1937.08.10.Note (sans émetteur ni destinataire).Crise du cabotage

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La loi du 13 juillet 1934, votée pour un an et prorogée depuis lors, à plusieurs reprises, attribue à l'armement libre certaines allocations par tonneau de jauge brute, et par jour d'armement administratif.
Certaines catégories de navigation bénéficiaient de ces allocations avec un coefficient de majoration, tandis que d'autres, au contraire, n'en touchaient qu'une fraction. Le cabotage avait été traité défavorablement par la loi du 12 juillet 1934, et les allocations qui lui étaient attribuées étaient presque nulles.
La situation du cabotage s'est profondément modifiée car cette industrie a été affectée au maximum par les conséquences des mesures sociales du mois de juin 1936, puis celles de la dévaluation, qui a entraîné l'augmentation de tous ces frais. C'est pourquoi la loi du 26 août 1936, accorde aux navires du cabotage, une participation plus grande aux allocations de la loi du 12 juillet 1934. Il n'en reste pas moins que, sous le régime de cette loi, le cabotage avait un traitement défavorable par rapport aux autres catégories de navigation.
Mais la crise du cabotage s'est progressivement aggravée. Subissant toutes les conséquences des réformes sociales et de la dévaluation, cette industrie n'a trouvé aucune contre partie dans l'augmentation de ces recettes, car ses frets sont fixés en fonction des tarifs des chemins de fer, et ceux-ci n'ont pas été relevés, jusqu'à ces derniers jours. Quand ils l'ont été, ce  ne fut que de 18%, ce qui correspond à peu près à 15% pour le cabotage qui traite de quai à quai, c'est-à-dire, manutention comprise au chargement et au déchargement, alors que les frais d'exploitation de ses navires ont augmenté, en un an, de plus de 100%.
Une enquête faite par le Comité central des armateurs, portée à la connaissance du sous-secrétariat d'État à la Marine marchande, par lettre du 5 avril, a montré que les pertes du cabotage s'étaient considérablement aggravées, au point d'atteindre 1 F 12 par tonneau de jauge brute et par jour d'armement administratif ; les allocations qui lui étaient attribuées en vertu de la loi du 26 août 1936, représentaient environ 0,14 centimes.
En conséquence d'une telle chute, le cabinet de M. Blum avait décidé de déposer, au mois de juin dernier, un projet de loi tendant, notamment, à doter d'un coefficient de majoration les allocations versées aux navires armés au cabotage, en vertu des lois du 13 juillet 1934 et du 26 août 1936. Ce projet de loi qui n'avait pu être déposé avant la chute du cabinet Blum, fut remis à l'étude par le cabinet de M. Chautemps, et un texte fut déposé, qui permettait au gouvernement de fixer par décret les coefficients attribués à telle ou telle catégorie de navigation, pour l'attribution des allocations prévues par les deux lois précitées.
Ce projet fut voté par la Chambre, mais ne put l'être par le sénat, la commission des Finances ne l'ayant pas rapporté en temps utile. II aurait permis de majorer les allocations des navires armés au cabotage, dans la proportion convenable, et il convient de souligner que si la commission des Finances du sénat a, en fait, empêché le vote de ce projet, ce n'est pas en raison des dispositions dont il s'agit, mais d'un autre article qu'il contenait, et qui comportait une dépense budgétaire.
Devant l'échec du projet de loi, le sous-secrétaire d'État à la Marine marchande prépara, le 8 juillet, un décret-loi tendant, notamment, à attribuer aux navires armés au cabotage le coefficient 8, pour le calcul des allocations des lois de 1934 et de 1936. Ce décret-loi a été pris en vertu de la loi de pleins pouvoirs, qui permet au gouvernement d'assurer par décrets-lois les mesures tendant à l'équilibre financier et au redressement économique.
Ce projet de décret-loi fut adopté par le conseil du cabinet du 8 juillet, et devait être ratifié par le Conseil des ministres du même jour, qui s'est tenu à 21 heures. Mais, par suite d'un manque de liaison, le décret-loi qui portait déjà la signature du ministre des Travaux publics, ne fut pas soumis au Conseil des ministres.
En fait, le sous-secrétaire d'État à la Marine marchande, l'avait remis au sous-secrétaire d'État aux Finances, qui l'avait envoyé au cabinet de M. G. Bonnet, en vue de sa signature.
Le cabinet de M. G. Bonnet en fit faire une étude par le service du contrôle financier.
Ce renvoi au service des finances ne paraît pas, a priori, bien justifié, puisque le décret-loi en cause ne comporte aucune dépense nouvelle.
II se borne à notifier la répartition d'un crédit qui existe déjà.
Et il convient même de souligner que ce crédit n'affecte pas le budget, car il est alimenté par une surtaxe créée pour cela, sur les recettes douanières.
Malgré ce fait, il se trouve que le texte du projet de décret-loi a soulevé des objections de la part du service du contrôle financier, non point d'ailleurs en ce qui concerne le coefficient attribué au cabotage, mais plutôt en ce qui touche certaines autres modifications de coefficient. Enfin, il semble que le service du contrôle financier aurait été jusqu'à soulever une objection de principe, touchant la légalité du décret-loi, et il aurait estimé qu'il n'entrait pas dans le cadre de ceux que le gouvernement peut prendre en vertu de la loi de pleins pouvoirs.
II est bien évident que cette objection ne résiste pas un examen, étant donné que, pour assurer le redressement économique, il convient, en premier chef, d'empêcher, notamment, certains éléments d'économie nationale de péricliter. La délégation donnée au pouvoir exécutif est assurément assez large pour permettre de prendre toutes mesures qui, on ne saurait trop le souligner, n'impliquent aucune dépense nouvelle pour le budget.
Depuis le 9 juillet dernier, des démarches multiples ont été faites par le cabinet et les services du sous-secrétariat d'État à la Marine marchande, auprès du ministère des Finances. Ces démarches ont été sans effet et, en l'absence du sous-secrétaire d'État lui-même, son cabinet et ses services n'ont pu vaincre, jusqu'à présent, la résistance du ministre des Finances, qui se retranche derrière les objections de ses services.
Pendant ce temps-là, les entreprises de cabotage continuent à réaliser, tous les jours, des pertes considérables, et elles ont même dû faire connaître au sous-secrétaire d'État à la Marine marchande, l'obligation dans laquelle elles se trouvaient de désarmer leurs navires. En fait, les désaffections et les désarmements sont commencés et ne peuvent qu'être poursuivis, à moins d'une amélioration considérable dans l'aide qui leur est accordée.
Le 29 juillet, le sous-secrétaire d'État à la Marine marchande a adressé au ministre des Finances, une lettre lui demandant de signer d'urgence le projet de décret-loi, et soulignant, une fois de plus, la situation lamentable de cette industrie.
Poux terminer, il convient de souligner, à nouveau, que l'aide à l'armement accordée par la loi de 1934, n'est pas une charge pour le budget puisqu'elle est prélevée sur une surtaxe douanière créée tout exprès ; qu'il ne s'agit que d'une somme très faible - quelques millions - lesquels seront prélevés sur un ensemble considérable d'armements, dont les parts ne seront réduites que légèrement et au profit d'une industrie qui, si elle était un peu moins touchée que les autres en 1934, est devenue maintenant celle qui a à lutter contre le plus de difficultés.


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