1849.07.09.A John Carr et Cie.Newcastle
Origine : Copie de lettres à la presse n°6 - du 3 avril 1849 au 14 juillet 1849 -
Paris, le 9 juillet 1849
Messieurs John Carr & C°
à Newcastle-on-Tyne
Je vous confirme ma lettre du 5 courant et je viens répondre à votre amicale du 3 dit.
Je vous l'ai dit déjà en France, la douane perçoit à la tonne mais en général l'on débarque les charbons à l'hectolitre que l'on pèse de distance en distance, un sur dix, par exemple. Mais comme ces hectolitres sont fort irréguliers, attendu que tantôt ils ne contiennent que des charbons gros formant des interstices, et tantôt des charbons plus fins laissant moins d'interstices, il en résulte une reconnaissance des plus irrégulières et dans tous les cas une reconnaissance faible de poids attendu qu'on cherche à donner le moins de poids possible à la douane.
C'est ce qui vous explique pourquoi, au Havre par exemple, les négociants ne font point de réclamations aux capitaines pour défaut de poids.
A Dieppe, c'est autre chose : depuis que le chemin de fer existe, chaque chargement de navire se vérifie scrupuleusement comme poids, attendu que le chemin de fer pèse tout. II résulte de ce mode, qu'il est aussi impossible de faire une mauvaise reconnaissance à la réception des navires qu'il devient impossible de faire une mauvaise livraison aux acheteurs puisque le poids trouvé par le chemin de fer, qui est étranger aux opérations commerciales, en même temps qu'il sert de contrôle à la réception sert aussi de contrôle à la livraison. Tenez donc comme certain qu'à Dieppe seulement l'on peut se rendre un compte bien exact : je vous ai d'ailleurs prouvé ceci par la différence des comptes du Havre ne fussent pas mieux chargés que ceux pour Dieppe. Je le répéterai donc encore, pourquoi cette différence ? Tout simplement parce qu'on reçoit mal mais aussi parce que l'on livre mal au Havre tandis que l'on reçoit bien ce qu'on livre bien à Dieppe.
Vous m'avez demandé une preuve que les navires rendaient mal à Dieppe. Je m'empresse de vous envoyer un certificat de M. Chapman, votre compatriote, courtier maritime dans ce port qui reçoit mes navires et qui voit par ses yeux tous les mouvements. Vous verrez par ce certificat le détail de toutes les opérations et qui mieux est la déclaration formelle que les navires, qui arrivent pour d'autres que pour moi, ont généralement un rendement meilleur que celui que j'obtiens. M. Chapman est un homme d'honneur et de grande considération, qui ne se permettrait pas de déclarer et de signer ce qui ne serait pas l'exacte vérité. Mais, si cette preuve ne vous était pas suffisante, je pourrais vous remettre tous les bulletins de transport du chemin de fer où vous verriez, wagon par wagon, et navire par navire, tous les poids parfaitement conformes aux comptes de vente que je vous ai remis.
Si je ne vous envoie pas aujourd'hui ces bulletins c'est parce que cela coûterait très cher par la poste, mais, si vous y tenez, je pourrai en faire un paquet que je vous enverrai par un navire.
Vous me dites encore de tirer un couple de navires des mines de Kavensworth et de Davidson, pour m'assurer si réellement ces charbons sont supérieurs en poids aux vôtres. Je me livrerais volontiers à cette expérience, que j'ai pratiquée d'ailleurs avec les charbons Stewarts Walsend, rendant bien 22 tonnes au keel, si je n'avais la certitude par ce que j'ai vu sur les navires qui arrivent à Dieppe pour d'autres que pour moi, que les charbons de Kavensworth & Davidson rendaient mieux que les vôtres, soit parce qu'ils étaient plus lourds, soit que les chaldrons étaient plus grands. Un achat de ces charbons ne signifierait donc rien de plus et ne produirait rien de plus que ce que j'ai vu chez les autres d'ailleurs, vous le savez, quand je suis lié avec quelqu'un je n'aime pas à me lier avec d'autres et j'ai pris en amour propre de produire vos charbons.
Or que résulte-t-il de cette différence de poids entre vos charbons et ceux des autres ? C'est que, tout en achetant peut-être un peu plus cher que vous ne me facturez, mes concurrents achètent meilleur marché puisqu'ils trouvent en bénéfice de poids bien plus que vous me donnez en diminution de prix. Pourtant ces concurrents soutiennent parfaitement les bas cours de la place et mes sacrifices deviennent, sinon stériles du moins, moins radicaux que je ne l'avais pensé.
Que faut-il faire donc ? Deux choses :
1° maintenir nos conventions et nos sacrifices communs jusqu'à la fin de l'année tout en vous arrangeant de manière à ce que j'obtienne un poids satisfaisant pour diminuer autant que possible ces sacrifices.
2° et quand, nos concurrents seront fatigués, relever les prix de manière à récupérer ces premiers sacrifices. De la sorte, vous verrez vos charbons s'introduire abondamment sur les marchés de France à des prix convenables d'ici peu.
Du reste, vous pouvez dès ce moment mesurer vos pertes. Je vous ai remis le compte de vente de 7 navires pour Dieppe vous donnant une perte totale de £ 41-13-0. Ces 7 navires contenaient 565 chaldron, c'est donc une diminution commune de 1£5d3/4 par chaldron sur le prix que vous avez facturé. M. Cruzel vous avait annoncé une perte d'au moins 1S par chaldron ; vous voyez qu'il ne s'est pas trop écarté de la vérité. D'un autre côté, les deux navires qui ont été vendus au Havre vous ont donné un bénéfice de £ 5-13-2 ; ces 2 navires contenaient 115 chaldrons, c'est donc une augmentation de 1s-5d 1/3 pour chaldron sur le prix que vous avez facturé.
En somme, la position n'est pas trop mauvaise pour vous qui vendez des charbons là où vous n'en auriez pas vendu, tandis que moi, j'ai sans compensation les mêmes pertes que vous. Cependant, comme d'ici peu de temps, j'entrevois la fin de mes sacrifices, je me sens tout disposé, quelque mal et quelque résultat que j'aie, à pousser l'affaire jusqu'au bout si toutefois vous voulez, comme je pense, me seconder en maintenant le compte à 1/2 commencé.
Agréez Messieurs, mes salutations bien sincères.
Je vous l'ai dit déjà en France, la douane perçoit à la tonne mais en général l'on débarque les charbons à l'hectolitre que l'on pèse de distance en distance, un sur dix, par exemple. Mais comme ces hectolitres sont fort irréguliers, attendu que tantôt ils ne contiennent que des charbons gros formant des interstices, et tantôt des charbons plus fins laissant moins d'interstices, il en résulte une reconnaissance des plus irrégulières et dans tous les cas une reconnaissance faible de poids attendu qu'on cherche à donner le moins de poids possible à la douane.
C'est ce qui vous explique pourquoi, au Havre par exemple, les négociants ne font point de réclamations aux capitaines pour défaut de poids.
A Dieppe, c'est autre chose : depuis que le chemin de fer existe, chaque chargement de navire se vérifie scrupuleusement comme poids, attendu que le chemin de fer pèse tout. II résulte de ce mode, qu'il est aussi impossible de faire une mauvaise reconnaissance à la réception des navires qu'il devient impossible de faire une mauvaise livraison aux acheteurs puisque le poids trouvé par le chemin de fer, qui est étranger aux opérations commerciales, en même temps qu'il sert de contrôle à la réception sert aussi de contrôle à la livraison. Tenez donc comme certain qu'à Dieppe seulement l'on peut se rendre un compte bien exact : je vous ai d'ailleurs prouvé ceci par la différence des comptes du Havre ne fussent pas mieux chargés que ceux pour Dieppe. Je le répéterai donc encore, pourquoi cette différence ? Tout simplement parce qu'on reçoit mal mais aussi parce que l'on livre mal au Havre tandis que l'on reçoit bien ce qu'on livre bien à Dieppe.
Vous m'avez demandé une preuve que les navires rendaient mal à Dieppe. Je m'empresse de vous envoyer un certificat de M. Chapman, votre compatriote, courtier maritime dans ce port qui reçoit mes navires et qui voit par ses yeux tous les mouvements. Vous verrez par ce certificat le détail de toutes les opérations et qui mieux est la déclaration formelle que les navires, qui arrivent pour d'autres que pour moi, ont généralement un rendement meilleur que celui que j'obtiens. M. Chapman est un homme d'honneur et de grande considération, qui ne se permettrait pas de déclarer et de signer ce qui ne serait pas l'exacte vérité. Mais, si cette preuve ne vous était pas suffisante, je pourrais vous remettre tous les bulletins de transport du chemin de fer où vous verriez, wagon par wagon, et navire par navire, tous les poids parfaitement conformes aux comptes de vente que je vous ai remis.
Si je ne vous envoie pas aujourd'hui ces bulletins c'est parce que cela coûterait très cher par la poste, mais, si vous y tenez, je pourrai en faire un paquet que je vous enverrai par un navire.
Vous me dites encore de tirer un couple de navires des mines de Kavensworth et de Davidson, pour m'assurer si réellement ces charbons sont supérieurs en poids aux vôtres. Je me livrerais volontiers à cette expérience, que j'ai pratiquée d'ailleurs avec les charbons Stewarts Walsend, rendant bien 22 tonnes au keel, si je n'avais la certitude par ce que j'ai vu sur les navires qui arrivent à Dieppe pour d'autres que pour moi, que les charbons de Kavensworth & Davidson rendaient mieux que les vôtres, soit parce qu'ils étaient plus lourds, soit que les chaldrons étaient plus grands. Un achat de ces charbons ne signifierait donc rien de plus et ne produirait rien de plus que ce que j'ai vu chez les autres d'ailleurs, vous le savez, quand je suis lié avec quelqu'un je n'aime pas à me lier avec d'autres et j'ai pris en amour propre de produire vos charbons.
Or que résulte-t-il de cette différence de poids entre vos charbons et ceux des autres ? C'est que, tout en achetant peut-être un peu plus cher que vous ne me facturez, mes concurrents achètent meilleur marché puisqu'ils trouvent en bénéfice de poids bien plus que vous me donnez en diminution de prix. Pourtant ces concurrents soutiennent parfaitement les bas cours de la place et mes sacrifices deviennent, sinon stériles du moins, moins radicaux que je ne l'avais pensé.
Que faut-il faire donc ? Deux choses :
1° maintenir nos conventions et nos sacrifices communs jusqu'à la fin de l'année tout en vous arrangeant de manière à ce que j'obtienne un poids satisfaisant pour diminuer autant que possible ces sacrifices.
2° et quand, nos concurrents seront fatigués, relever les prix de manière à récupérer ces premiers sacrifices. De la sorte, vous verrez vos charbons s'introduire abondamment sur les marchés de France à des prix convenables d'ici peu.
Du reste, vous pouvez dès ce moment mesurer vos pertes. Je vous ai remis le compte de vente de 7 navires pour Dieppe vous donnant une perte totale de £ 41-13-0. Ces 7 navires contenaient 565 chaldron, c'est donc une diminution commune de 1£5d3/4 par chaldron sur le prix que vous avez facturé. M. Cruzel vous avait annoncé une perte d'au moins 1S par chaldron ; vous voyez qu'il ne s'est pas trop écarté de la vérité. D'un autre côté, les deux navires qui ont été vendus au Havre vous ont donné un bénéfice de £ 5-13-2 ; ces 2 navires contenaient 115 chaldrons, c'est donc une augmentation de 1s-5d 1/3 pour chaldron sur le prix que vous avez facturé.
En somme, la position n'est pas trop mauvaise pour vous qui vendez des charbons là où vous n'en auriez pas vendu, tandis que moi, j'ai sans compensation les mêmes pertes que vous. Cependant, comme d'ici peu de temps, j'entrevois la fin de mes sacrifices, je me sens tout disposé, quelque mal et quelque résultat que j'aie, à pousser l'affaire jusqu'au bout si toutefois vous voulez, comme je pense, me seconder en maintenant le compte à 1/2 commencé.
Agréez Messieurs, mes salutations bien sincères.
H. Worms
Sur le compte de vente du navire d'Ann... n° 2, vous verrez que j'avais fait une diminution sur le fret de £ 5... retenues au capitaine pour manque de poids à son arrivée à Dieppe. Ces 5 £ ayant été remboursées audit Capitaine par M. Dryden bien mal à propos je vous assure, car le déficit existait bien. Il convient pour ne pas toucher au compte de vente remis, que nous prenions chacun la moitié de cette nouvelle perte. En conséquence je vous débite pour cet objet de £ 2 - 10 s dont veuillez me créditer.