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Worms & Cie
28, rue Grignan

Marseille, 30 novembre 1918
MM. Worms & Cie à Paris

Messieurs,
Nous avons le regret de vous informer que notre caissier a été victime d'un vol de 12.000 francs, alors qu'il se rendait au Comptoir d'escompte (place Saint-Ferréol) hier soir à 5 h 1/2 pour déposer dans notre coffre les fonds restant de la journée.
Cette somme - exceptionnellement importante hier - provenait de ce que des fonds destinés au paiement de salaires d'équipages n'avaient pas été retirés par les bords. D'ordinaire, nous n'avons jamais plus de 2/3.000 francs en fin de journée.
Notre caissier, M. Frézard - dont l'honorabilité est au-dessus de tout soupçon - est le père de M. Henri Frézard, notre caissier titulaire, mobilisé, et qui depuis les débuts de la guerre remplace son fils.
Il avait pour instructions de toujours se faire accompagner, soit par un garçon de recettes, soit par un employé, pour franchir les 150 mètres environ qui séparent nos bureaux du Comptoir d'escompte.
Hier soir, la fatalité a voulu qu'il ne prenne pas cette précaution, et le garçon de recettes étant malade, il s'y est rendu seul.
Au moment où il posait le pied sur la marche d'entrée du Comptoir d'escompte, il a été bousculé et son portefeuille lui a été arraché. Il a immédiatement crié au voleur, a essayé de le poursuivre, de même que plusieurs personnes qui se trouvaient là ; mais le voleur profitant de l'obscurité des rues, a réussi à disparaître.
Plainte a été déposée à la police, mais nous ne conservons pas l'espoir de retrouver nos fonds, les vols étant en ce moment-ci d'une fréquence et d'une audace exceptionnelles.
Nous sommes excessivement peinés de ce qui vient d'arriver, et nous allons redoubler encore de précautions ne laissant plus faire aucun mouvement de fonds, quel qu'il soit, par moins de 2 employés.

Veuillez agréer, Messieurs, l'assurance de notre considération la plus distinguée.

[Signature illisible]