1863.12.16.A Bixio.Paris
Origine : Copie de lettres à la presse du 30 novembre 1863 au 17 décembre 1863
Paris, le 16 décembre 1863
Monsieur Bixio - Paris
J'ai l'honneur de vous adresser, avec la présente lettre, la note que vous m'avez demandée sur les usines à gaz de Turin.
Je l'ai faite aussi succincte que possible, me bornant à énoncer les faits et indiquer mes idées. Je m'en rapporte parfaitement à vous pour déduire toutes les conséquences possibles des faits sur lesquels je désire appeler votre intention.
Note pour Monsieur Bixio sur les usines à gaz de Turin.
Trois compagnie se partagent l'éclairage de la ville de Turin. L'ancienne société Albani, actuellement aux mains du Crédit mobilier italien, la Compagnie des consommateurs réunis, l'usine a gaz portatif de M. H. Worms.
II est de notoriété publique que la Compagnie des consommateurs réunis est à la veille de disparaître ; elle a à payer sous quelques jours F 40.000 à la maison anglaise qui a construit l'usine ; elle a de plus à payer aussi, sous quelques jours, des acceptations déjà renouvelées de MM. Bolméda et s'élevant à F 185.000. Pour faire face à ces payements elle n'a presque rien en caisse et tous les efforts tentés pour créer un nouveau capital sont restés sans résultat. Une démarche a été faite auprès de MM. Bolméda pour les prier de reporter l'échéance de leurs acceptations à quelques mois. Ces Messieurs s'y sont absolument refusés, menaçant pour ainsi dire la Société des consommateurs de la faire mettre en faillite si elle ne fait pas les fonds à l'échéance. Et cependant, en présence de pareils faits au lieu de laisser tomber d'elle-même une compagnie rivale, les deux autres concurrentes paraissent avoir pris à tâche de la soutenir en rachetant au pair des actions de plusieurs des Consommateurs réunis.
Monsieur Worms avait, en rachetant déjà quelques-unes de ces actions, suivi l'exemple donné par le Crédit mobilier, mais il s'est arrêté dans cette voie, qui lui semble fausse et dangereuse, et il expose ici les raisons de sa détermination arrêtée de ne pas aller plus loin, quoi que décide le Crédit mobilier.
Le but de ces achats d'actions était de s'assurer de nouveaux abonnés mais à quel prix acquiert-on ce développement ?
On paye le prix intégral d'actions qui en réalité n'ont aucune valeur et qui, si on laisse les choses suivre leur cours naturel, seront frappées de mort dans quelques temps, et on fait ce sacrifice pour, en résumé, s'engager pendant plusieurs années aux prix actuels du gaz courant, soit 32 à 35 centimes, prix qui ne laissent que des bénéfices négatifs s'ils ne laissent de la perte.
Tel est en peu de mots le résumé de cette opération.
Pour sa part, M. Worms y renonce et trouve plus rationnel de laisser tomber d'elle-même une Compagnie déjà à bout de force.
Il ajoute que, si la Compagnie, relevant du Crédit mobilier italien veut de son côté renoncer à ces achats d'actions et s'entendre avec lui pour remonter le prix des nouveaux abonnements, il sera facile aux deux intéressés d'obtenir, pour l'avenir et immédiatement, des prix rémunérateurs et réellement en rapport avec le coût, à Turin, des charbons et autres matières nécessaires à la production du gaz.
Paris, le 15 décembre 1863