1942.03.04.De Daniel de Bergevin - Journal de Rouen.Article
NB : Cette coupure de presse est conservée dans un recueil classé au 5 janvier 1942.
"Le journal de Rouen"
4 mars 1942
Un homme de bonne volonté : Pierre Pucheu
Les Français paraissent souvent étranges et complexes, non seulement aux yeux des étrangers, mais aussi à ceux de leurs propres compatriotes.
On a peine à comprendre, par exemple, la méfiance, voire même l'hostilité préconçue que beaucoup d'entre nous, ceux-là même parfois qui réclamaient hier à cor et à cris le remplacement des vieilles équipes, témoignent aux hommes nouveaux avant même que d'avoir pu les juger sur leurs actes.
Pour avoir été moins systématiquement critiqué que ne le fût l'amiral Darlan, Pierre Pucheu, hier encore inconnu du gros public, n'en a pas moins subi la commune loi. Il n'est point d'adversaires de la Révolution nationale qui n'aillent répétant : « Pucheu ? C'est l'homme de la Banque Worms ». Pucheu, l'homme des trusts et des banques ? Allons donc ! Il est des accents qui ne trompent point.
Dès les premiers jours de son voyage en Afrique du Nord, le ministre de l'Intérieur a su conquérir tous ses auditeurs, non point par un talent d'orateur hors pair, non point à la manière d'un Torrès ou d'un Briand mais par la simplicité, la netteté, la franchise de son attitude et de sa parole. Hier encore, devant les maires des trois départements réunis à Alger, il a su magnifiquement définir les causes de notre défaite : « Vaincus, parce que nous n'avions pas assez bien vécu, parce que nous n'avions pas assez bien agi ». Il montrait les devoirs de tous les Français : « Souffrir d'une souffrance également répartie, afin que personne ne meure ».
Il faut aussi l'avoir vu la semaine passée dans l'immense salle d'honneur du Palais d'Été, d'où l'on domine la splendide baie d'Alger, devant tous ceux qui, avec une sincérité plus ou moins profonde, ont fait serment aux mainteneurs de la patrie.
Premier discours d'une série qui devait être longue. Après avoir lu, et fort bien un message du Maréchal à l'Afrique du Nord, il parla avec une sincérité, une émotion, un dynamisme vibrant et, sans aucun doute, produisit une vive impression sur l'auditoire divers qui ne trouvait là réuni.
Cependant, il ne disait point toujours des choses agréables à entendre. A savoir que la Métropole doit demander à son Empire plus qu'elle ne lui donnera. Ce n'est point aisé à dire en Algérie, ni plaisant à entendre pour nos administrateurs et nos colons.
M. Pierre Pucheu n'avait peur ni des réalités, ni des vérités. C'est un homme neuf, libéré des préjugés du passé, convaincu
que la France ne peut retrouver sa grandeur que si tous ses enfants, ouvriers comme patrons, les Français de la Métropole comme ceux de l'Empire, savent se grouper derrière le Maréchal. Il sait que la route est longue encore et difficile qui reste à parcourir et que c'est toute une révolution...
Habitué de longue date aux promesses électorales de ceux qui promettaient de demander tout à l'impôt et rien aux contribuables, à la radio étrangère qui le berce de divisions et de mensonges, le peuple de France saura-t-il enfin comprendre ?
Daniel de Bergevin