1914.08.07.De Worms et Cie Bordeaux
7, allées de Chartres,
Bordeaux, le 7 août 1914
Messieurs Worms & Cie Paris
Messieurs,
Nous vous confirmons nos lettres des 3, 4, 5 & 6 courant et avons reçu ce matin la vôtre du 5.
Nous avons été particulièrement heureux d'entendre la voix de M. Goudchaux au téléphone ce matin. Vous nous avez dit que, sauf erreur, vous aviez reçu toutes nos lettres jusqu'au 5 inclus et il ne vous manquerait donc que celle d'hier.
Nous sommes dans le même cas en ce qui concerne vos propres lettres, c'est-à-dire que seule celle du 6 courant nous manque encore.
"Listrac". Nous sommes désolés des nouvelles que vous nous donnez et il serait véritablement violent que les allemands aient arrêté "Listrac" alors que ce vapeur devait quitter Hambourg le 31 juillet et que, de toute façon, la guerre n'a été déclarée par l'Allemagne à la France que le 3 août à 5 h 45 du soir. Si donc notre vapeur a été détenu à Hambourg, c'est en violation du droit des gens et cela pourra donner lieu à réparations à la fin de la guerre. Nous sommes bien anxieux d'être fixés définitivement sur le sort de "Listrac" et nous comptons que vous voudrez bien le faire dès que vous saurez à quoi vous en tenir.
Ligne de Dieppe. Nous pensons que "Cantenac" parti de Dieppe le samedi matin 1er août, est resté à Grimsby et que "Pessac" qui a dû quitter Grimsby samedi est bien arrivé à Dieppe. Il ne resterait donc plus que "Haut-Brion" qui, normalement, aurait dû partir samedi soir 1er août de Dunkerque pour Hambourg, mais nous sommes persuadés qu'il aura été retenu à Dunkerque.
Mouvements. Nous avons commencé ce matin le chargement de "Bidassoa" pour Bayonne et le déchargement de "Pomerol" arrivé hier matin de Dunkerque, Boulogne et Brest. Nous travaillons à une équipe sur "Bidassoa" et à deux équipes sur "Pomerol", au total 60 hommes.
Nous continuons le déchargement de "Margaux" à deux équipes, avec 44 hommes.
Nous pensons commencer le chargement de "Fronsac" pour Nantes et, éventuellement, La Pallice, au début de la semaine prochaine. Nous avons actuellement en vue environ 120 tonnes pour Nantes et nous nous mettons d'accord avec la Maison du Havre.
"Pontet-Canet", "Hypolite-Worms" et "Suzanne-et-Marie" sont aux Docks.
Personnel. Vous nous avez dit ce matin par téléphone, que nous devions continuer à payer les appointements des employés restant ici, et donner des secours aux familles de ceux qui sont partis et qui seraient dans le besoin. Nous attendons votre lettre nous confirmant ces indications, mais permettez-nous de vous dire que tous les jeunes gens qui sont partis et qui sont tous mariés, sauf un, ont tous également des charges de famille : femme, enfants ou parents âgés. Il est certain que dans la plupart de ces foyers le départ de ces jeunes gens signifie la gène et, pour certains, la misère. D'un autre côté, vous savez que nous avons laissé partir les mobilisés sans même leur payer leur mois d'août.
Veuillez agréer, Messieurs, nos salutations empressées.
[Signature illisible]