout en des menées politiques. Par l'intermédiaire des ministres et des parlementaire, ils pouvaient atteindre sur le terrain politique leurs buts d'intérêt personnel. Cela ne doit plus être possible.
Sur la position des trusts dans l'économie française, nous sommes pleinement d'accord avec le Maréchal Pétain. "La Coordination par l'État des activités privées doit briser la puissance des trusts et leur pouvoir de corruption. Bien loin donc de brider l'initiative individuelle, l'économie doit la libérer de ses entraves actuelles, en la subordonnant à l'intérêt national."
Ces phrases sont claires. Le Maréchal ne s'est pas élevé contre les trusts considérés comme tels, mais contre leur "puissance et leur "pouvoir de corruption". Les trusts sont nécessaires dans chaque pays en tant que grandes entreprises. La France ne pourra jamais renoncer aux réalisations accomplies par quelques grands organismes du crédit et de l'industrie. Des entreprises comme le Crédit Lyonnais, la Société Générale, Schneider, Renault, Citroën, Kuhlmann sont absolument nécessaires, si la France doit rester une puissance au point de vue économique. Mais il ne faut pas qu'elles abusent de leur situation. Ces organismes ne sont pas les maîtres de l'État mais les serviteurs de l'État et du peuple.
C'est moins d'ailleurs d'eux-mêmes que de l'État qu'il dépend qu'ils se contentent de leur situation. Il n'est que trop humain pour les trusts d'exploiter les possibilités qui se présentent et de s'adjoindre un pouvoir politique auquel ils n'ont pas droit. Seuls l'État et l'opinion publique peuvent leur faire échec. L'État doit être assez fort, le corps des fonctionnaires et la presse assez indépendants pour que la corruption soit impossible.
Mais des doutes précisément se manifestent : le gouvernement possède-t-il vraiment ce pouvoir ? De nombreux lecteurs nous écrivent pour exprimer ce doute. L'un d'eux nous dit : "Le décret du ministre de la Production et du Travail, en date du 16 août, sur la réorganisation provisoire de l'Économie française, prévoit la constitution de Comités d'Organisation munis de pouvoirs étendus. Or, ces Comités sont actuellement constitués et composés de nombreux représentants directs ou indirects des trusts. Il est donc à craindre que les intérêts généraux des corporations soient une fois de plus sacrifiés".
Nous ne voulons pas encore pousser nos investigations dans le détail, étant donné que les personnalités qui ont été appelées à créer la nouvelle France n'ont disposé que d'un laps de temps insuffisant pour donner leur mesure. Mais nous avons cru devoir appeler l'attention sur les dangers en question et nous pensons qu'il est bien que l'opinion publique soit avertie. Il ne faudrait pas cependant que la lutte contre les trusts dépassât son but.


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