1917.06.09.De Worms et Cie Bayonne
Worms & Cie
Bayonne, le 9 juin 1917
MM. Worms & Cie - Paris
Messieurs,
Nous vous accusons réception de votre lettre du 7 courant et vous confirmons la nôtre du 5. Réglementation du charbon. Le service du ravitaillement de la préfecture des Basses-Pyrénées commence à appliquer le programme établi par la circulaire ministérielle du 29 avril dernier (J. Officiel du 30 avril).
Nous avons été convoqués avant-hier soir avec les autres importateurs de Bayonne, à la Mairie, par la commission chargée de la répartition du charbon dans l'arrondissement. Après beaucoup de tâtonnements, cette commission a décidé que la quantité de charbon mise à la disposition de la municipalité de Bayonne par décision de la préfecture sur chaque arrivage serait, quel que soit l'importateur, remise par parts égales aux 5 maisons d'importation de la place qui seraient chargées de détailler les quantités attribuées entre les consommateurs locaux. La commission a fixé les frais locaux et la rémunération qui serait allouée en sus du prix de base pour livrer le charbon à la population. Sauf modification, cette majoration pour Bayonne a été fixée à 27 F la tonne, comprenant les frais de mise en entrepôt, l'octroi, le camionnage à domicile, et 10 F par tonne maximum pour le déchet, les frais généraux et le bénéfice. Il n'y a eu qu'à s'incliner devant cette proposition qui paraissait être vivement souhaitée par les trois Maisons Depeaux, Maningue et Frois, qui ne reçoivent rien.
Il semble résulter des explications fournies par le sous-préfet de Bayonne, que chaque municipalité de chef lieu de canton devra faire elle-même, sinon directement, du moins par l'intermédiaire de commerçants désignés par elle suivant la circulaire ministérielle, la fourniture du charbon aux industriels, aux établissements oubliés et aux ménages ; ce qui revient à dire qu'en fait, les importateurs ne peuvent pas traiter directement avec les acheteurs en dehors des usines travaillant pour la défense nationale, et il semble bien, quand on étudie la circulaire en question, que c'est ce qui est visé. Le représentant de M. Plisson nous a dit aujourd'hui que, depuis le commencement du mois il n'acceptait plus de commandes directement autrement que sur visa de la mairie, de la sous-préfecture, ou de la préfecture, suivant le lieu de destination. Cette organisation, telle qu'elle est conçue, mène inévitablement à la création de la carte de charbon.
Pour l'instant, en ce qui nous concerne, nous n'avons pas encore eu à prendre position, étant obligés de répondre aux demandes que nous recevons que nous n'avons pas de disponible, lorsqu'il s'agit d'acheteurs notables, ou bien, s'il s'agit de particuliers, qu'ils doivent s'adresser à la mairie de leur localité. Mais nous ne voyons guère le moyen d'opérer différemment que ne le fait la Société franco anglaise du moment qu'on entend appliquer la circulaire du 29 avril.
Il est certain que si l'on ne considère que la circulaire du 18 avril, adressée aux importateurs, et dans laquelle le ministre les informe qu'il contrôlera les destinations, sauf à y apporter des modifications, il y a contradiction entre les deux circulaires, mais il semble logique d'admettre que c'est la dernière en date qui est de beaucoup la plus importante, d'autant plus que celle du 18 avril ne s'adressait qu'aux importateurs, tandis que celle du 29 avril s'adressait aux autorités départementales chargées du ravitaillement.
En tout cas nous attendons de connaître votre manière de voir pour savoir ce que nous devons faire.
Agréez, Messieurs, nos sincères salutations.
[Pierre Le Roy]