1917.07.27.De Worms et Cie Port-Saïd
Worms & Cie
Port-Saïd (Égypte)
Le 27 juillet 1917
Messieurs Worms & Cie - Paris
Messieurs,
Renchérissement de la vie en Égypte Les conséquences économiques de la guerre se font de plus en plus sentir dans ce pays, et au Caire comme à Alexandrie les employés de maisons de commerce et de banque aussi bien que les fonctionnaires du gouvernement s'agitent pour obtenir, les uns par des démarches collectives auprès de leurs directions, d'autres par l'entremise des groupements, associations et syndicats auxquels ils peuvent appartenir, soit des augmentations de traitement, soit des allocations spéciales, leur permettant de faire face au renchérissement très prononcé de tous les articles d'alimentation et d'habillement, la plupart des grosses maisons du Caire ont déjà accordé à leur personnel soit des augmentations de traitement, soit des allocations de vie chère, soit des gratifications intérimaires, et d'après la presse qui s'est fait l'écho des doléances des fonctionnaires, le gouvernement étudie sérieusement la question d'améliorer la situation de tous ses serviteurs.
Par notre lettre du 5 janvier de cette année, nous vous avions demandé d'accorder à notre petit personnel (gagnant moins de 150 francs par mois) une allocation de vie chère de 10 francs par mois, ce que vous nous avez autorisé de faire par votre dépêche du 18 du même mois, et bien que nous n'ayons pas encore été sollicités par le reste du personnel, nous nous rendons parfaitement compte que nombre de nos employés, tout en s'imposant des privations, ont du mal à boucler leur modeste budget. Aussi croyons-nous que le moment est venu d'étendre au personnel européen, c'est-à-dire à tous ceux de nos employés, ouvriers, matelots et électriciens gagnant plus de 150 francs par mois, la même mesure de bienveillante sollicitude, mais sur une base un peu plus élevée que l'allocation mensuelle de 10 francs dont bénéficient déjà nos serviteurs indigènes depuis janvier de cette année. Il est évident qu'il nous faut établir une distinction entre l'Européen et l'Indigène ; de même il nous paraît que l'employé de bureau, dont les frais d'habillement et de blanchissage, tout à fait onéreux en ce moment, sont plus importants que ceux d'un salarié exerçant une profession manuelle, doit être un peu mieux favorisé que l'ouvrier électricien, mécanicien ou patron de remorqueur, et toujours dans le même esprit d'équité nous sommes d'avis qu'il convient de donner à l'employé marié un peu plus qu'un célibataire, sauf dans le cas où ce dernier aurait des charges de famille justifiées.
Après un examen approfondi de la question, nous venons vous soumettre le projet suivant d'allocations de renchérissement de vie à accorder à compter du 1er ct :
Aux employés de bureau européens gagnant de 200 à 650 francs par mois :
- mariés 35 francs par mois - célibataires 20 francs par mois Aux européens employés comme patrons, mécaniciens, électriciens, etc.,
- mariés 25 francs par mois - célibataires 15 francs par mois
Ce projet, qui englobe tout le personnel européen de vos maisons d'Égypte, grèvera notre budget de 1.650 à 1.750 francs par mois, et nous vous serons reconnaissants de vouloir bien nous câbler votre approbation, ou les modifications que vous croiriez devoir y apporter.
Dans notre esprit ces allocations représentent un strict minimum, mais nous sommes convaincus qu'elles donneront satisfaction à tous les intéressés.
Veuillez agréer, Messieurs, nos bien sincères salutations.
Worms & Cie