1964.02.28.Note de Leonard.ACSM
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Le 28 février 1964
Note pour monsieur le secrétaire général
J’ai l'honneur de vous adresser les renseignements relatifs au cargo "Ville d’Anvers" dont le lancement doit avoir lieu le 2 mars 1964 aux Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime ( Le Trait).
Ces renseignements concernent :
- le navire
- l‘armateur, la Nouvelle Compagnie havraise péninsulaire de navigation
- le constructeur : Les Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime,
I Le cargo "Ville d’Anvers"
Il s'agit d’un navire qui a déjà changé deux fois de propriétaire, avant même qu'il soit lancé.
Sa commande avait été faite par la « société des transports maritimes algériens » suivant protocole du 23 janvier 1962, confirmé par contrat du 15 mars. À la suite des événements en Algérie, la commande a été reportée à la société générale des transports maritimes par avenant en date du 28 juin 1962.
Mais une fois de plus, cette commande a été transférée à la Nouvelle Cie havraise et péninsulaire de navigation par convention confirmée par un nouveau, contrat du 4 juillet 1963, conforme au premier. Par la suite encore, le prix du navire a été augmenté à deux reprises et la date de livraison contractuelle reportée au 15 mars 1964.
La mise sur cale a eu lieu en mars 1963. Ce navire avait été antérieurement dénommé le "Mont Aigoual".
Caractéristiques du navire :
- Longueur hors-tout : 154 m. 80
- Longueur entre p p : 142 m.
- Largeur h m : 20 m. 60
- Creux au pont supérieur : 12 m. 50
- Port en lourd : 11.200 t en shelter ouvert / 14.500 t en shelter fermé
- Jauge brute : 10.250 tx.
Appareil propulsif
Moteur MAN Diesel X 8 Z 70/120 n
8 cylindres = Puissance 8 000 cv (utilisation)
10 560 cv (maxima)
Vitesse aux essais = 17,30 nœuds.
Le cargo "Ville d’Anvers" est le 3ème d'une série de cargos de moyen tonnage construit par les ACSM, ces dernières années.
Il a été précédé par :
- Le "Ville du Havre" livré en janvier 1962
- Le "Ville de Brest" livré en septembre 1962
l’un et l’autre pour la NOCHAP, avec des caractéristiques comparables.
Deux autres cargos de 12.000 tdw sont en outre commandés par la même société, l’un livrable en avril 1964 et l'autre en janvier 1965.
Le prix révisé du "Ville d’Anvers" se monte à 14.930.000 Francs.
II La Nouvelle Compagnie havraise péninsulaire de navigation
La Nouvelle Compagnie havraise péninsulaire société anonyme au capital de 26.400.000 Frs a été constituée en 1930 mais ses origines exactes remontent à 1882.
Elle comprenait 7 petits navires dont la portée en lourd variait de 500 à 1800 tonnes.
Desservant déjà Madagascar, la compagnie, sous le nom de Compagnie Havraise Péninsilaire de navigation à vapeur prit immédiatement une situation prépondérante dans l'Océan indien. C’est en 1930 qu’elle devint la Nouvelle Compagnie havraise péninsulaire. Dès 1933, les 2 compagnies française desservant Madagascar la NOCHAP et la Compagnie des messageries maritimes après avoir conclu ensemble un accord de pool [illisible] à la ligne norvégienne : Scandinavian East Africa Line, puis à la Cie Hansa.
Avec l’indépendance est apparu la nécessité de doter Madagascar d’une flotte battant pavillon malgache. Elle [illisible] une filiale dite « Compagnie malgache de navigation » a été créée en 1960 par la NOCHAP avec la participation du gouvernement malgache.
Depuis 1956 la compagnie a agi tout à fait dans le sens du 4ème Plan en commandant 4 cargos, en effectuant des [illisible] de navires anciens puis adoptés et en contribuant à la création de la flotte malgache.
En mai 1963 la NOCHAP avait en service :
18 navires long courriers
dont 3 mixtes - d'un port en lourd total de 115.203 T.
et 3 caboteurs - d’un port en lourd total de 7.908 T.
soit au total 18 navires d’un port en lourd total de 123.113 T.
Son chiffre d’affaires était de
61 millions de Frs en 1961
81 millions de Frs en 1962
et 104 millions de Frs en 1963 ( C.A. provisoire et sur 15 mois).
En 1956 et en 1963 la compagnie a obtenu la bonification de plusieurs de ses crédits.
En janvier 1964, elle déposait un dossier de demande de bonification d’intérêt pour le financement partiel de la construction du Ville d’Anvers soit la bonification des crédits suivants :
1 moyen terme de 5 millions consenti pour 5 ans
1 long terme de 6 millions consenti pour 10 ans
1 long terme de 3 millions consenti pour 10 ans
Ce dossier sera étudié à une séance ultérieure de la CIBIA.
III Le chantier du constructeur : Les Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime au Trait
Société anonyme au capital de 6.000.000 de Fr.
Sur les 60.000 actions représentant ce capital, 54,950 sont possédées par le groupe Worms et 4.700 par l‘Union immobilière pour la France et l’étranger.
Conseil d’administration.
Président-directeur général : M. Herrenschmidt.
Parmi les administrateurs, on relève outre la présence de M. Labbé Robert, Président de la NOCHAP et du CCAF, celle d’un administrateur représentant du groupe Worms, et d’un représentant des Forges et Chantiers de la méditerranée avec lesquels la société est liée par un accord de coopération technique.
Les ACSM sont de création récente puisqu’ils sont nés en 1917 des besoins d’un appareil productif accru du fait des hostilités.
Ils sont contrôlés, de longue date par Worms, ce qui leur procure la clientèle de la NOCHAP (Havraise péninsulaire) filiale de Worms qui a commandé, ces dernières années, une série de 4 cargos de ligne rapides identiques dont deux sont déjà livrés : "Ville de Brest" et "Ville du Havre", et deux actuellement en cours de construction. Cette compagnie a, en outre, racheté sur cale le "Ville d’Anvers". Une amélioration du marché maritime entraînerait probablement deux commandes supplémentaires de ce type.
Le chanter du Trait constitue le type du moyen chantier dont le degré de technicité élevé lui permet d’offrir une gamme diversifiée de navires aux armateurs (méthaniers, GPL- car-ferry, transporteur de soufre liquide) sans oublier son rôle ancien de constructeur de sous-marins. C’est en effet un fournisseur attitré de la Marine nationale pour laquelle il dispose d’une cale couverte.
Les ACSM travaillent à 85% pour les activités navales (constructions neuves). Le dernier programme de constructions arrêté au 1er mars fait état des livraisons à venir suivantes :
- C G "Ville d’Anvers" 14.500 tdw livrable en avril 1964
- C G n° 3 NOCHAP 12.000 tdw livrable en avril 1964
- C G L "Jules Verne" pour Gaz-marine 10.000 tdw livrable en novembre 1964
- C G n° 4 pour NOCHAP 12.000 tdw livrable en avril 1965
- Pq Car ferry n° 172 pour Stena (Suède) 2.500 tjb - livrable en avril 1965
- Pq Car ferry n° 173 pour Stena (Suède) 2.500 tjb – livrable en mai 1965
Aucun problème d’emploi ne doit donc se poser d’ici la fin de l’année 1964 ; il n’en serait pas de même pour 1965, dans l’hypothèse d'une absence de commandes nouvelles.
Les chantiers disposent de cinq cales dont celle couverte de la marine nationale.
L’effectif total inscrit s'élève à 1800 dont 1350 ouvriers environ, auquel il faut ajouter environ 250 sous-traitants.
Les travaux étrangers à la construction navale occupent une place accessoire dans le volume d’activité total du chantier (250 ouvriers, soit 12,5% du total de la main d’œuvre[1]. Cependant ces derniers ont terminé la réalisation d’un programme de conversion de 4.780.000 Fr prévus pour les années 1960 à 1962. L’objectif à atteindre (240 ouvriers convertis, soit 200 de plus qu’initialement) l’a été finalement.
La société a présenté un nouveau programme d’investissements en 1963, qui, compte tenu de ses qualités techniques, a permis de lui attribuer le bénéfice d’une aide spéciale temporaire et d’un prêt [illisible] le maximum de célérité.
Cependant, il n’en demeure pas moins qu’en l’absence d’un effort de conversion à long terme, la situation sociale du Trait risque de devenir grave au cas où la crise mondiale des commandes se prolongerait car la mono-industrie navale constitue, dans cette hypothèse, un danger permanent que les ACSM devraient avoir à cœur de pallier en diversifiant dès maintenant leurs activités. La société, influencée en cela par son président, a d'ailleurs ce problème présent à l’esprit, car il ne fait aucun doute pour elle que son avenir à long terme est sur terre et non plus sur l’eau.
Dans le court terme, les ACSM auraient intérêt à rechercher des commandes de construction métallique d'origine publique (blocs scolaires) pour lesquelles ils semblent posséder une technique similaire à celle qui a fait ses preuves.
P. Léonard.
[1] Dans ce total, sont compris, outre les effectifs ACSM (main d’oeuvre directe) affectés à des travaux terrestres, ceux de la filiale des ACSM, les Constructions mécaniques du Trait au capital de 4 millions de francs, société qui est chargée désormais de réaliser toute l'activité de mécanique de l’ensemble industriel du Trait et dont les perspectives d’expansion sont bonnes.