1940.11.25.Note (sans émetteur ni destinataire).Charbons belges
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Le PDF est consultable à la fin du texte.25 novembre 1940
Les autorités d'occupation viennent de décider la mise à la disposition de la France de 120.000 tonnes sur le mois de novembre et 150.000 tonnes sur le mois de décembre de charbons belges. Il s'agit principalement de charbons de foyers domestiques mais aussi d'une certaine quantité de charbons industriels. Ces charbons ne seront pas livrés aux acheteurs français par les vendeurs habituels belges, mais assimilés à des charbons allemands, en ce sens qu'ils seront pris en charge par le Rheinisch-Westfälisches Kohlensyndikat et que ce dernier en confie la vente à ses sociétés d'exportation habituelles (Vertriebsfirmen) : Raab Karcher, Haniel, Klöckner, etc. Il est donc normal que ces sociétés, exportant le charbon belge comme s'il s'agissait de charbon allemand, le fassent importer et distribuer en France par leurs intermédiaires habituels. Pour les charbons de foyers domestiques, la position est assez simple : ces intermédiaires sont, soit les agents des firmes allemandes (M. Marckert pour Stinnes), soit leurs filiales (Unico pour Raab Karcher), soit des maisons françaises avec lesquelles elles ont des accords d'exclusivité (Neuerburg pour Eschveiler). Pour les charbons industriels, la situation est un peu plus compliquée. En effet, les Vertriebsfirmen vendaient soit par l'intermédiaire de leurs agents, soit par celui des maisons françaises auxquelles elles-mêmes et le Kohlensyndikat accordaient une protection vis-à-vis de certains clients que ces maisons leur avaient amenés (Kundensehutz). C'était le cas notamment pour certains grands services publics. En voici des exemples :
I°- Les ventes à la Société gazière d'achat en commun des charbons (comptoir d'achat groupant un grand nombre d'usines à gaz françaises) étaient réservées par le Kohlensyndikat à Raab Karcher et Klöckner à qui ces affaires avaient été amenées par Worms ; et par la société Est & Nord (Gamelin). Donc, pour la Société gazière, Raab Karcher et Klöckner étaient seuls exportateurs de la Ruhr ; Worms & Cie pour Klockner, Worms & Cie et Est & Nord pour Raab Karcher étaient seuls importateurs en France. Les filiales françaises des Vertriebsfirmen n'intervenaient en rien dans ces affaires.
2°- Les ventes au Gaz de Bordeaux étaient partagées entre Raab Karcher-Est & Nord, Klöckner-Worms, Haniel-Association commerciale et charbonnière (filiale française de Haniel).
3°- Les ventes à l'Office des charbons des secteurs électriques de Paris étaient partagées entre Stinnes-Marckert et Klöckner-Worms.
Dans le cas de Worms, les achats étaient traités en Allemagne par la filiale Worms de Duisburg et les ventes en France par Worms Paris et ses succursales. C'est Worms qui défendait la position des charbons allemands vis-à-vis de ses clients contre d'autres concurrences et dont l'intervention a permis dans bien des cas - nos fournisseurs peuvent en témoigner - de maintenir un courant d'affaires suivi.
Aujourd'hui, il est possible que ces mêmes services publics se voient attribuer une partie des charbons belges qui sont mis à la disposition du Kohlensyndikat et de ses Vertriebsfirmen, donc assimilés en tous points à des charbons allemands. N'est-il pas absolument normal et juste que la vente en France aux anciens clients soit faite par les anciens intermédiaires, c'est-à-dire soit par les agents ou filiales des Vertriebsfirmen, soit par les maisons françaises indépendantes qui leur avaient apporté cette clientèle, en continuant la formule du Kundenschutz qui avait donné de si bons résultats.
En défendant le point de vue que ces charbons soient vendus exactement dans les mêmes conditions qu'autrefois les charbons de la Ruhr, la Maison Worms croit soutenir les intérêts de ses correspondants allemands en même temps que les siens propres.