1950.09.21.De Worms & Cie.Au ministère de la reconstruction et de l'urbanisme
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Paris, le 21 septembre 1950,
Ministère de la reconstruction et de l’urbanisme
Cité administrative
Avenue du parc de Passy
Quai de Passy
Paris 16°
Monsieur le ministre,
Votre référence 28 A/57 – Indemnité de perte du "La Mailleraye "
Nous avons l’honneur de vous prier de bien vouloir trouver ci-joint, le rapport, de l’expert, Monsieur Licoys qui fixe pour la valeur du navire en août 1950 :
88.400.000, - de francs
(quatre vingt huit millions quatre cent mille francs)
Nous vous précisons que Monsieur Licoys s’occupe actuellement de terminer un second rapport sur le matériel d’inventaire du "La Mailleraye " et sur les embarcations que nous avons perdues par incendie pendant la guerre à Marseille, la valeur de ces pertes devant s’ajouter à la précédente.
Veuillez croire, monsieur le ministre, à l’assurance de notre haute considération.
P. Pon Worms & Cie
Loi du 28 octobre 1946
Armement Worms et Cie
Dommages de guerre
s/s "La Mailleraye " Cargo de 665 T.DW.
Réquisitionné par les Allemands le 21/2/41, coulé par bombardements Alliés à l’appontement de Pouillac le 4/8/44.
A – Circonstances de la perte
Le vapeur "La Mailleraye", appartenant à l’armement Worms & Cie, réquisitionné par la Krigsmarine le 21 février 1941 (cf. p. I) a coulé le vendredi 4 août 1944 aux appontements des consommateurs de pétrole à Pauillac au cours d’un bombardement aérien (cf. p. 2).
La déclaration de sinistre a été faite au service régional du commissariat à la reconstruction le 11 août 1944 (cf. p. 2). Il en a été accusé réception par le service régional de la Seine-Inférieure qui l’a enregistrée sous le n° X A 17.336 D.S. (cf. p. 3).
À la requête de l’armement Worms & Cie le bureau veritas a procédé le 30 mars 1946 à un constat (cf. p. 4) duquel il résulte que le navire a été atteint par une bombe puissante par le travers du panneau 2 sur l’avant de la passerelle. Le navire était coulé et couché sur bâbord avec une gîte de 45° environ : il reposait sur un chalutier armé lui-même coulé et gîté sur bâbord. La conclusion de l’Expert est formelle : en raison de l’importance et de l’étendue des avaries consécutives au bombardement aérien le navire est jugé irréparable.
De ce qui précède il résulte que les avaries de "La Mailleraye", équivalant à perte totale, sont dues à un fait de guerre matériel, certain et direct.
L’armement Worms & Cie est donc fondé à se réclamer des dispositions de la loi du 28 octobre 1946. À cette fin il a chargé l’expert soussigné d’évaluer le coût de la reconstitution à l’identique du navire perdu.
B – Caractéristiques du s/s "La Mailleraye"
1/ Généralités :
- construit en 1917 par John Berg & Cie à Delfsifl
- port d’armement : Le Havre
- dimensions de douane : 48.25 x 7.86 x 3.59
- creux au livet : 3 m 83
- tonnage brut : 490 Tx
- tonnage net : 264 Tx
- tonnage s/ le pont : 349 Tx
- portée en lourd : 665 tonnes sur 3 m 32
- tirant d’eau lège : 1 m 83
L x B x C’ = 1455
TDW/GT = 665/490 = 1.36
Cote : bureau veritas I 3/3 C I – I
Dernière reclassification : 2/43 à Caen
Dernière visite : juin 1943
2/ Coque :
- en acier, divisée en 5 compartiments par 4 cloisons
- transversales étanches
- un pont acier
- dunette 17 m 30
- gaillard 6 m 60
- WB : 100 T
- peak avant : 16 T
- peak arrière
- 2 panneaux 6 m, C2 x 12 m, 70 sur 4 m, 46 de large
- cale avant 1 – 293m3 ; cale 2 – 507 m3
- soutes 70 T
- 2 mâts
- 3 mâts de charge
- 3 treuils : 2 de 2 T et 1 de 3 T
- chaînes 28m/28
3/ Appareil moteur
- machine triple expansion, placée à l’arrière
32 – 50 – 80 / course 55
- puissance 400 CVI à 135 T/m
- une hélice – arbre porte hélice neuf 1-35 – lubrifié vitesse 9 nœuds
- une chaudière cylindrique à retour de flammes
Diamètre : 3m,65 ; longueur : 3m,10
2 foyers – surface de guille : 4 m2
Surface de chauffe : 126 m2
Timbre : 13 K
C - Évaluation
Les copies de pièces 5, 6, 7 et 8 établissent l’accord de la marine marchande et du ministère de la reconstruction :
a) sur le fait que le navire est irréparable
b) sur l’affectation des indemnités de reconstitution auxquelles l’armement Worms et peut prétendre au règlement des soultes de caractéristiques dues par cet armement à l’occasion du remplacement de ses navires perdus sous affrètement des transports maritimes.
Toutefois l’Armement Worms informé depuis peu du montant des soultes a préféré remplacer "La Mailleraye" par un nouveau navire dont il doit sous peu passer commande. Il y a lieu dans ces conditions d’évaluer la valeur de remplacement à l’identique de "La Mailleraye" à la date d’août 1950 ; cette valeur restant susceptible de révision suivant les variations des conditions économiques entre la date de l’évaluation et la date de mise en service du navire de remplacement.
Le s/s "La Mailleraye" avait 27 ans à la date de sa perte : il était en très bon état de conservation et d’entretien eu égard à son âge, ainsi qu’en témoignent la possession de la 1ère cote du bureau veritas (reclassé en juin 1943) et l’inspection passée au moment de sa réquisition (« pas d’avaries ») (cf. p. 1).
Compte tenu de son type, de sa portée en lourd avantageuse pour un faible tonnage brut, de sa faible consommation pour une bonne vitesse commerciale, des prix admis pour des navires identiques, recoupés par des évaluations anglaises, j’estime que la valeur 1939 de remplacement à l’identique en France est de :
Fr : 6.500.000,-
D – Vétusté
Devis sommaire
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Poids |
Prix matières |
Main-d’œuvre |
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Heures |
Prix FG compris |
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Coque |
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Appareil moteur |
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Frais divers |
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Récapitulation :
- matériaux : 2.600.000
- Main-d’œuvre : 3.320.000
= 5.920.000
Bénéfice & taxes : 590.000
= 6.510.000 arrondi à 6.500.000 Fr.
En raison de l’âge du navire l’application des taux partiels de vétusté conduit à un abattement total supérieur à 30 % qui même abondé de 25 % pour tenir compte du bon état de conservation, et d’entretien du navire (reclassé en 1943) reste supérieur au maximum légal de 20 %. Il y a donc lieu d’appliquer ce dernier taux et la valeur 1939 à l’identique, vétusté déduite, ressort à :
6.500.000 F x 0,8 = 5.200.000 Fr.
E – Valeur août 1950 -
Pour ce navire de construction assez simple je propose le coefficient 17 par rapport à 1939, soit :
5.200.000 F x 17 = 88.400.000 Fr.
(quatre vingt huit millions quatre cent mille francs).
À cette valeur s’ajoutera celle des matières consommable et de l'inventaire extra-règlementaire existant à bord an moment de la perte : un rapport complémentaire en fixera la composition et le montant.
Fait à Versailles, le 11 août 1950