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1927.07.28.De l'Association normande.Visite du Trait
[Document disponible sur le site gallica.bnf.fr]
Annuaire des cinq départements de la Normandie publié par l'Association normande
Excursion du 28 juillet 1927
Grâce à l'amabilité de M. le directeur des Constructions navales et sous la conduite d'ingénieurs distingués, les membres de l'Association normande firent une visite très intéressante et très complète.
Les Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime ont été fondés par la maison Worms et Cie au Trait (Seine-Inférieure), à peu près à mi-chemin entre Rouen et Le Havre. Ils ne couvrent pas moins de 25 hectares et leur cité ouvrière s'étend sur 250 hectares. Leur installation est extrêmement complète et les chantiers du Trait sont les seuls établissements en France qui possèdent huit cales de construction sur lesquelles peuvent être construits tous navires jusque 180 mètres
de longueur. De vastes ateliers sont spécialement affectés à la construction des chaudières et des machines marines, et la maison Worms et Cie pourra également entreprendre au moment opportun, la construction des turbines et des moteurs Diesel. En Seine, un vaste appontement, accessible à toutes les marées aux grands navires, permet aux chantiers du Trait l'exécution rapide et économique des plus importants travaux de réparations. Grâce enfin à leurs ateliers de charpente, de menuiserie, de vernissage, les Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime ont les moyens de
terminer entièrement sur cale les navires qu'ils construisent, même les grands paquebots, et lorsqu'une unité est lancée, elle est immédiatement prête à entreprendre ses essais de recette.
De telles facilités de travail, en même temps que la qualité de la main-d'œuvre dont les établissements du Trait disposent dans leur cité ouvrière et dans la région, expliquent la faveur avec laquelle ils ont pu voir affluer les commandes aussi bien de la part des armateurs français que des armateurs étrangers. Il est peu de chantiers en France qui aient reçu autant d'ordres importants pour l'exportation. Citons, en particulier, deux cargos de 1.500 tonnes et un navire mixte à passagers et marchandises pour la Det Bergenske Dampskibsselskab de Bergen, deux cargos de 2.500 tonnes pour la Det Norsk Russiske Dampskibsselskab de Bergen, un paquebot pour la Compagnie commerciale et maritime du Bas Saint-Laurent, un pétrolier de 11.000 tonnes de port en lourd pour MM. Westfal Larsen de Bergen, enfin deux pétroliers de 9.500 tonnes de port en lourd pour l'Anglo-Saxon Petroleum Cy Ltd de Londres.
La Marine militaire française a également passé aux Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime des ordres considérables et trois unités importantes y sont actuellement en construction pour le compte de l'État : le torpilleur "Basque", et deux sous-marins de 635 tonnes ainsi que des chalands séparateurs de mazout ; ils viennent, d'autre part, de livrer après des essais brillants le pétrolier ravitailleur d'escadre à moteurs "Le Loing". Aussi les Chantiers du Trait sont-ils admirablement placés au point de vue de la concurrence européenne pour obtenir des ordres de navires de guerre des gouvernements étrangers.
Signalons enfin que les Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime ont joué un rôle extrêmement important dans la construction de la flotte charbonnière française et qu'ils ont construit tous les nouveaux navires de la propre flotte de MM. Worms et Cie, en particulier le "Château-Lafitte" et le "Château-Yquem" qui ont été maintes fois, et à juste titre, remarqués au cours de leur trafic dans la Baltique.
Les Chantiers du Trait, par leur importance et par leur réputation, ont donc pris place parmi les premiers établissements de construction navale en France.
Si le visiteur est vivement impressionné par la puissance considérable des moyens mis en œuvre dans les ateliers, il est très agréablement surpris lorsqu'il visite les habitations construites pour les besoins du personnel.
Au moment où les Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime se sont installés, Le Trait n'était qu'un petit village de trois cents habitants. Il a donc fallu créer de toute pièce les logements destinés aux ouvriers et une vaste cité-jardin s'étendant sur plus de 150 hectares a été édifiée, qui compte à l'heure actuelle plus de deux mille habitants et comporte, outre une organisation matérielle, toute une organisation sociale.
Chaque locataire a, attenant à sa maison, la jouissance d'un jardin d'une superficie moyenne de 250 mètres carrés. Pour encourager les efforts, des concours annuels de jardins ouvriers sont ouverts entre tous les habitants de la Cité ouvrière.
En outre, des œuvres sociales, particulièrement nombreuses sont en plein épanouissement pour le plus grand bien-être de la population, nous citerons : l'École ménagère créée en vue de l'éducation de la jeune fille, l'Association des anciens combattants du Trait, la Lyre des Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime doublée d'un Cercle symphonique et de la Société de mandolinistes l'Estudiantina, le Bouchon du Trait, le Sou des Écoles, le Club artistique, le Cercle nautique, la Société de secours mutuels "La Fraternelle", l'Union sportive, etc., etc. Enfin, un Centre d'examen médical gratuit, où, avec le concours des services d'Hygiène de la Préfecture, les moyens les plus modernes d'auscultation sont mis à la disposition des médecins de la région, et une bibliothèque publique avec
salle de lecture qui contribue grandement au développement intellectuel et moral des habitants de la Cité ouvrière du Trait.