1927.02.17.De l'Union des chambres de commerce maritime.Paris
NB : La copie image de ce document, de mauvaise qualité, n'a pas été conservée.
Syndicat central des négociants importateurs de charbons en France
Mission d'études - Circulaire n°463 - 17 février 1927
Compte-rendu de la séance du 8 février 1927 de l'Union des chambres de commerce maritimes au sujet des tarifs de transports des charbons et rapport de M. Victor Miral
M. Parent, secrétaire général du Comité central des houillères de France, rappelle que sur les 52,5 millions de tonnes produites en 1926 par les mines françaises (alors qu'il n'en avait été extrait que 48 en 1925), 32,5 sont dues au Nord et au Pas-de-Calais.
Parmi les courants commerciaux, M. Parent établit une distinction ; suivant lui, ceux qui s'effectuent du côté du nord, avec la Belgique, et du côté de l'est, avec l'Allemagne, ne sont que des échanges de qualités. Au contraire, le manque de mines dans l'ouest français donne aux envoie des mines françaises dans cette région le caractère d'envois quantitatifs, correspondants à une augmentation de la production française.
Notamment, pour ces envois vers l'ouest, l'orateur tient à établir une démarcation très nette entre le tarif 29-129 d'une part et le tarif 7-107. Il estime que le 29-129 ne donne pas d'avantages aux mines françaises. Il n'y voit qu'une simple facilité donnée à l'exploitation des chemins de fer. Dans le système en usage jusqu'ici, les expéditions à destination des autres réseaux s'accompagnent à la gare de transit et à la gare de triage de manipulations de wagons s'effectuant souvent dans des conditions difficiles et de fréquents embouteillages auxquels on ne peut obvier que par des mesures de fortune. Il est moyen de tourner ces obstacles ; c'est d'appliquer aux autres réseaux le système depuis longtemps en usage sur le réseau du Nord, et qui consiste à découper le territoire en régions dont chacune est commandée par une gare principale. Les mines possèdent la nomenclature des gares rattachées à la gare principale. Les trains peuvent ainsi améliorer les rotations, en n'effectuant les triages qu'à la gare de dislocation de la rame. Mais pour la réussite de ce système, il y a lieu pour les mines de faire un travail préalable, à savoir un groupement des quantités à diriger sur un même point. Aussi M. Parent voit dans la bonification accordée aux mines pour groupement par rames un paiement qui leur est consenti par les chemins de fer en échange de la facilité qu'elles leur donnent pour l'exploitation ferroviaire.
Aussi bien l'orateur ne reconnaît qu'au seul tarif 7-107 le soin d'avoir accordé des privilèges tarifaires aux mines : ils ne sont destinés qu'à permettre de corriger la situation excentrique de nos bassins houillers et de supprimer le caractère prohibitif des coûts de transport vers l'ouest.
Toutefois, M. Parent établit une distinction à l'intérieur du Chapitre V qui accorde des réductions sur la zone d'importation maritime, entre la bordure littorale proprement dite et l'arrière-pays maritime. Dans la première en effet et là seulement on peut envisager l'expédition de charbons français par cabotage. Encore pour qu'une hypothèse favorable se présente, faut-il la réunion d'au moins deux conditions, notamment un parcours maritime le plus long possible pour que le bénéfice soit important par comparaison avec le prix sur le transport par fer. En outre, il faut un fret de retour. Or Bordeaux éloigné dans l'Atlantique et avec ses retours de bois de mines est particulièrement propre à réaliser ces conditions. Nos houillères du Nord reçoivent des poteaux de la Baltique par Calais et Dunkerque, si donc on peut envisager cette forme de cabotage, c'est l'échange Calais-Bordeaux qui apparaît comme l'espèce la plus favorable. La réussite en exige 4 conditions :
1°/ Le transport des charbons par fer jusqu'à Calais ou Dunkerque est de l'ordre de 25 à 28 F la tonne. La voie d'eau ne peut guère être envisagée que comme un appoint, les péniches étant à la fois trop peu nombreuses et trop lentes.
2°/ Une organisation à Calais ou à Dunkerque en vue de l'aménagement des navires.
3°/ Un taux de fret suffisamment stable pour permettre les contrats d'une certaine durée.
4°/ A l'arrivée à Bordeaux, une entente avec des agents de bois et charbons tant pour l'écoulement des charbons que pour les achats de bois. Il serait nécessaire qu'on pût s'assurer du marché des bois de mines, or ce marché est présentement à Cardiff. D'autres exigences se joindraient à celles-là. Tandis que les mines anglaises reçoivent leurs poteaux non écorcés, les mines françaises tiennent essentiellement à ne faire usage que du bois écorcé. Sans doute, on peut constater encore que les bois de la Baltique sont supérieurs à ceux des Landes. Sans doute encore on avait trouvé jusqu'ici chez les gens des Landes une opposition complète à l'écorçage; toutefois depuis peu, ceux-ci envisageraient peut-être les possibilités d'écorcer.
La négociation est donc susceptible d'être envisagée entre l'agent des mines françaises, un ingénieur des mines de Lens qui concentre cet examen, un ou deux armateurs, et un agent à Bordeaux.
L'examen approfondi de la question montrera seul si l'entreprise ainsi limitée est viable. M. Parent demande à l'assemblée d'émettre un avis favorable à l'examen de la question.
M. Barrès, président de la Chambre de commerce de Bordeaux, estime, d'accord avec M. Parent, que c'est là uniquement une question de transport. Nul doute que le chapitre V ne soit onéreux pour les réseaux. Pour le seul réseau d'Orléans, le déficit annuel s'élève à 3 800.000 F à supposer que le trafic reste le même. En outre, il y a des difficultés techniques pour l'exploitation des chemins de fer au transport de pareilles quantités lors de l'éclatement de la rame dans la gare de transit ou même dans la gare de groupement. On sait par le retour de l'Alsace-Lorraine et l'exploitation de la Sarre les sommes considérables que les compagnies de chemins de fer ont dû dépenser pour sa transformation de gares de triage et de transit. Plus grandes encore sont les difficultés en ce qui concerne les retours des rames ; il ne faudrait pas moins pour cela de 8 ou 10.000 wagons, ce qui serait de réalisation impossible, d'autant que les poteaux étant normalement stockés à Bordeaux dans les docks, leur ramassage en vue du transport par fer devrait s'effectuer au contraire dans les gares de triage. Si donc l'envoi par fer à Bordeaux de charbons en grandes quantités présente de grosses difficultés, le retour en poteaux serait pratiquement impossible.
M. Barrès estime donc que la tentative préconisée par M. Parent doit être tentée. Peut-être pourrait-on se servir du prix ferme sur Rouen et organiser le cabotage en partant de ce port.
M. Bloch, ancien chef d'exploitation du P. O, justifie la résistance du réseau d'Orléans à admettre la réduction de 15 % du fait de la situation de nos mines du centre et du Midi. II estime d'ailleurs que les mines du Nord devraient bien abandonner cette recherche de misérables tonnages susceptibles d'être envoyés par elle dans l'ouest, et les invite à tourner leurs regards vers des profits d'un caractère autrement large. La politique de la Ruhr n'est-elle pas là pour nous donner l'exemple de tout ce que peut donner l'organisation scientifique, la recherche des carburants synthétiques, etc.
M. Parent dit quelques mots sur l'effort accompli par nos houillères en ce sens mais fait valoir que l'effort d'un côté n'exclut pas les tentatives vers ailleurs ; dans l'année 1926, les mines du Nord et du Pas-de-Calais n'ont pas envoyé moins d'1 100.000 tonnes à l'intérieur de la zone du chapitre V.
M. Cangardel, au nom des Armateurs français, pense que la négociation en vue est encore arrêtée à l'heure actuelle sur plusieurs points; il s'agit encore d'obtenir :
1°/ une réduction sur les tarifs de chemins de fer entre les mines et les ports de Dunkerque ou Calais ;
2°/ un aménagement des ports en question par des engins de manutention spéciaux pour que les bateaux n'attendent pas le charbon ;
3°/ la suppression de la taxe de 2 % sur le chiffre d'affaires payable sur le fret, qui ne frappe que les destinations de cabotage ;
4°/ l'extension aux voies d'eau intéressées de la taxe sur les transports du 3 août 1926 qui frappe le cabotage ;
5°/ une réduction des tarifs d'importation pour la pénétration vers les au-delà de Bordeaux, de laquelle seraient exclus les charbons étrangers, difficulté qui peut être supprimée grâce à des tarifs de soudure.
M. Victor Miral, président du Syndicat central des négociants importateurs de charbons en France, déclare tout de suite au nom de son groupement qu'il n'a aucune idée préconçue en ce qui concerne le cabotage. Toutefois, aux difficultés déjà sérieuses qui viennent d'être indiquées au sujet de cette question de cabotage, M. Miral indique qu'il y a lieu d'en ajouter une autre dont on n'a pas parlé, l'insuffisance de la flotte en bateaux français d'un tonnage approprié. Au reste l'importation française ne demandera pas mieux que d'examiner favorablement ce cas d'espèce.
Il tient surtout aujourd'hui à revenir sur la question autrement importante des tarifs de chemins de fer dont d'autres orateurs ont déjà parlé lors de la dernière séance. Pour qu'il reste une trace durable du point de vue du Syndicat qu'il représente, il donne lecture d'une note qui le précise, dont voici le texte : « Réductions accordées aux mines françaises.
a) évolution de cette politique tarifaire.
Lorsqu'il fut question, aux premières années de paix, d'accorder des réductions au transport des charbons des mines françaises, les justifications données à l'époque s'inspiraient surtout de certaines accumulations de stocks, à-coups momentanés, inséparables d'un nouvel équilibre entre une reprise de la production et la recherche de débouchés correspondants. Le gouvernement était certainement tenu d'aider les mines du Nord et du Pas-de-Calais, grandes victimes de la guerre, à retrouver leurs débouchés.
Mais la pléthore de charbons qui résultait du fait que pendant la guerre tous les pays producteurs avaient intensifié leur extraction et que les houillères françaises étaient dotées de moyens puissants à l'occasion de leur reconstitution, ont déterminé le gouvernement à modifier sa politique et à faciliter davantage l'écoulement français dans les ports d'importation. A telle enseigne que certaines réductions tarifaires furent accordées à leur profit pour toutes directions, mais particulièrement importantes à destination d'une zone côtière délimitée par les tarifs de la manière la plus précise. Ainsi pour les avantages accordés aux charbons à gaz de la Loire, puis du Nord et de la Sarre à destination des usines à gaz de la Méditerranée. Mais la mesure de beaucoup la plus importante à cet égard est la création du chapitre V du tarif 7-107, en 1922, qui accorde d'importantes réductions à toutes mines françaises (la Sarre y a été jointe) pour leurs expéditions à l'ouest de la ligne Honfleur-Rouen (gare d'Orléans)-Dreux-Vendôme-Angoulême-Bagnères-de-Bigorre. Par décision du 18 décembre dernier, le ministre des Travaux publics a accentué encore cette faveur en majorant la réduction déjà accordée de 15 % supplémentaires sur les prix de base. De ce fait, actuellement, des inégalités considérables entre les expéditions des mines et des ports à destination d'un même point de la zone littorale.
b) exemples de prix actuels comparés
- pour les destinations à l'intérieur de la France
En premier lieu, en ce qui concerne les réductions accordées aux mines du Nord pour toutes destinations françaises (c'est le chapitre IV) du tarif 7-107) les mines s'en servent toujours pour leurs expéditions en dehors de celles faites vers la zone d'importation. Ainsi, si nous comparons le prix payé d'une part en provenance d'une mine du Nord, d'autre part au départ d'un port, par exemple Douai-Vierzon, et Le Tréport-Vierzon, ces deux cas étant choisis comme comportant une distance sensiblement identique, respectivement 427 et 425 Km, on obtient les prix suivants : pour le parcours Douai-Vierzon, le prix à la tonne ressort à 58 F 05, et pour Le Tréport-Vierzon à 62 F 20, soit 4 F 15 de différence, (pour une distance rigoureusement égale, soit 4 km de plus, on aurait une différence de 4 F 35.)
- pour destinations de la France littorale
Venons-en maintenant à une comparaison du même ordre, au cas de deux expéditions à destination de la zone d'importation (chapitre V) assurées l'une par une mine et l'autre par un port choisis comme nécessitant tous deux une distance sensiblement égale. Pour la distance Boulogne-Le Mans, le prix d'une tonne de charbon est et reste de 65 F 50. Pour le parcours Béthune-Le Mans, soit 456 Km, ce prix était déjà sensiblement moins élevé : 57 F 55. (Pour une distance rigoureusement égale à celle de Béthune au Mans, la tonne au départ d'un port paierait 64 F 85, soit 7 F 30 de plus.)
Avec la récente réduction de 15 % supplémentaires, le prix Béthune Le Mans s'abaisse à 49 F 55. De ce fait, l'écart entre le prix payé au départ de la mine ou au départ du port, qui était déjà, jusqu'ici de 7 F 95 s'élève à 15 F 95. (Pour une distance rigoureusement égale, cet écart de 7 F 30 passerait à 14 F 90.) Critiques de cette politique gouvernementale.
Une semblable inégalité de traitement est-elle justifiée au point de vue de l'intérêt général de la nation ?
- au point de vue des mines
Si nous considérons d'abord les mines françaises, une première constatation s'impose : comme elles ne produisent actuellement que 65 % de la consommation du pays, on ne voit point qu'il soit de l'intérêt général de grever des charges issues de la concurrence les charbons d'importation alimentant la population et les industries côtières.
II est en outre impossible de soutenir que nos mines ont besoin de ces réductions tarifaires pour acquérir un développement que tout français est d'ailleurs heureux de leur voir prendre ; n'ont-elles pas une protection appréciable du fait du change ?
- au point de vue des réseaux
Quant aux réseaux, il est difficile d'admettre que l'avantage pour eux d'effectuer des transports des charbons des mines à des distances plus grandes que celles auxquelles s'effectuent normalement les expéditions en provenance des ports, soit susceptible de compenser l'énorme manque à gagner provenant d'une réduction tarifaire aussi considérable. Nous n'acceptons que sous bénéfice d'inventaire les déclarations de l'honorable représentant des chemins de fer du nord. Certes, pour le réseau du Nord qui assure les expéditions massives au départ du grand bassin minier et que sa situation géographique place avant les lieux d'où s'effectuent les divergences des voies ferrées sur l'ensemble de notre territoire, sans aucun doute, il n'y a pas de déficit ; mais pour les autres réseaux ? Quoi qu'il en soit d'ailleurs, ce sont, de toutes manières, sinon les contribuables, puisque les réseaux viennent d'acquérir leur autonomie financière, mais tous les autres usagers de la voie ferrée qui supportent cette charge dans la mesure où ces réductions ont contribué à accroître la majoration générale.
D'ailleurs l'inégalité actuelle de traitement est inadmissible entre les lieux de destination des régions côtières suivant qu'ils sont situés sur le réseau de l'État qui a accepté la réduction supplémentaire de 15 % sur les tarifs de faveur précédemment accordés, et le réseau de l'Orléans qui n'y a pas consenti.
- au point de vue des ports
Les faveurs accordées aux mines et consenties par les réseaux, dirigées contre l'importation charbonnière, visent directement les ports : la vie même des ports maritimes est liée aux réceptions de combustibles qui représentent plus de 55 % du tonnage total des marchandises manutentionnées et sur lesquelles sont basées les recettes nécessaires pour assurer l'entretien de ces ports : que l'importation charbonnière vienne à baisser sensiblement, on ne voit aucun moyen d'assurer les recettes indispensables. Aux inquiétudes justifiées qui naissent pour les ports de cet état de choses, il importe d'ajouter les répercussions que celui-ci entraîne sur l'intérêt national et de les signaler aux pouvoirs publics ; en admettant même que l'État fasse bon marché des taxes qu'il prélève sur la marchandise importée, et qui vont diminuer, comment pourrait-il accepter que l'entretien de l'outillage public et privé fût négligé faute d'argent, que les engins qui le constituent n'en soient pas renouvelés au fur et à mesure des progrès de la technicité, et qu'ainsi nos ports ne puissent demeurer dans l'état de modernisme où les nécessités de la récente guerre les avaient portés ? Au moment où l'État est dans l'impossibilité de participer aux travaux des ports, les établissements maritimes ont besoin de toutes les recettes sur lesquelles ils sont en droit de compter. Parmi celles-ci figurent au premier plan les péages sur les navires et sur les marchandises débarquées ? N'a-t-il pas été justement observé que si les ports avaient été outillés au début de la guerre comme ils le furent à la fin, le ravitaillement de la nation aurait été assuré dès le début avec une ampleur qui aurait peut-être abrégé la durée de la guerre ? Veut-on fermer les yeux, de toutes manières, au retour d'une pareille éventualité et risquer de se laisser à nouveau prendre au dépourvu ? Ainsi les ports restent un des principaux facteurs d'une politique de circulation nationale. En outre, commercialement, ce sont les importations de charbons qui, seules, procurent le fret lourd nécessaire pour donner l'avantage d'un fret de sortie à l'exportation - tant réclamée par notre Trésorerie -de produits français tels que minerais de fer, poteaux de mines, etc.
Socialement, enfin, le charbon fait vivre une des plus importantes catégories de la main-d'oeuvre dans les ports. Il y a tout d'abord les dockers charbonniers. En outre, l'attention doit être appelée sur ce fait que la plus grande partie des charbons, les anthracites concassés et tous les charbons classés, est l'objet d'une véritable transformation usinière. Plus spécialisés sont les ouvriers des usines à briquettes et à boulets du littoral. Dans toutes ces catégories il s'agit d'une population de travailleurs presque exclusivement française, ce qui est loin d'être le cas pour les mines françaises et il n'apparaît pas qu'une politique nationale de la main-d'oeuvre soit moins importante à considérer qu'une politique nationale de la production. Les houillères ne posent-elles pas devant le gouvernement qui les sollicite d'accroître encore leur production la question de la main-d'oeuvre ? Le Nord occupe 500.000 ouvriers polonais. Les houillères du Centre réclament des ouvriers marocains. Cette abondance de main-d'oeuvre étrangère ne constitue-t-elle pas un véritable danger ? Qu'y a-t-il lieu de faire pour remédier à cette situation ? Remèdes possibles
1° Voeu en faveur d'une égalisation de régime avec les mines
Disons tout de suite qu'en ce qui concerne l'abrogation de toutes les réductions tarifaires accordées aux mines françaises, autrement dit l'égalité entre les mines et les ports, demandée par notre Syndicat central à la date du 19 janvier, ce voeu de principe devait être formulé, mais il ne semble pas qu'il y ait grande illusion à se faire sur sa réalisation. Nous ne perdons pas de vue que ce sont des mesures déjà en exécution que nous sommes à cette heure en train d'étudier. Or les "précédents" des dernières années nous laissent quelque peu sceptiques sur les résultats de protestations d'un ordre aussi général.
J'ai hâte d'en venir à des voeux de réalisation pratique : j'en discerne deux.
Ce qui, tout d'abord, continue à nous apparaître, tranchons le mot, comme inadmissible, c'est qu'on cherche à créer, au point de vue des points de destination, une différence entre telle partie de la France consommatrice et telle autre.
a) Suppression de l'inégalité de traitement entre la France littorale et le reste de la France.
On ne voit aucune raison pour les charbons français de jouir d'une réduction plus grande pour leurs transports dans la zone littorale que dans le reste de la France. Que veut le gouvernement ? Empêcher l'importation du charbon ? Dans ce cas, la mesure est incomplète. Pourquoi en effet s'opposer à la venue par mer des charbons anglais quand par ailleurs va être favorisée l'importation par terre des charbons allemands ? S'est-on occupé des répercussions des tarifs très réduits qui vont être accordés par les chemins de fer allemands aux charbons de la Ruhr ? Fait qui jouera sur des quantités considérables, puisque ces réductions ne seront consenties aux mines expéditrices que si celles-ci s'engagent à transporter 1 250.000 tonnes du 1er janvier au 1er juillet 1927. Par surcroît, qui nous garantit contre le danger d'une soudure, à la frontière, de la réduction allemande et du tarif sur les réseaux français ? Puisque les houillères françaises veulent mettre obstacle à l'importation, pourquoi deux poids et deux mesures ? Au charbon de nos alliés anglais estime-t-on convénient de préférer le charbon allemand, alors qu'ils viennent les uns et les autres au titre de charbons libres ?
b) A l'intérieur de la zone littorale entre régions au nord ou au sud de Honfleur
Ce n'est pas tout. Non seulement on crée une zone d'importation qui défavorise les ports, mais à l'intérieur de cette zone, on établit une dualité suivant que les ports sont d'un côté ou de l'autre de la fameuse ligne Honfleur-Rouen (gare d'Orléans)-Dreux etc. Ce n'est pas tout encore : à l'ouest de cette ligne, c'est-à-dire du Calvados aux Pyrénées, on établit encore une nouvelle distinction suivant que les gares destinataires sont sur l'État ou les autres réseaux. Au total, réduction tarifaire la plus faible pour les arrivages au nord de Honfleur (Chap. IV), plus forte au sud de là pour les destinations de l'Orléans et du Midi (le chap. V en vigueur jusqu'au 18 décembre continue à jouer) et atteignant son maximum, quand, au sud de Honfleur, les gares réceptionnaires sont celles de l'État ! Admettrez-vous, Union des chambres de commerce maritime et des ports français, de laisser s'établir un régime aussi profondément inégalitaire entre les régions directement commandées par vos ports ? Et de laisser s'implanter, disons-le nettement, un état de choses qui ne peut engendrer que la rivalité et la désunion entre vous ?
2° Demande de réduction aux petites distances
Mais ce problème nécessite un examen attentif. Il est une seconde question sur laquelle nous pouvons cependant attirer dès à présent votre attention, un fait que l'on pourrait immédiatement retenir : l'amélioration des parcours aux petites distances. Il est de constatation évidente que si les longs parcours au départ des ports sont devenus très onéreux, puisqu'ils ne jouissent d'aucune réduction, les petits sont pratiquement impossibles. Autour d'une vingtaine de kilomètres d'un port, le camion automobile a complètement détrôné le chemin de fer, défonçant ainsi les routes aux frais des Ponts et Chaussées qui a charge de les entretenir et aux dépens des réseaux qui se voient ainsi privés d'une partie fort importante de leurs recettes, notamment dans les banlieues industrielles de nos grands ports. D'où vient ce fait ? De ce que dans le prix du transport, l'un des éléments a été abusivement augmenté, à savoir les frais de gare, lesquels, pour n'être pas évidemment des frais complètement fixes dès le début, pèsent néanmoins dès le départ d'une manière déjà trop lourde sur le prix et n'ont besoin que de s'élever en pente douce pour atteindre 100 km, distance à partir de laquelle ils sont en palier. Nous demandons que l'échelle soit plus inclinée, et que pour rejoindre 100 km, son même palier actuel, elle soit fixée à un prix moins élevé au départ, ce qui diminuerait le prix des 30 ou 50 Km. A notre critique, on peut bien prévoir l'objection des compagnies : la réalité du service qu'elles rendent a lieu uniquement au départ et à l'arrivée sans qu'une longueur plus ou moins grande du parcours augmente en quoi que ce soit le service rendu par l'employé de la compagnie. Cette objection théorique est d'ailleurs exacte, mais il faut savoir si les compagnies sont indéfiniment disposées à en subir les conséquences et à se priver ainsi du trafic fort important qui s'effectue de plus en plus par camions pour les petites distances.
C'est dans le sens de ces deux précisions que notre Syndicat central des négociants importateurs de charbons en France vous invite à protester contre cette série de faveurs, chapitres successifs d'un plan homogène qui se réalise d'étapes en étapes et qui, croyons-nous savoir, continuera à se dérouler si une action concertée et vigoureuse auprès des pouvoirs publics n'y met fin. C'est pourquoi notre Syndicat a désiré se joindre à vous pour s'élever d'une part contre le régime inégalitaire consenti au profit d'une des branches de la richesse nationale et dirigée sans équité contre un autre facteur de la prospérité nationale, celui des ports que vous représentez parmi lesquels on crée des inégalités de régime ; en second lieu pour demander une réduction sur les parcours aux petites distances.
M. Rastoin, président de la Chambre de commerce de Marseille, rappelle la situation spéciale de son port, entouré de bassins miniers, et se ralliera à toutes solutions de conciliation entre le point de vue des mines et celui des ports.
M. Morch, président de la Chambre de commerce de La Rochelle, estime qu'il y a lieu de supprimer l'inégalité choquante qui vient d'être instituée entre les réseaux. Actuellement en effet, les ports situés sur le réseau de l'État sont les seuls à supporter les inconvénients de ces réductions supplémentaires. Il demande en conséquence à l'Association de formuler un voeu aux termes duquel l'autorisation provisoire serait retirée aussi longtemps que le réseau d'Orléans n'aurait pas accédé à la réduction qu'elle stipule.
Avant qu'on ne passe au vote, certains membres soulèvent la question de savoir si un vote de ce genre ne devrait pas intervenir postérieurement-à l'essai d'organisation du cabotage en question et subordonné à son échec possible.
Dans le sens d'un vote immédiat, M. Quoniam, président de la Chambre de commerce de Cherbourg, fait valoir que les charbons français envoyés sur nos côtes ne sont guère que des charbons domestiques, il rappelle que ces charbons classés supportent mal le transport par bateaux.
Dans le même sens, M. Pelletier, secrétaire général administratif du Syndicat central des négociants importateurs de charbons, dit que cette proposition concernant le cabotage n'est pas nouvelle et qu'on a conservé le souvenir notamment des fines d'Ostricourt qui sont arrivées en fort mauvais état, que des essais de ce genre ont déjà été tentés et qu'on n'a jamais pu y persévérer.
A l'inverse, M. Lévy, chef des services commerciaux du réseau du Nord, défend les réseaux d'avoir par les récents tarifs fait une opération déficitaire. Par voie d'analogie, il parle des minerais qui sont transportés à des tarifs plus réduits que les charbons, il demande à l'assemblée de se prononcer en faveur du maintien du tarif.
Après que l'assemblée eut donné son adhésion à l'examen du projet concernant le cabotage, M. le président met aux voix un voeu tendant à obtenir l'ajournement du récent tarif accordant la réduction supplémentaire de 15 %. Ce voeu est voté par 14 voix, soit à l'unanimité des votants moins 1 voix. (Dieppe).