1941.06.28.De Worms et Cie Bayonne.Note
Copies de notes
Le PDF est consultable à la fin du texte.28 juin 1941
Messieurs Worms & Cie
Direction Charbons
Paris
Messieurs,
Organisation de la succursale de Bayonne
Les lignes qui suivent sont le résultat de mûres réflexions faites à l'occasion de l'évolution des activités bayonnaises de votre Maison. Elles ne procèdent pas d'un moment de dépression ou de découragement, bien au contraire. Elles sont simplement l'expression de ce que nous croyons être la vérité, vue sous l'angle local, telle que la conçoit le directeur de votre succursale, en faisant abstraction de toute considération personnelle et en mettant au premier plan ce qu'il croit être l'intérêt primordial de votre Maison de Bayonne.
Avant la dernière guerre, la direction de Bayonne représentait déjà une tâche assez lourde pour son titulaire, tâche qui, compte tenu des activités qu'il avait à exercer dans l'ordre professionnel, absorbait largement des journées prolongées de travail.
Depuis l'armistice, l'activité charbonnière a décru, au moins des 4/5èmes sinon davantage, et le barème du travail administratif et paperassier c'est considérablement accru. La plupart de ces travaux ne peut être assurée par de simples exécutants ou des copistes, mais comporte, pour être faite convenablement et en temps voulu, une activité intellectuelle, une attention et des efforts soutenus qui impliquent une organisation méthodique et hiérarchisée. L'existence d'organismes syndicaux professionnels anciens, la création journalière de nouveaux organismes dans l'ordre administratif, multiplient les contrôles les états, les comptes rendus à l'extrême, et cela ne s'exerce plus aujourd'hui sur le seul plan charbonnier : en raison de l'évolution de nos activités, nous entrons dans toutes autres industries ou professions, chacune constituant des organismes (égaux-centriques) qui prétendent contrôler tout dans le temps et dans l'espace.
Si l'on ajoute à ce tableau le fait que nous avons à nous adapter à de nouvelles activités intérieures, ou à les créer entièrement ce qui est le cas des tourbières, que tout est à improviser dans ce domaine aussi bien sur le plan organisation de la profession que sur celui de la main d'uvre, de l'administration ou de la technique, vous comprendrez aisément que, quelque effort que fournisse le chef responsable, il ne lui est plus possible à la fois de donner les impulsions nécessaires et de contrôler l'exécution des ordres qu'il donne.
C'est là son plus grand souci à l'heure actuelle, et, après avoir pesé toutes les données du problème, il estime qu'il ne lui est plus possible aujourd'hui de continuer à diriger semble des affaires bayonnaises avec succès, s'il ne peut s'alléger d'une partie de la tâche qui devient des plus complexes à savoir l'ensemble des questions techniques.
C'est ainsi que nous devons actuellement transformer de fond en comble nos méthodes d'agglomération des charbons, que nous devons réinstaller et réadapter une usine de carbonisation tout de même assez importante, située à 100 km de Bayonne ; que nous devons installer de toutes pièces une exploitation de tourbe qui absorbera une main d'uvre notable, mais qui exige pour la créer et la mettre en ordre de marche des connaissances techniques tant en matière de mécanique générale que d'organisation de chantier, de topographie, de drainage. Que nous faisons de l'exploitation forestière, de la carbonisation en forêt, que demain nous serons peut-être, par la force des choses, appelés à nous faire scieurs. Tout ceci n'ajoutant à nos anciennes activités de base dont nous devons maintenir le substratum d'organisation.
Or, la Maison entière de ces activités et leur contrôle général repose aujourd'hui sur un seul homme qui est à la merci de défaillances physiques ou d'un accident, mais surtout qui ne peut plus, quelque effort qu'il fasse, assurer dans le temps l'ensemble de cette coordination et de ce contrôle, s'il n'est pas allégé prochainement de l'essentiel de tout ce qui constitue ce que nous appelons les "questions techniques" c'est-à-dire :
La direction et le contrôle de nos ateliers d'entretien et de réparation ; celui du matériel roulant et fluvial ; l'étude des questions de mécanique et l'exploitation des tourbières ; celles des exploitations forestières ; celle de l'usine de distillation de Haut-Mauco ; enfin, des procédés nouveaux d'agglomération pour notre usine à Boulets et à Briquettes.
Pour l'ensemble de ces motifs, nous estimons qu'il serait aujourd'hui nécessaire qu'un ingénieur, possédant une bonne formation générale et des connaissances pratiques d'entretien du matériel, d'organisation des chantiers, soit mis à la disposition du directeur de Bayonne pour l'alléger de l'essentiel des soucis que comporte aujourd'hui l'ensemble de ces questions.
Nous nous excusons d'avoir été à la fois un peu long et incomplet, mais croyons vous avoir dit l'essentiel de nos réflexions sur ce sujet capital pour le présent et surtout pour l'avenir de la succursale de Bayonne. Nous croyons en avoir tiré la seule conclusion qui s'impose, et vous serions obligés de bien vouloir l'examiner avec toute l'attention qu'elle comporte.
Nous vous prions de croire, Messieurs, à l'expression de nos sentiments dévoués.
P.Pon Worms & Cie