1921.12.08.Du Journal de la Marine marchande.Article
Coupure de presse
Les nouveaux chantiers Worms, au Trait
Nous avons brièvement rendu compte dans notre dernier numéro du lancement du "Capitaine-Bonelli", auquel assistait notre rédacteur en chef, le 29 novembre dernier.
On se rappelle que ce magnifique charbonnier fait partie d'une commande de huit vapeurs à exécuter pour le compte de la Marine marchande et dont les caractéristiques sont les suivantes : longueur, 95 mètres ; largeur, 14 mètres ; creux, 7 mètres ; port en lourd, 4.700 tonnes ; vitesse, 10 nuds, la machine et la chaudière occupant la partie centrale du bâtiment.
La cérémonie prenait un attrait tout particulier du fait qu'il s'agissait, non plus d'une simple coque, mais d'un bâtiment complètement gréé et équipé, possédant son équipage à bord et qui put, sitôt mis à flot, rallier Le Havre, son port d'attache, en vue d'y procéder immédiatement à ses essais.
C'est en 1916 que la Maison Worms et Cie, fortement éprouvée par les pertes que la guerre sous-marine a infligées à sa flotte, songea, en vue de la reconstitution de celle-ci et devant l'encombrement des chantiers de construction, à se créer une nouvelle branche d'activité.
Les Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime virent grand. Outre les huit cales de lancement dont deux atteignent 1,70 m de longueur et un atelier des coques de 8.000 m2 de superficie, les Chantiers comprendront des ateliers complets pour la construction des chaudières et des machines, mesurant chacun 100 mètres de longueur et 35 mètres de largeur, une grosse forge pour la confection de l'outillage, une scierie, ainsi qu'une menuiserie dotée des procédés de fabrication les plus modernes, afin qu'il puisse être pourvu, sans aucune difficulté, à tous les travaux d'emménagement des navires.
Ce programme fut réalisé en utilisant tous les procédés de la technique moderne et il se poursuit sans relâche, malgré toutes les difficultés de main-d'uvre et d'approvisionnement des matériaux, englobant au surplus l'édification d'une cité ouvrière pour plus de 400 ménages.
Au fur et à mesure que les ateliers sont achevés, l'outillage le plus perfectionné y est mis en place. Cet outillage est capable de répondre à toutes les exigences de la fabrication : poinçonneuses, cisailles, fraiseuses, four à membrures de l'atelier des coques, tours et raboteuses de toutes dimensions dans l'atelier de grand ajustage, machines à cintrer et à former dans celui de chaudronnerie ; groupes électriques de 1.500 kwt, pompes hydrauliques refoulant dans des accumulateurs capables de donner une pression de 110 kilos par cm2, compresseurs d'air, tout cela en vue de fournir dans tous les endroits du chantier l'énergie nécessaire ; grues Titan auprès des cales, de 35 mètres d'altitude, pouvant soulever 4 tonnes à 24 mètres de flèche ; portique roulant à triple mouvement pour le classement des matériaux sur un parc à tôles de 360 mètres de longueur.
Les grands ateliers sont d'ailleurs desservis par 4 ponts-roulants, deux de 50 tonnes, deux de 30 tonnes, tandis que 4 autres de 5 tonnes assurent les transports de matériaux dans les nefs latérales.
Les différents ateliers qui s'étendent, au bord de la Seine, sur plus de 25 hectares, donnent l'impression qu'ils représentent une productivité de plus de 50.000 tonnes de navires par an.
Au moment de la visite ministérielle, quatre machines étaient déjà en cours de montage dans l'atelier d'ajustage, deux autres en pleine fabrication ; dans l'atelier suivant, dix chaudières apparaissaient en bonne voie d'achèvement. Sur cale, outre le "Capitaine-Bonelli" qui vient d'être lancé, cinq autres navires sont en cours de construction, parmi lesquels deux sont destinés à la Maison Worms et Cie, les trois autres faisant partie du programme de 8 cargos charbonniers à effectuer pour la Marine marchande, dont nous parlions plus haut.
Il serait du reste possible de mettre en chantier des unités bien plus considérables, atteignant jusqu'à 16.000 tonnes de déplacement. On pourrait donc construire au Trait des paquebots et des cargos mixtes.
Souhaitons que nous fêtions prochainement la mise sur cale d'une de ces unités.