1944.07.12.Des Services maritimes.Note
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Le PDF est consultable à la fin du texte.Paris, le 12 juillet 1944
Note sur les dépenses à prévoir pour la reconstruction de la flotte
I - A la veille de la guerre la flotte de MM. Worms & Cie comprenait 24 navires à vapeur, d'un port en lourd total de 41.400 tonnes ; le plus ancien de ces navires, le s/s "Bidassoa", avait été construit en 1901 ; le plus récent, le s/s "Le Trait" en 1934.
La situation de ces différents navires se présente actuellement comme suit :
1° - Navires officiellement perdus (5 navires) : "Barsac", "Cérons", "Jumièges", "Château-Yquem", "Château-Larose".
2° - Navires officieusement perdus (3 navires) : "Fronsac", "Listrac", "Pontet-Canet".
3° - Navires présumés ne pas devoir nous être rendus à la fin des hostilités (4 navires) : "La-Mailleraye", "Château-Palmer", "Lussac", "Mérignac".
4° - Navires en U.K. ou en Afrique du Nord présumés devoir nous être rendus à la fin des hostilités
a) - Hors d'âge (7 navires) : "Bidassoa" (1901)[1], "Caudebec" (1910), "Château-Latour" (1914), "Léoville" (1922), "Margaux" (1912), "Pessac" (1907), "Sauternes" (1922).
b) - Pouvant continuer ou reprendre leur service (5 navires) : "Château-Pavie" (1930), "Le Trait" (1934), "Médoc" (1930), "Normanville" (1921), "Pomerol" (1930).
Nous sommes ainsi amenés à envisager la construction en première urgence de 12 navires, pour remplacer ceux perdus ou considérés comme tels ; en deuxième urgence, de 7 navires, certains d'entre eux comme "Caudebec", "Château-Latour" et "Margaux" étant d'ailleurs susceptibles de continuer à rendre de bons services pendant quelques années, au lendemain de la cessation des hostilités, moyennant, il est vrai, une charge d'entretien et de réparations relativement élevée.
Nous ajouterons que l'hypothèse ainsi retenue nous semble assez conservatrice ; peut-être, parmi les navires actuellement en U.K. ou en Afrique du Nord, certains auront-ils disparu au jour de la cessation des hostilités ; mais par ailleurs nous avons considéré comme perdus "La-Mailleraye", "Lussac" "Mérignac" et "Château-Palmer", actuellement sous contrôle allemand dont certains pourraient être récupérés par nous.
Au demeurant, si le nombre des navires hors d'âge qui nous seraient en définitive restitués était inférieur à celui envisagé ci-dessus, la charge financière que nous chiffrons ci-après serait réduite, puisque jouerait alors l'article 11 de la charte-partie d'affrètement et non pas seulement, comme dans notre évaluation, la responsabilité entière de la Maison.
II - Les navires dont la construction est envisagée pour remplacer nos unités perdues, présumées perdues ou hors d'âge, sont les suivants :
1° - Caboteur à vapeur de 2.560 t., prototype mis au point par les Chantiers de la Méditerranée, au Havre.
Ce navire, remarquablement adapté à notre trafic, constitue en fait une mise au point de "Château-Pavie", lui-même dérivé de "Château-Latour". L'amélioration technique de ce prototype par rapport à ses prédécesseurs, bien qu'appréciable, n'entraînerait que des frais supplémentaires peu élevés.
En fonction des renseignements en notre possession et sur la base des prix actuels estimés, des Chantiers français, son coût serait de 51.100.000.- contre, pour un "Château-Pavie", 47.400.000 F.
2° - Caboteur à moteur de 1.500 t., prototype non encore étudié.
Son prix, selon une estimation faite comme ci-dessus, serait de 36.800.000.- contre, pour un "Le-Trait", de caractéristiques commerciales très voisines, un prix de 33.800.000.
3° - Caboteur à moteur de 850 t., prototype mis au point par les Chantiers Augustin Normand, au Havre.
Son prix, selon une estimation faite comme ci-dessus, serait de 24.500.000.- contre, pour un "Mérignac", de caractéristiques commerciales très voisines, un prix de : 21.300.000.-.
4° - Caboteur à moteur de 450 t.. prototype étudié pour la Société Havraise de Transit et de Transport, par les Chantiers Augustin Normand au Havre.
Son prix, selon une estimation faite comme ci-dessus, serait de 17.300.000.- contre, pour un "La-Mailleraye", de caractéristiques commerciales légèrement supérieures, un prix de 17.100.000.- F.
5° - Charbonnier à vapeur de 2.550 t.. prototype étudié pour l'Armement Lamy, par les Ateliers et Chantiers de France.
Son prix, selon une estimation faite comme ci-dessus, serait de 38.700.000 F. contre, pour un "Jumièges", de caractéristiques commerciales très voisines, un prix de 36.300.000 F.
6° - Caboteur à vapeur de 2.100 t., construit par les Chantiers Cockerill d'Anvers.
Ces navires seraient moins rapides que le prototype de 2.560 t. et leur port en lourd inférieur ; par contre, leur capacité cubique est sensiblement plus élevée et leur construction avec un pont shelter les rendrait particulièrement aptes au trafic d'Afrique du Nord, notamment en ce qui concerne les primeurs.
Le prix indiqué sous toutes réserves, serait de 26.000.000.-, à rapprocher de celui de 51.100.000.- pour le prototype de 2.560 t.
7° - Cargo à moteur de 1.175 t. - ACSM -
Ces navires, au nombre de trois, seraient l'adaptation au trafic de paix de bateaux en construction pour compte allemand. Intermédiaires entre nos prototypes de 1.500 t. et 890 t., ils présenteraient essentiellement l'avantage de nous procurer très rapidement trois unités d'un modèle dont le prototype voisin n'a pas été retenu pour la première urgence.
Son prix serait de l'ordre de 31.700.000.- à rapprocher d'un prix de 27.800.000.- pour un "Sauternes", de caractéristiques commerciales très voisines.
III - La disparition de tout trafic au cabotage pendant plus de cinq ans nous oblige, contrairement à ce qui se passe pour le long-cours où les navires ne sont pas strictement spécialisés par ligne, à fonder nos calculs sur des hypothèses théoriques.
Nous en avons choisi deux :
1° - exploitation de lignes ayant la même contexture que celles d'avant-guerre
Par un meilleur aménagement des dessertes et des rotations nous utiliserions une flotte de 22 navires seulement :
6 - types Château (ou Cockerill)
6 - 1.500 t.
7 - 850 t.
1 - 450 t.
2 - charbonniers.
Nous insistons d'ailleurs sur le fait que l'expérience due à la reprise du trafic pourrait conduire soit à une augmentation, soit à une diminution de ces prévisions.
2° - Même hypothèse qu'en 1°, mais nouvelle ligne Sète/Afrique du Nord, avec départ hebdomadaire.
Deux "Château" supplémentaires seraient nécessaires, d'où une flotte totale de 24 navires.
Nous devons en outre tenir compte de la possibilité ou nous serons ou non d'obtenir, soit la construction de 5 vapeurs Cockerill, soit l'affectation à notre profit des trois cargos à moteur ACSM.
Pour ne pas alourdir cet exposé, nous nous en sommes tenus aux deux variantes subsidiaires suivantes :
A - construction de navires uniquement selon les prototypes du programme de l'Amirauté française.
B - construction de 5 navires Cockerill, de 3 cargos ACSM et pour le reliquat, de navires prototypes[2].
Le tableau ci-après donne globalement les 4 chiffres correspondant aux sommes restant à la charge de la Maison et permet d'apprécier ainsi la "fourchette" des hypothèses retenues.
1ère variante (prototypes français) | 2ème variante (5 Cockerill + 3 ACSM + prototypes français) | |
1ère hypothèse 22 navires (1) | 241.225.000 | 168.025.000 (2) |
2ème hypothèse (1) | 341.835.000 | 268.625.000 (2) |
(1) - En supposant les Cockerill affectés en priorité aux remplacements T.M.
(2) - Nous avons supposé pour les cargos Cockerill que les soultes se calculeraient non par rapport au prix français, mais par rapport au prix belge du navire à remplacer.
IV - Nous avons, dans le cadre des hypothèses et variantes précédentes, évalué l'échelonnement dans le temps des dépenses nous incombant. Le tableau ci-dessous résume ces indications :
Echelonnement | Décomposition | Total |
1 - hyp. prototypes |
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2ème période - 3 ans - 9 nav. |
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(1) Algérie 100.600.000.-.
Echelonnement | Décomposition | Total |
3ème période - 3 ans - 6 nav. en rempt T.M. 3 x 1.500 t. |
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| Total | 341.825.000 |
II - hyp. ACSM et Cockerill |
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2ème période - 3 ans - 7 nav. |
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3ème période - 1 an - 1 nav. |
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| Total | 268.625.000 |
4ème période - Remplacement des 5 navires actuellement exploitables. Pour mémoire
V - Nous avons enfin, à titre indicatif, calculé la fourchette correspondant aux hypothèses extrêmes à prévoir ; ces hypothèses sont les suivantes :
1ère hypothèse (dépense minimum) - Les navires exploitables nous sont rendus, les navires hors d'âge nous sont remplacés par les T.M.
2ème hypothèse (dépense maximum) - Les navires exploitables sont supposés perdus et remplacés par les T.M., les navires hors d'âge nous sont rendus et doivent être remplacés à nos frais.
Nous nous plaçons dans le cas où la nouvelle flotte comprend 24 navires. Dans la 1ère variante, tous les nouveaux navires sont construits en France à partir des prototypes ; dans la 2ème variante, nous retenons les 3 cargos ACSM, les 5 cargos Cockerill ; nous complétons avec des prototypes.
1ère variante | 2ème variante | |
1ère hypothèse | 127.225.000 | 55.325.000 |
2ème hypothèse | 489.700.000 | 340.300.000 |
Moyenne | 308.000.000 | 198.000.000 |
VI - Deux cas particuliers sont, en outre, signalés pour mémoire :
1° - Celui où il serait possible d'obtenir l'affectation aux navires hors d'âge de cargos Cockerill au lieu de prototypes de 2.560 t. Cette substitution entraînerait une diminution de dépenses, au cas de la création d'une ligne Métropole/Afrique du Nord (2ème hypothèse, 2ème variante) de 31.900.000.-
2° - Celui où le "Château-Pavie" restant affecté au cabotage de Madagascar, sa prise en charge par la Nochap et la construction d'un "Château" supplémentaire devraient être envisagées.
[1] Date de construction : Nous considérons le "Léoville" et le "Sauternes" comme devant être hors d'âge en raison des travaux extrêmement importants que nécessiterait leur remise en état, en raison de leur affectation militaire depuis 1939.
[2] Dans cette variante, un cargo ACSM. remplacerait un 1.500 t. et 2 cargos ACSM 2 850 t.