1914.01.16.De Worms et Cie Paris.Historique
Copie de note
Le PDF est consultable à la fin du texte.La Maison Worms a été fondée en 1848 par M. Hypolite Worms, qui était jusqu'à ce moment-là dans la maison de banque des Messieurs Goudchaux Frères ; cette Maison a cessé ses opérations lorsque M. Michel Goudchaux est devenu ministre des Finances le 24 février 1848. M. Worms avait épousé la fille d'un des frères Goudchaux, et ce nom a reparu plus tard dans la Maison Worms quand M. Henri Goudchaux, fils d'un autre frère Goudchaux, mais celui-là notaire à Paris, est entré en 1863 dans la Maison Worms dont il est aujourd'hui un des chefs. M. Worms, voulant employer son activité et son intelligence laissées inutilisées à la clôture des opérations de la maison de banque Goudchaux, a vu à ce moment-là le grand avenir qui était réservé au commerce d'exportation des charbons anglais, et, en fait, il a été un des initiateurs, peut-être même le premier, du commerce d'importation des charbons anglais en France et dans un grand nombre des ports du monde entier. La Maison est restée Hypolite Worms jusqu'en 1874, et est alors devenue Hypolite Worms & Cie. M. Hypolite Worms est mort le 8 juillet 1877. La Maison est devenue Worms Josse & Cie, en 1881, M. Henri Josse étant un français exilé en 1851 qui avait été recommandé à M. Worms par le Comité de secours aux déportés du Coup d'État dirigé par M. Michel Goudchaux, il avait ainsi obtenu une agence de la Maison en Angleterre et ne prévoyant pas alors la possibilité d'un retour en France, il s'était fait naturaliser, et était même devenu vers la fin de sa vie membre du Parlement anglais pour du reste donner sa démission très peu de temps après, le jour où ses associés lui ont fait comprendre que les relations de la Maison avec les administrations publiques et surtout avec le ministère de la Marine en France risquaient d'être défavorablement affectées par la présence au milieu d'eux d'un membre du Parlement anglais ; M. Josse est décédé le 23 juillet 1893. La société est devenue Worms & Cie, le 1er janvier 1896 et a continué ainsi depuis.
Les opérations de la Maison Worms & Cie embrassent le commerce des charbons, et, ensuite les opérations d'armement.
Elle est dans le commerce des charbons considérée dans le monde entier comme peut-être la première, en tout cas une des premières, et elle jouit de toute façon d'une situation et d'une autorité qui ne sont sans doute égalées par celles d'aucune autre.
Elle a en Angleterre des maisons et des agences dans tous les ports charbonniers, ses propres maisons à Cardiff, Newcastle-on-Tyne, Grimsby, Goole et Hull, des agences à Swansea, Sunderland, Liverpool, Londres et Glasgow.
Son mouvement d'exportation de charbon est représenté par le relevé annexé à la présente note et qui est donné pour l'année 1912, les chiffres de 1913 n'étant pas encore parvenus.
La Maison Worms & Cie a ses maisons pour le commerce des charbons au Havre, à Dieppe, à Rochefort, Tonnay-Charente, Angoulême, Bordeaux, Bayonne, Marseille et Alger et à l'étranger, à Port-Saïd et Suez (Égypte). Elle a pour clients soit pour les exportations de charbon d'Angleterre, soit pour des fournitures à faire dans des dépôts à l'Étranger avec lesquels elle est reliée sur toute une partie du globe, la marine de l'État, plusieurs marines étrangères, la Compagnie du canal de Suez, la compagnie des Messageries maritimes, la Compagnie générale transatlantique, la compagnie des Chargeurs réunis, les principaux armements des ports français, la compagnie anglaise Péninsulaire et Orientale, et un nombre considérable des compagnies ou maisons les plus importantes d'armement en Angleterre, en Belgique, en Hollande et occasionnellement en Allemagne. Elle s'est établie dans le canal de Suez dès son ouverture en 1869, c'était elle d'ailleurs qui avait expédié tous les charbons anglais nécessaires aux travaux des entrepreneurs, Borel Lavalley & Cie, qui avaient achevé l'exécution de ce canal lorsque la main-d'uvre fellah avait été supprimée ; depuis 1869 la Maison Worms & Cie a maintenu sa position prédominante comme consignataire de navires à Port-Saïd et à Suez et comme fournisseur de charbon, malgré le nombre considérable de dépôts qui s'y sont créés, elle détient encore à l'heure qu'il est environ 32% sur un total de 1.555.000 tonnes du mouvement des charbons à Port-Saïd. Les contrats qu'elle a régulièrement et presque sans aucune exception avec la marine de l'État sont à Alger et à Port-Saïd ; elle est du reste bien connue du ministère de la Marine dont elle a été le fournisseur depuis la guerre de Crimée, et qui aujourd'hui a souvent recours à ses avis pour ses opérations d'achat de charbon et d'affrètement quoique ces opérations-là ne soient plus aujourd'hui traitées avec elle par suite de modifications dans les conditions même de ces achats. II est annexé à cette note, à titre de simple exemple, la copie d'une lettre qui a été adressée au directeur de la Maison Worms & Cie, à Alger, par le commissaire principal de la Marine dans ce port le 26 juillet 1912. La Maison Worms est également fournisseur de compagnies de chemins de fer et d'usines à gaz en France et à l'étranger, et ses diverses succursales et agences exercent également leurs opérations pour les besoins industriels des régions qu'elles desservent.
Ce n'est qu'après le commerce des charbons que la Maison Worms est entrée dans les opérations d'armement et elle ne l'avait fait alors qu'à titre de commanditaire, d'abord avec la Maison Hantier Mallet & Cie, du Havre, devenue ensuite F. Mallet & Cie, dont le chef, F. Mallet, a été pendant de nombreuses années président de la chambre de commerce dans ce port ; toutes les lignes de cet armement ont ensuite passé entre les mains de la Maison Worms et de même la ligne de Dieppe à Grimsby qui avait été dans le passé entre les mains de la Maison Grandchamp de Rouen. Les lignes de la Maison Worms ne font que le cabotage réservé et le cabotage international ; elles embrassent la plus grande partie des ports de France entre Bayonne et Dunkerque et leurs opérations s'étendent depuis Pasages (Espagne) jusqu'à Anvers, Grimsby, Brême et Hambourg ; en outre des succursales ou agences déjà indiquées dans la partie charbon de cette note la Maison Worms a pour les besoins de ses armements des succursales à Dunkerque, Boulogne, Brest et Nantes, et des agences dans les divers ports de la Belgique, de la Hollande et de l'Allemagne ; elle a une flotte de 18 vapeurs et en a actuellement 4 autres en construction aux Ateliers et Chantiers de la Loire, à Nantes. Elle a, malgré sa situation de simple armateur au cabotage, une autorité incontestée dans le monde de la marine marchande et son chef, M. Henri Goudchaux, qui est un des fondateurs du Comité central des armateurs de France, est le trésorier de ce comité depuis sa fondation ; le Comité central des armateurs de France a, à son origine, été présidé par M. André Lebon, ancien ministre, président de la compagnie des Messageries maritimes, et est actuellement présidé par M. Jules Charles Roux, ancien député, président de la Compagnie générale transatlantique.
Les marchandises transportées par les lignes de la Maison Worms & Cie, entre tous les ports desservis par ses lignes, ont atteint un total de 534.602 tonnes en 1912 et de 578.151 tonnes en 1913. Il peut être intéressant de signaler que la Maison Worms & Cie assure par ses seuls services sur Brême et Hambourg la totalité des transports par voie maritime entre les ports de France et l'Allemagne du Nord ; à plusieurs reprises des tentatives ont été faites pour lui disputer ces transports, mais sans résultat, ces tentatives ont été principalement faites par des entreprises allemandes et une légende a cours qui dit que l'empereur actuel d'Allemagne se trouvant un jour à Hambourg et voyant le pavillon français qui flottait au haut du mat d'un navire demanda quel était ce navire, on lui répondit qu'il appartenait à la Maison qui assurait les transports maritimes entre la France et l'Allemagne et immédiatement il voulut savoir pourquoi ces transports n'étaient pas effectués sous pavillon allemand, à quoi il lui fut répondu qu'on avait essayé, mais que les tentatives avaient toujours échoué et qu'il serait inutile de recommencer. Pendant la guerre de 1870/1871 Ies navires des lignes de la Maison Worms & Cie furent tous utilisés par le département de la Guerre pour des transports entre les divers ports français depuis Dunkerque jusqu'à Bordeaux et même jusqu'à Marseille et Toulon.
La Maison Worms & Cie représente la compagnie des Messageries maritimes dans les ports charbonniers anglais et à Bordeaux, elle représente la compagnie des Chargeurs réunis à Cardiff, dans les ports de l'Humber, à Boulogne et à Marseille ; elle représente la compagnie anglaise l'Orient qui fait la navigation sur l'Australie dans le port de Toulon que cette compagnie a adopté depuis quelques années au détriment de Marseille et où la Maison Worms & Cie a à ce moment-là établi une succursale.