1917.02.13.Ch. A. Rouyer - Worms et Cie Alger

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Worms & Cie

Alger, le 13 février 1917
Messieurs Worms & Cie - Paris

Messieurs,
Nous nous sommes rendus ce matin à une réunion des négociants en charbon provoquée par le président de la Chambre de commerce et à laquelle assistaient les directeurs de la Compagnie du gaz et de l'énergie électrique. Cette réunion a son origine en partie dans un article paru dans la "Dépêche algérienne" de ce matin et que vous trouverez ci-joint, mais le président désirait aussi avoir sur la question du charbon des renseignements pour documenter le vice-président qui part demain en mission pour Paris auprès du gouvernement au sujet des transports.
Le président a voulu d'abord éclaircir le point suivant : un des négociants en charbon avait dit au secrétaire de la Chambre de commerce qu'il serait peut-être opportun de réclamer aux autorités le refus de charbon aux navires neutres ne travaillant pas pour le compte des alliés afin de ménager les ressources de charbon au profit de la ville. Sur la question du président ce négociant s'est fait connaître : c'est M. King et sa suggestion était née de ce que M. Legembre lui avait dit qu'on ne pourrait peut-être plus recevoir de charbon avant le mois de juillet.
Nous avons fait remarquer que le commerce des charbons à Alger est surtout une industrie de navigation et que la consommation industrielle proprement dite se réduit aux besoins de la Compagnie du gaz et de l'énergie électrique, représentée à la réunion, et, dans une proportion beaucoup moindre, de ceux de M. Altairac. M. Legembre a alors dit qu'il y avait aussi les besoins de l'agriculture (battages), mais nous avons encore objecté qu'ils n'étaient pas de saison et ne représentaient pas un chiffre énorme.
Le président, qui s'était en principe montré hostile à demander une limitation des livraisons, a été d'accord avec nous que cette question de refuser du charbon aux neutres visés était une question spéciale qu'il valait mieux ne pas toucher.
M. Davies s'était aussi prononcé contre la demande de limitation.
Le président a voulu savoir ce que les négociants pensaient de la taxation des frets et tout le monde a été d'accord que c'était à elle que nous devions les difficultés de réapprovisionner notre port puisque les ports neutres situés entre l'Angleterre et l'Algérie peuvent toujours faire mieux que nous. Messieurs Durand, Legembre et Cory prétendent avoir fait d'énergiques mais vains efforts pour trouver des bateaux, la Compagnie du Gaz aussi. Il paraît que l'Énergie électrique s'est adressée au gouverneur général et son siège social à qui de droit à Paris et qu'on leur a répondu de se débrouiller, réponse qui aurait été faite également aux Chemins de fer algériens de l'État. MM. Cory auraient aussi essayé d'affréter un bateau pour l'Énergie électrique et n'y auraient pas réussi.
M. Durand a dit que même s'il n'existait pas de taxation il serait impossible d'affréter des bateaux parce qu'il faut pour les affréter, demander une autorisation spécifiant les données des bateaux à affréter et que, en raison du temps nécessaire pour faire cette demande, on était exposé à ne plus trouver le bateau quand on obtenait l'autorisation. Nous avons répondu que c'était là une affaire d'organisation et le président a indiqué que devant cette difficulté les Chemins de fer algériens avaient constitué des agents à Paris et à Londres avec pouvoir de traiter leurs affaires au mieux.
Nous avons malheureusement lieu de nous méfier et c'est pour cela que nous nous sommes prononcés contre toute idée de limitation dans les livraisons.
Le directeur de l'Énergie électrique aurait bien voulu qu'on lui assure les besoins de son usine, mais personne n'a voulu le faire. Comme le président lui demandait de fournir une note relativement à ses besoins, nous avons exprimé l'idée que si l'on en venait à imposer une restriction pour les satisfaire, il serait juste de les repartir : cela ne nous empêcherait pas par la suite, et si vous le désirez, d'en prendre plus que notre part. On sera en effet toujours heureux de trouver notre charbon.
Il nous semble que certains de nos voisins sont sans entrain et nous craignons de nous trouver obligés, à un moment donné, de marcher au détriment de notre clientèle.
Veuillez agréer, Messieurs, nos bien sincères salutations.

Ch. A. Rouyer


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