1853.06.22.A Jean Vincent.Marseille
Origine : Copie de lettres à la presse n°45 - du 19 juin 1853 au 20 juillet 1853 - page 42
Paris, le 22 juin 1853
Monsieur Jean Vincent
Négociant à Marseille
Ainsi que nous en étions convenus, j'ai laissé quelques jours s'écouler depuis notre dernière entrevue à Lyon, voulant attendre l'époque de votre rentrée à Marseille pour relater, par lettre, les conventions arrêtées entre nous.
Nous sommes tombés d'accord que les affaires charbons étaient appelées, dans un avenir prochain, à prendre un développement considérable sur votre place, que les affaires nouvelles attireraient, sans doute aucun, l'attention de quelques négociants de Marseille ou étrangers à la place, qui viendraient créer une concurrence nouvelle, et que le mieux à faire, dans notre intérêt commun, était de nous entendre, dès à présent, dans le but de nous assurer ces affaires à venir, et d'écarter toute concurrence nouvelle, par l'établissement sérieux à Marseille de ma Maison marchant d'accord avec la vôtre.
Cet accord se résume dans le partage par ½ entre nos deux Maisons de toutes les affaires charbon anglais sur la place de Marseille, soit que le marché soit conclu par vous et en votre nom, soit que le marché soit conclu par moi et en mon nom.
Ce partage s'étend aussi à toute affaire que l'un ou l'autre de nous pourra créer dans la Méditerranée et l'Adriatique, à l'exception, cependant, du marché déjà conclu par vous avec la Marine de l'État pour les besoins dans le Levant, et à l'exception de mon marché actuel avec les Messageries nationales, marché fort onéreux pour moi, comme vous le savez, dans les circonstances actuelles.
II est resté, en outre, convenu que, loin de continuer, pour nos affrètements, une concurrence fâcheuse pour tous deux, nous nous entendrions pour ne prendre les navires qu'à tour de rôle, et à limites convenues à l'avance. Vous verrez plus tard s'il n'y aura pas avantage, pour vous, à charger du soin de vos affrètements mes Maisons de Newcastle et de Cardiff.
Tel est le résumé succinct mais complet, je crois, de nos conventions verbales ; j'en recevrai avec plaisir la confirmation de votre part.
Si nous sommes bien d'accord, comme je le pense, sur tout ce qui précède, je désirerais que l'exécution de ces conventions commençât de suite, soit le 1er juillet prochain. Et, comme détail d'exécution vous auriez à m'indiquer ce que j'ai à faire en ce moment.
Je n'ai en magasin à Marseille que 300 tonnes environ charbon Newcastle, et 200 tonnes environ charbon Cardiff ; de plus, en route par deux navires, environ 300 tonnes Newcastle. Je donnerai de nouveaux ordres d'affrètement en Angleterre suivant vos indications.
Restait à vider, pour moi, la question délicate du choix à faire de la personne qui doit me représenter à Marseille. J'étais à peu près d'accord, avec un ancien négociant, homme des plus honorables, rompu aux affaires, parfaitement convenable, de tous points, à gérer mes intérêts.
J'ai réfléchi cependant qu'il valait mieux peut-être, dans notre intérêt commun, éviter tout fracas et embarras d'un établissement annoncé par circulaires etc., et qu'au lieu d'un homme nouveau, si convenable qu'il fût sous tous rapports, il valait mieux continuer d'employer une personne spéciale à notre commerce, comme déjà pour représenter mes intérêts, et avec laquelle vous vous entendrez, en toute chose, beaucoup mieux qu'avec un nouveau venu.
M. Bravet Oncle était à Paris. Je me suis ouvert à lui, hier pour la première fois, de nos conventions entre vous, Monsieur et moi, et nous sommes facilement tombés d'accord, sur nos arrangements. C'est donc M. Bravet qui, dès à présent, est chargé de me représenter à Marseille, et de s'entendre avec vous de tout ce qui est et sera à faire dans l'intérêt commun.
J'espère que mon choix vous conviendra, et je l'apprendrai avec plaisir.
De son coté M. Bravet m'affirme qu'il lui sera facile de marcher toujours d'accord avec vous, et ne doute pas un seul instant des bons résultats qui doivent découler de cette bonne entente.
Vous aurez à apprécier, Monsieur, et je m'en rapporte à vous et à M. Bravet pour cela, s'il convient de donner à mon établissement à Marseille, sous la gestion de M. Bravet, plus ou moins d'apparat, au moyen de circulaires, ou bien si nous devons continuer tout tranquillement et terre à terre, à chercher les affaires et nous les assurer sans bruit aucun. Ce dernier mode est le mien de préférence.
Veuillez agréer l'assurance de ma parfaite considération.