1949.06.03.Des Cols bleus.Article
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3 juin 1949
La Compagnie Worms est spécialisée dans le cabotage international
et a réuni ses intérêts à la "Péninsulaire"
Bien que fondée en 1848, la Maison Worms et Cie n'est véritablement devenue une compagnie de navigation qu'en 1854, au moment de la guerre de Crimée alors qu'elle traitait des affrètements sur la mer Noire pour les transports de charbon destiné aux besoins du corps expéditionnaire.
Un peu plus tard, aux environs de 1856, la nouvelle compagnie crée, entre Bordeaux, Dieppe, Le Havre, Rouen d'une part, et Grimsby d'autre part, une liaison qui peut être considérée comme l'embryon des futures lignes de cabotage national et international dans lesquelles la maison Worms devait se spécialiser par la suite.
En 1857, le pavillon de la compagnie apparaît pour la première fois à Hambourg et à Copenhague, puis à Cronstadt en 1858. Mais ce sont encore là des services occasionnels, et il faut attendre 1859 pour voir poser les bases de la grande ligne régulière Bordeaux-Hambourg que la maison Worms n'a pas cessé d'assurer jusqu'à la dernière guerre mondiale.
Anvers est ensuite visité en 1869, époque où la compagnie complète son organisation en Méditerranée en joignant à son établissement de Marseille - où elle était installée depuis 1858 - des services à Alger et à Port-Saïd. C'est en partant de ce port qu'on trouve trace de l'exploitation d'une ligne annexe dans la mer Rouge en 1873.
Jusqu'à un passé plus récent, l'histoire de la Compagnie Worms se déroule sans événements notables. Les services assurés s'étendent et s'accélèrent, le matériel se modernise, les constructions neuves remplacent les navires usés ou perdus. La première guerre mondiale impose de lourds sacrifices à la maison, comme à toutes les entreprises d'armement, mais le retour de la paix ramène également ta prospérité à la Compagnie qui reprend bientôt son exploitation normale. En 1930, elle accède à la navigation hauturière en participant au trafic de l'océan Indien, puis sur la ligne de Madagascar en association avec la Nouvelle Compagnie havraise péninsulaire de navigation dont la Compagnie Worms partage les intérêts. Leur flotte comprend en 1939 24 navires au cabotage dans la zone Atlantique-Manche-mer du Nord, ainsi qu'entre les ports du Nord et de la Méditerranée, Le Havre, Marseille et Alger.
Le cabotage international s'étend à la Grande-Bretagne, la Belgique, la Hollande, la Suède, le Danemark et l'Allemagne certains bâtiments remontant même jusqu'à la côte balte et jusqu'à Leningrad, qui constitue le point extrême de la ligne. La Compagnie Worms possède des succursales dans les principaux ports de la métropole, d'Europe et d'Afrique.
En France, à Dunkerque, Boulogne, Dieppe, le Havre, Rouen, Caen, Brest, Rochefort, Bordeaux, Bayonne, Marseille et Toulon.
En Afrique du Nord, à Alger, Oran, Bizerte et Sfax.
En Grande-Bretagne, à Newcastle, Imminghan, Grimsby, London, Swansea, Cardiff et Newport.
En Hollande, à Rotterdam.
En Belgique, à Anvers et Gand.
En Égypte, à Alexandrie, Le Caire, Port-Saïd et Suez.
Pour assurer tous ces service, la Compagnie dispose de modernes cargos jaugeant de 558 tonneaux ("Bidassoa"), à 4.712 tonneaux ("Koufra"), en passant par les 2.047 tonneaux du "Château-Larose" et du "Château-Pavie". Le tonnage total atteint 15.446 tonneaux en propriété et 6.771 en gérance. En outre, 6 cargos sont en cours de construction, parmi lesquels le "Château-Palmer", le "Fronsac", le "Listrac", la "Manche" et le "Médoc". Comme ses concurrentes, la Compagnie Worms songe à l'avenir. Sa devise est la même : « Toujours plus loin, toujours plus vite, toujours mieux ».
Les origines de la Compagnie havraise péninsulaire remontent à 1882. Sa flotte comprenait alors 7 petits navires, dont la portée en lourd variait de 500 à 1.800 tonnes. Dès le début cette flotte assure le service des lignes reliant les ports du nord de la France à l'Espagne et au Portugal, d'où le nom de "péninsulaire", figurant dans la raison sociale de la société. Peu à peu, la ligne s'allonge, et les navires de la CHP vont en Algérie et à Marseille. En 1885 on les voit fréquenter le golfe Persique, les mers de Chine, l'océan Indien et le canal de Mozambique. Les départs du Havre pour Maurice et la Réunion ont lieu tous les quarante-cinq jours. Dans le même temps, le port en lourd est passé de 1.800 à 4.000, puis 5.000 tonnes.
Après la conquête de Madagascar, la CHP prend une position prépondérante dans l'océan Indien, où elle localise et concentre désormais tous ses efforts, augmentent progressivement sa flotte au fur et à mesure que croissent les besoins de la grande île africaine. A la veille de 1914, son tonnage total s'élève à près de 100.000 tonnes et la plupart de ses bâtiments jaugent 6.500 tonneaux.
La première guerre mondiale voit réquisitionner en partie la flotte de la CHP pour les transports de troupes et de matériel, les navires disponibles étant affrétés en time-charter par les différents ministères de la Défense nationale. Quatre vapeurs sont torpillés : la "Ville-du-Havre", la "Ville-de-Bordeaux", la "Ville-de-Djibouti", et la "Ville-de-Verdun".
Dès la signature de la paix, la CHP procède à la réorganisation de ses lignes de l'océan Indien. Elles sont divisées en deux branches, l'une desservant la côte est de Madagascar, l'île de la Réunion et Maurice, l'autre reliant les ports de la côte ouest et faisant le tour complet de l'île.
Depuis, l'exploitation de ces services a été assurée régulièrement par la Compagnie havraise péninsulaire, qui effectuait, en 1939, 17 voyages annuels. Compte tenu des pertes, le tonnage utilisable était alors de 77.950 tonnes, y compris le "Malgache", appartenant à l'État et remis en gérance.
Dès le début de la Seconde Guerre mondiale, toute la flotte de la CHP est affrétée par la direction des Transports maritimes, sous le régime de la charte-partie du 15 septembre 1940. Sévèrement éprouvée, elle est amputée de 4 unités disparues en mer "Ville-de-Tamatave", "Ville-de-Metz", "Ville-du-Havre" et "Ville-de-Rouen", et d'un cinquième navire, le "Condé", gravement endommagé et qui doit être condamné.
La CHP a maintenant normalement repris son service sur l'océan Indien, avec les bâtiments qui lui restent en propriété et ceux que l'État lui a laissés en gérance, notamment le "Colonel-Vieljeux" et le "Malgache". Son propre tonnage s'élève à 20.130 tonneaux : "Bourbonnais", cargo de 4.480 tonneaux, "Madagascar", "Ville-de-Majunga" et "Ville-de-Reims", mixtes de 4.615 à 6.174 tonneaux.
Le programme de construction de la Compagnie porte pour l'instant sur 4 cargos du type "Malgache" amélioré. Lorsqu'il sera entièrement réalisé, la CHP aura retrouvé enfin sa place dans l'activité maritime de l'armement français.
L. F.